Les dignes fils de l'Algérie profonde et qui ne dépassaient pas la trentaine décidaient de se battre contre une puissance membre de l'Otan «Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer» Guillaume d'Orange Avec de moins en moins d'imagination, la symbolique du 1er Novembre, l'année 2013 n'a pas dérogé au rituel. L'année dernière j'écrivais dans ce même journal: «On se retrouve entre anciens et on laisse aux jeunes le soin de valser au son de «50 ans- 50 chansons», la nouvelle trouvaille qui permet de sacrifier à la cérémonie en faisant le minimum syndical et en divertissant une fois de plus les jeunes dans la plus pire tradition de «Panem et circenses»; c'est-à-dire «du pain et des jeux de cirque» à la plèbe romaine pour amortir les révoltes, voire les différer. One year after le décor est toujours le même, on rameute «la famille révolutionnaire» dont il faudra bien un jour, qu'on nous explique la clé de cooptation. «Ces jeunes, que l'on craint, au lieu de leur indiquer le sens de l'effort, ne connaissent rien de l'histoire de l'Algérie qui, pourtant, ont au fond d'eux-mêmes le «feu sacré» qui fait que nous pourrions faire des Algériens un peuple fasciné par l'avenir. A bien des égards, le combat titanesque de ces jeunes qui ont fait embraser le monde, avec cette flamme de la révolution, à telle enseigne que des thèses étaient soutenues sur la révolution, a cependant été un modèle de lutte pour la dignité humaine pour les peuples colonisés. Souvenons-nous de cet appel du 1er Novembre qui n'a pas perdu un pli. C'est par cet appel qu'une poignée de dignes fils de l'Algérie profonde et qui ne dépassaient pas la trentaine décidaient de se battre contre une puissance membre de l'Otan qui devait déployer plus de 500.000 soldats avec pour tout viatique leur foi en l'inéluctabilité du combat et en la victoire.»(1) Curieusement, au moment où l'Algérie se recueille à la mémoire de ses martyrs, on apprend que l'histoire des moines de Tibhirine est réchauffée: «L'enquête sur la mort des moines de Tibhirine bientôt relancée. Lors d'une réunion avec les familles, mercredi 30 octobre, François Hollande leur a assuré que le juge français Marc Trévidic pourrait se rendre en Algérie, mi-novembre. Les auteurs de ces assassinats n'ont toujours pas été identifiés. Après avoir suivi la thèse islamiste, le juge Marc Trévidic a réorienté l'enquête depuis 2009 vers une possible bavure de l'armée algérienne.»(2) Sans faire dans la concurrence victimaire pourquoi l'Algérie ne demande-telle pas justice pour tous les crimes contre l'humanité - on dit qu'il sont imprescriptibles -commis à son encontre? Cinquante-deux ans après, l'Algérie se souvient encore du tragique évènement qui témoigne encore de la sauvagerie et de la haine de la France qui a transformé les corps de milliers d'hommes et de femmes en corps sans vie et en cadavres flottants sur le fleuve (La Seine). En cette journée mémorable du 17 octobre 1961. Plus de 30.000 Algériens réprimés par des milliers de policiers à Paris. La police, chauffée à blanc par les nombreuses pertes que lui font subir les attentats du FLN, se livre à une répression sanglante, dont le nombre de victimes est estimé entre 80 et 200 morts. Les cadavres seront, pour certains, retrouvés flottants dans la Seine. D'un côté, le pouvoir français absout tous les Aussaresses et les Papon, de l'autre, elle se permet de demander justice pour les siens. Ceci est inadmissible! La Convention du FFS sur l'énergie: une manière de fêter le 1er Novembre Un signe de maturité assurément! Le Front des forces socialistes qui a fêté récemment ses cinquante ans a décidé de marquer la symbolique du 1er Novembre en s'interrogeant sur le futur énergétique du pays. J'ai été invité et je témoigne ici des choses entendues. La Convention nationale du FFS s'est déroulée à Sidi Fredj. Lors de son discours, le premier secrétaire Ahmed Betatache prenant à témoin la symbolique du 1er