Les Occidentaux comprennent les relations entre nations, non pas du point de vue du dialogue et de la consultation - afin de trouver des solutions consensuelles de sortie de crise et autres conflits de notre temps - mais sous le seul angle des rapports de force. Perpétuant de la sorte, le concept de «blocs idéologiques» qui a tant desservi la paix au XXe siècle. Ainsi, ces dernières années, et d'une manière systématique, l'Occident a tenté d'imposer aux autres nations sa lecture et vision spécifique des événements. Il se servit, pour ce faire, de la menace de sanctions qu'il brandit, invariablement, à chaque crise comme la panacée première et ultime. Cela a été constaté dans nombre de cas, singulièrement dans les affaires du nucléaire iranien, et dans le conflit syrien où l'Occident a d'abord, châtié sans essayer de voir s'il n'y aurait pas d'autres issues que la sanction. Ce que montre de façon saisissante la crise ukrainienne, aggravée par la menace de sécession de la presqu'île de Crimée. La situation est d'autant plus complexe que l'Occident n'a pas été pour peu dans l'ampleur prise par la crise. L'ingérence occidentale en Ukraine - plusieurs ministres européens et le chef de la diplomatie américaine se sont succédé sur le Maidan à Kiev, où les opposants au président Ianoukovitch se sont retranchés - est évidente qui, loin de calmer le jeu, a incité les opposants ukrainiens - dont nombreux étaient des extrémistes - à l'irrédentisme. L'Ukraine est une mosaïque de nationalités, parmi lesquelles celle des russophones est dominante dans l'est du pays et en Crimée. Ne tenant pas compte de ce paramètre et de ce que veulent les populations ukrainiennes, l'Occident a vite fait de réduire le conflit à une opposition entre l'Ukraine et la Russie. Ce qui est court et, à tout le moins, inexact dès lors que le conflit couvait en fait depuis la fameuse «Révolution orange» fomentée et préparée par l'agence de renseignement américaine, CIA, avec la prise de pouvoir à Kiev des pro-Occident. Le vent a toutefois tourné avec l'arrivée aux affaires des pro-Russie. C'est là un fait d'histoire. Pour dire que l'instabilité de l'Ukraine dure depuis une décennie. Les troubles dans ce pays ont commencé quand le président Viktor Ianoukovitch a refusé de signer l'accord de coopération avec l'Union européenne pour se rapprocher de la Russie. C'est ce qui a donné le coup d'envoi aux manifestations pro-européennes. Toutefois, l'accord trouvé entre Ianoukovitch et les opposants a été détruit par ces derniers qui ont fait destituer le président ukrainien, ouvrant ainsi la voie à tous les dérapages dont le plus grave reste le risque de partition de l'Ukraine avec le détachement de ce pays de la presqu'île de Crimée. Cette éventualité a été condamnée par l'Occident - les Occidentaux estimant même «illégal» le référendum prévu dimanche en Crimée - oublieux cependant que ce sont les Européens et les Américains qui ont ouvert la voie à la balkanisation de l'Europe par la reconnaissance hâtive de la scission de la province du Kosovo avec la Serbie. Néanmoins, après avoir joué au pyromane, l'Occident accuse la Russie des maux dont l'Ukraine est porteuse, envisageant même un chapelet de sanctions contre Moscou. C'est ainsi que le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, qui ne semble avoir d'autres idées que de menacer de sanctions ceux qui ne se soumettent pas aux oukases des puissants - parmi lesquels évidemment la France se compte - tente par ce biais, de faire reprendre à son pays une grandeur, hélas, à jamais perdue. Le ministre français affirma, mardi dernier, que de nouvelles sanctions, peuvent être «dès cette semaine», prises contre la Russie si elle «ne répond pas» aux propositions occidentales de «désescalade» en Ukraine. Les Etats-Unis ont, pour leur part, déjà décidé de «suspendre tous les liens militaires» entre les deux pays, comme de restreindre les visas et la possibilité de «gel des avoirs» des Russes. Les sanctions? Leurs effets sont connus et en général nuls (cf; les cas de Cuba et de l'Iran en font foi) mais en prenant ces décisions arbitraires, les puissances occidentales, outre d'abuser de leurs prérogatives neutralisent de fait l'ONU à laquelle revient normalement et de droit, l'initiative de sanctionner ses pays membres. La «trique» ne pourra jamais remplacer une politique internationale basée sur le partenariat, le respect des autres et les solutions consensuelles. La politique du «big stick» du temps de Théodore Roosevelt ne peut plus avoir cours au XXIe siècle. C'est pourtant le choix fait par un Occident qui use plus de la force que de la raison.