Quelles que soient les mésaventures connues, notre presse demeure cet acquis démocratique irréversible. L'idéal de nos moyens de communication tient plus à la finalité recherchée. En effet, depuis octobre 1988, notre presse arrive à se frayer un chemin dans la tourmente des événements pour asseoir la démocratie et ce, après une longue et pénible bataille contre les idées reçues et l'ordre établi. La floraison de nouveaux titres augure d'un nouveau système où le contre-pouvoir est dévolu à cette presse jeune et ambitieuse. Dès leur apparition, les titres annonçaient la couleur et s'affichaient comme «fer de lance» pour une nouvelle société à construire, à bannir le népotisme et surtout permettre de révéler les lacunes dans la gestion des affaires de la cité. Il est évident cependant, que de nombreux écueils ont surgi durant cette métamorphose et ont rendu la tâche ardue. Ainsi, notre presse se retrouve devant un dilemme qu'il fallait transcender. Ce dernier s'articule autour de la réponse à la question: «Nos moyens d'information doivent-ils refléter la réalité quotidienne, telle quelle ou bien, iront-ils vers la spéculation pour dire ce que devra être l'Algérie de demain?» Dans la pratique journalistique aujourd'hui, le rédacteur est réduit à cet «écrivaillon» pour commenter un événement. L'information a été réduite à sa plus simple expression, pour être dans la majeure des cas inexistante. Le commentaire est devenu «la règle de tout écrit» car il est plus aisé d'exprimer son état d'âme et de convaincre le lecteur par sa vision des choses. L'écrit est dans sa grande majorité, plus assimilé à un «jugement» connoté qu'à une «information » dénotée. Là, nos moyens d'information trouvent tout cet espace pour fidéliser un lectorat révolté par tant d'années d'une information «dirigée», «propagandiste» et surtout à «sens unique». Trop néfaste est cette presse homogénéisée et tributaire d'un pouvoir népotique. Le lecteur a vite adopté cette nouvelle vision de la société reflétée, chaque matin par les journaux et accepte sans partage l'écrit du journaliste et ce, à condition qu'il se démarque de «la chose du pouvoir». Loin de ce qu'on appelle «presse professionnelle», l'amenteurisme dans nos rédactions s'est ancré dans les esprits et il est difficile, aujourd'hui, de s'en départir. Souvent, l'écrit du journaliste exprime cet idéal de l'Algérie de demain. Cette vision lointaine s'inscrit dans la lecture du discours politique du pouvoir, qui s'engage dans les programmes à réaliser dans tous les domaines, sans pour autant procéder à l'autocritique. Le rédacteur, confronté à un manque d'informations justes est contraint à une «spéculation» sans retenue et devient «donneur de leçons», rôle qu'il remplit à merveille. Ici, nos moyens d'information jouent la fonction de «tuteur». Notre presse est devenue un moyen d'agitation, d'éducation et de propagande. Pourtant, ces étapes doivent s'adapter à l'évolution de la société car elles répondent à des conjonctures bien réparties dans le temps et l'espace. En effet, notre presse s'est enfermée dans cette nébuleuse contradictoire qu'il est très difficile de franchir. Nos journaux, en tant qu'entités culturelles et informationnelles ont beaucoup favorisé le débat d'idées. Ils traduisent mieux ce souci de révolte des masses que la politique du pouvoir, jugée trop prudente et moins audacieuse. Les libertés individuelles trouvent toute latitude dans les écrits de presse et les droits du citoyen sont défendus par ce journaliste «indésirable» par le pouvoir mais «chuchoté» par ce lecteur anonyme.