Novembre, s'est interrogé sur les défis qui attendent l'Algérie. Mohand Amokrane Chérifi, un éminent spécialiste, ancien ministre haut fonctionnaire des Nations unis, après avoir brossé un tableau idyllique, voire nostalgique de l'épopée pétrolière de l'Algérie qui a donné à l'Algérie le meilleur d'elle-même, a pointé du doigt la singularité de l'Algérie. Plusieurs interrogations ont été mises, notamment sur le rythme soutenu, voire le pompage frénétique, faut-il stocker des dollars ou stocker du pétrole? Pourquoi associer les sociétés étrangères à nos réserves plutôt que de les payer? M. Chérifi a ensuite parlé de pause sur le rythme de production, d'optimisation et de diversification. Il a parlé de problèmes de gouvernance et de management. «Tout va bien Mme la marquise» des représentants de l'énergie Pour les représentants du secteur de l'énergie, L'Algérie a des réserves immenses dans le non-conventionnel. Un optimisme béat pour tout continuer à l'identique. Le FFS aura du mal à ´´reconstruire un consensus´´ autour d'une telle position. ´´Les Algériens auront le pétrole encore pour de longues années». ´´Les réserves du pays en hydrocarbures sont suffisantes pour couvrir la consommation nationale d'énergie à long terme´´. Il estime que les capacités de production en Algérie vont augmenter à nouveau, annonçant ainsi un ´´troisième âge´´ pour le secteur pétrolier national. Le peak oil n'est qu'un ´´mythe´´ D'ici les prochaines vingt années, la demande mondiale en énergie doublera. Et elle triplera à l'horizon 2040. Selon lui, toutes les formes d'énergie seront concernées par cette augmentation. ´´Les plus grosses découvertes d'hydrocarbures, nous les avons faites durant les trois dernières années. Nous avons réalisé plus de 80 découvertes dont 70 faites par Sonatrach seule. Dans les prochaines années l'Algérie commencera l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels, affirmant toutefois que les forages de ces hydrocarbures nécessiteront une haute technicité. Timidement enfin, les experts du secteur de l'énergie ont évoqué en vrac un petit catalogue à la Prévert sur l'efficacité énergétique, l'éclairage à basse consommation, la promotion des énergies renouvelables. En suggérant d'augmenter ´´progressivement´´ les prix du litre de gasoil ´´polluant et coûteux´´. Heureusement que le deuxième jour, l'expert en énergie renouvelable a présenté la dimension énergie renouvelable sans pour autant donner les échéances concernant l'installation graduelle de ces énergies. La dernière intervention fut celle de Nordine Aït Laoussine qui fut plus concrète car elle a mis le doigt là ou cela fait mal; la vérité des prix qui obère toute velléité de la maîtrise de l'énergie. La vraie réalité selon la science et le bon sens Pour ma part, j'ai tenu à rappeler que l'Algérien gaspille près d'un quart de l''énergie et qu'il faille avant tout avoir un cap en pensant aux générations futures. On ne peut qu'être dubitatif sur ce genre d'assertions qui sont inexactes. Le peak oil qui est une réalité indéniable est nié. Le signal émis par le secteur de l'énergie est grave, il s'apparente malheureusement à une fuite en avant: «Dormez braves gens, il y a du pétrole pour l'éternité, le gaz de schiste veillera sur vous et si vous voulez bien, changez vos lampes, tout en continuant à consommer d'une façon débridée.» Ce message est dangereux car il remet aux calendes grecques toute remise en ordre du pays, remise en ordre qui passe par le passage de l'ébriété énergétique actuelle à la sobriété énergétique. Balayant d'un revers de la main toute contestation, les experts du secteur de l'énergie s'en remettent à la technologie de l'extérieur pour continuer à pomper d'une façon frénétique et irresponsable une ressource qui appartient aux générations futures. On l'aura compris, pas un mot sur la formation des Algériennes et Algériens devant prendre en charge le destin du pays quand les experts