A quelques mois de la présidentielle, la situation est favorable au parti majoritaire Ayant phagocyté la Centrale syndicale, le FLN vide le RND d'un de ses soutiens les plus puissants. Tous les coups sont permis. C'est la règle du jeu puisque l'enjeu est la présidence de la République. Entre le FLN et le RND, c'est la guerre en sourdine. Dans un premier temps, le RND n'a fait que sourciller en voyant la reconstitution de l'Alliance présidentielle composée du FLN, du TAJ et du MPA. Mais la Centrale syndicale s'est alignée carrément derrière le FLN, le parti de Ouyahia ne se fait plus de doute. Au quartier général du RND, on est convaincu que les choses peuvent se faire sans aval et que sa proximité avec les cercles décisionnels n'est plus de rigueur. Il y a trois jours, le secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd, a rendu hommage au nouveau secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, un «hommage qui intervient en reconnaissance des sacrifices consentis par les syndicalistes pour défendre, aussi bien les travailleurs, les institutions de l'Etat que le régime républicain». Le syndicaliste Amar Saâdani «a beaucoup donné pour défendre les intérêts des travailleurs, il était l'initiateur du comité d'autodéfense dans la wilaya d'El Oued pour défendre l'Algérie et le régime républicain», a ajouté Sidi Saïd. Voilà donc qui est clair: l'Ugta qui, selon les statistiques officielles représente 15% de l'électorat soutiendra, sans contexte, le candidat du FLN. Ayant phagocyté la Centrale syndicale, le FLN vide le RND d'un de ses soutiens les plus puissants. La situation est d'autant plus favorable au parti majoritaire qui exploite les tergiversations du RND à quelques mois de la présidentielle. «Pourvu que ça dure» semblent dire les dirigeants du vieux parti. Après l'Ugta, le FLN s'attaquera-t-il à l'Unfa (Union nationale des femmes algériennes) qui est restée dans sa majorité fidèle au RND? Le projet tente au plus haut point le vieux parti qui veut s'offrir le vote de la gent féminine. Dans cette opération de «phagocytose», le FLN lorgne aussi du côté des organisations estudiantines ainsi que l'organisation des fils de chouhada. Ainsi éliminé de la nouvelle version de l'Alliance présidentielle, le RND ne soutiendra pas évidemment le candidat du FLN. Les lignes ont donc bougé. Si tel est le cas, ce sera un véritable naufrage politique pour le RND. Le seul salut sera alors une candidature de Ahmed Ouyahia à la présidence de la République. L'ex-patron du RND a l'avantage d'avoir la base du parti qui lui est majoritairement restée fidèle. Mais Ouyahia acceptera-t-il d'aller à la conquête du Palais d'El Mouradia? M. Ouyahia cultive une parfaite discrétion depuis sa démission du poste de secrétaire général du RND, le 3 janvier dernier après avoir dirigé d'une main de fer le parti depuis 1999. Rien ne filtre sur l'avenir politique de l'ex-chef de gouvernement. Il a réapparu en public, en mai dernier, à Oran où il a présenté ses condoléances au président du groupe parlementaire du RND, Miloud Chorfi. «Je me tiens au service de l'Algérie. Je suis un soldat au service du pays», a-t-il dit à des militants de son parti. Une déclaration saisie au vol par les commentateurs de la presse nationale qui ont en fait leurs choux gras. Depuis, c'est la diète pour M. Ouyahia. Il a fallu attendre le mois de septembre dernier pour que des militants, de son parti à Tizi Ouzou réclament son retour, car disent-ils «il est le seul apte à mener notre parti vers de meilleurs horizons». «Ahmed Ouyahia, homme d'Etat est un soldat au service de la patrie», explique ce membre de la direction du RND sous le sceau de l'anonymat. «La plupart des militants souhaitent le retour de Ahmed Ouyahia aux commandes du parti, mais cela, explique-t-il «relève et reste au stade de la sympathie partagée par une bonne partie des militants de base du RND». Entre le FLN et le RND, c'est la guerre. On s'étripe en sourdine. Tel est, aujourd'hui, le sort de deux ennemis complémentaires.