ne seront plus là. La vraie réalité est que la responsabilité concernant le rythme d'exploitation et le modèle énergétique à mettre en oeuvre est de la responsabilité de tous les départements ministériels. Ce modèle constituera une feuille de route qui donnera le «la» à chacun des départements de ce qu'il faut faire. Il doit être expliqué aux citoyens qu'il est dommage de prendre pour des êtres mineurs. Qu'est-ce qu'être algérien au XXIe siècle? Notre indépendance a atteint l'âge de raison. Mais l'Algérie peine toujours à se redéployer dans un environnement mondial de plus en plus hostile. Est-ce parce qu'elle n'abrite pas en son sein les compétences à même de la faire sortir de l'ornière? Est-ce qu'elle n'a pas les ressources qui lui permettraient de financer son développement? Non! Comment alors expliquer cette panne dans l'action qui fait que nous sommes encore à chercher un projet de société et à vivre au quotidien, gaspillant une rente imméritée qui hypothèque lentement, mais sûrement l'avenir de nos enfants, leur laissant, ce faisant, une terre inculte, ouverte à tout vent où rien de «construit» par l'intelligence de l'homme ne lui donnera une singularité. Il nous faut repartir du bon pied en nous attaquant sans les différer aux différents défis. Il nous faut sans plus tarder arriver à savoir ce que nous sommes. Nous sommes en 2012, il y a encore des Algériens qui s'identifient à leurs tribus, leurs régions, leurs quartiers. Il y a ceux qui sont encore arrimés mentalement à une sphère moyen-orientale au nom d'une arabité de la résurrection (El Baâth), il y a ceux qui pensent qu'il faut en revenir au socle rocheux amazigh maghrébin. Il y a enfin ceux qui ne parlent pas de pays mais de oumma. Dans cette errance identitaire, il n'y a pas de place pour l'homme qui se veut être algérien sans appartenir à aucune de ces catégories. C'est dire que le moment est venu pour que l'Algérie fasse son aggiornamento pour enraciner dans le coeur des Algériens «ce désir d'être ensemble et de faire que la nation comme le dit si bien Renan, soit un plébiscite de tous les jours. Qu'on se le dise! L'Algérie n'est pas sortie de l'ornière tant que le peuple n'est pas associé à son destin, l'Algérie sera vulnérable. Il nous faut changer le fusil d'épaule. Nous avons perdu notre indépendance graduellement depuis 50 ans en acceptant de devenir vulnérables, la rente ayant anesthésié toute mise en marche de nos neurones, à telle enseigne que tout est importé, l'Algérie se contente de consommer ce qui ne nous appartient pas. La devise néolibérale: «Ne pensez pas, dépensez!», a trouvé en Algérie une brillante application. Jusqu'à quand? Le combat que nous devons mener dans ce XXIe siècle de tous les dangers est de donner une nouvelle indépendance à l'Algérie. Il faut savoir que 75% de la population est née après l'indépendance. Le glorieux parti du FLN dont la mission historique, disait Mohamed Boudiaf, devait s'arrêter en 1962, a raté l'occasion de se transformer en parti de masse, se contentant de gérer un fonds de commerce sans grande imagination, en convoquant toujours les mêmes clichés: l'ennemi séculaire et les ennemis de la révolution. Il n'a pas su faire sa mue une seconde fois après 1988, s'accrochant toujours à des invariants en termes de monopole, se coupant définitivement de la masse de jeunes. Il en est de même des 60 partis qui émargent au râtelier de la République sans valeur ajoutée si ce n'est que de créer de l'entropie (désordre) Pour un autre 1er Novembre du Web.20 A l'Indépendance, nous étions tout feu, tout flamme et nous tirions notre légitimité internationale de l'aura de la glorieuse Révolution de Novembre. La flamme de la Révolution s'est refroidie en rites sans conviction pour donner l'illusion de la continuité. L'Algérie se cherche, elle n'a pas divorcé d'avec ses démons du régionalisme, du népotisme; elle peine à se déployer, qui prend du retard, qui vit sur une rente immorale car elle n'est pas celle de l'effort, de la sueur, de la créativité? Le pays s'enfonce inexorablement dans une espèce de farniente trompeur tant que le baril couvre notre gabegie. Notre système éducatif est en miettes. Notre université est moribonde, les jeunes diplômés se sauvent du pays; il est curieux de remarquer que l'université n'est jamais sollicitée. A-t-on vu le pouvoir récompenser des jeunes pour leur innovation, leur recherche, des enseignants pour leur sacerdoce? Qu'est-ce qu'être indépendant quand on dépend de l'étranger pour notre nourriture, notre transport, notre habillement, notre vie quotidienne? Est-ce que la Révolution de Novembre devait nécessairement déboucher sur une indépendance factice? Dans un monde de plus en plus dangereux à la fois sur le plan des éléments naturels - notre pas étant vulnérable aux changements climatiques- mais aussi sur le plan de la force brute qui est à la fois économique, financière et militaire que devons-nous faire quand au nom du droit du plus fort, les petits sont espionnés au point de perdre leur libre arbitre. Certes le phénomène des écoutes par la NSA n'est pas nouveau. Pour l'histoire, l'Algérie a négocié en son temps avec brio la libération des otages américains et on raconte que, chargé de rapporter les propositions iraniennes aux Américains, les diplomates algériens constataient que les officiels américains donnaient la réponse avant d'avoir lu le message... Ce qui est nouveau est que le monde est dangereux du fait que les ressources de la Terre sont de plus en plus limitées et que c'est la guerre de tous contre tous, et comme l'écrit si bien Ignacio Ramonet: «L'Empire n'a pas d'alliés il n'a que des vassaux.» Nous devons plus que jamais être vigilants et l'attaque de Tiguentourine devrait plus que jamais nous inciter à être plus vigilants. Il nous faut «moderniser» le 1er Novembre qui doit être décliné avec les outils du XXIe siècle. Une chanson est en train de circuler sur Facebook, intitulée M 22; un groupe de jeunes s'est emparé du message et l'explicite à sa façon, d'une façon ludique et surtout qui arrive à être comprise par les jeunes allergiques à la langue de bois. Elle raconte en rap l'histoire des 22 Algériens qui se sont réunis dans une villa de Clos Salembier et qui ont décidé de la nécessité de la lutte armée du fait que toutes les voies du dialogue prônées par les centralistes menaient à une impasse.(3) Le 1er Novembre de Papa appartient à l'Histoire, par contre l'Esprit de Novembre qui a fait que des jeunes par leur sacrifice suprême ont arraché l'Algérie des griffes du pouvoir colonial est toujours en nous. Nous devons le réanimer chacun de nous en donnant l'exemple de l'abnégation. Pour cela, seul le parler vrai, l'honnêteté et le travail permettront à nos aînés de se reposer enfin, sachant que le flambeau est définitivement entre de bonnes mains. (3) Cette symbolique disparaîtra par lassitude et par la disparition du feu sacré qui animait nos aînés. Pourtant, au vu des multiples défis du pays, nous avons besoin plus que jamais d'un ciment fédérateur qui puisse assurer ce désir de vivre ensemble et d'aller à la conquête du futur. Pour y arriver, une stratégie multidimensionnelle qui n'hypothèque pas l'avenir des jeunes doit être mise en place ici et maintenant. De mon point de vue, le meilleur hommage que l'on pourrait rendre aux martyrs, c'est de mettre en place un système éducatif et une université performant. C'est cela le 1er Novembre du XXIe siècle.Unis et fascinés par l'avenir, avec des guides éclairés, rien ne s'oppose à ce que nous soyons acteurs de notre destin. 1.http://commentjevoislemonde. blogs.nouvelobs.com/archive/2012/11/03 /esprit-de-novembre-en-algerie-les-defis-du-xxie-siecle.html 2.http://www.lacroix.com/Actualite/France/L-enquete-sur-la-mort-des-moines-de-Tibhirine-bientot-relancee-2013-10-31-1053978 3.http://www.letempsdz.com/content/view/65109/180/