Le monde audiovisuel arabe est en train de bouger, alors que qu'Al Jazeera est en chute libre, le groupe MBC vient de prendre une décision grave et totalement ubuesque: fermer l'ensemble de ses 80 bureaux du groupe dans le Monde arabe. Cette décision a été prise, suite à une note royale de Riyadh de stopper tout reportage politique dans le Monde arabe et de «saoudianiser» toute la chaîne. En effet, la chaîne a mis un terme au contrat de plusieurs journalistes arabes non saoudiens. C'est le cas notamment, pour les journalistes algériens comme Hassan Zitouni qui travaillait avec MBC depuis son lancement à Londres il y a 23 ans. Le groupe a mis fin également à sa collaboration avec l'ex-speakrine algérienne à l'Entv et présentatrice vedette depuis sur MBC, Hafida Benzaïm, qui travaillait sur cette chaîne depuis 20 ans. Cette «épuration» journalistique ne touche pas que les Algériens, elle touche également les Libanais, les Syriens et même les Marocains et Tunisiens qui travaillent en permanence ou en free lance sur les bureaux de MBC à l'étranger. Même le correspondant de MBC à Los Angeles, le Libanais Rafi Brosiane, qui alimentait la chaîne en info croustillantes sur Hollywood a été remercié. A Alger, le bureau tenu par Rafik Bekhouche ne s'occupera plus de politique, mais servira seulement à alimenter l'émission de foot célèbre Sada El Malaib, du Syrien El Agha, en raison de la participation de l'Algérie en Coupe du monde. Ce changement intervient dans un contexte politique très dur en Arabie Saoudite, et fait face à une sérieuse menace sur sa stabilité politique. Les récents clashs avec le Qatar étaient justement pour faire pression sur ce petit émirat afin de cesser ses sujets sur la révolution arabe et principalement sur l'Arabie Saoudite et le Koweit. Mais voilà que l'Arabie Saoudite, principal financier du groupe audiovisuel arabe puissant, a pris ses dispositions. Déjà dès le déclenchement de la révolution arabe en 2011 en Tunisie et en Egypte, l'Arabie Saoudite avait pris ses devants en changeant la tête du groupe. Elle a installé le Libanais Ali Jaber qui a plus de 20 ans d'expérience dans les médias à la place de Tim Riordan qui avait rejoint MBC en 1998. C'est notamment lui qui a lancé le développement des télévisions du groupe en langue occidentale. Il est resté conseiller spécial du président et du conseil d'administration. Ali Jaber avait commencé sa carrière au Liban en tant que correspondant de guerre pour le New York Times, le Times et l'agence allemande de presse. Il a joué un rôle prépondérant dans la création de la chaîne Future TV en 1992. Une décennie plus tard, il est appelé aux Emirats arabes unis en tant que consultant médias dans la restructuration du réseau de télévisions d'Etat Dubai Media Incorporated (DMI). Ces dernières années, il occupait le poste de consultant média pour le bureau exécutif de cheikh Maktoum (émir de Dubaï, Premier ministre et vice-président des Emirats arabes unis), ainsi que celui de directeur éditorial à DMI. Il fait également partie du jury de l'émission de téléréalité Arabs Got Talent, il est le doyen de l'université de journalisme à l'Université américaine de Dubaï et trouve le temps aussi de rédiger une thèse de doctorat (PhD) à Cambridge, sur l'histoire des télévisions satellite arabes entre 1990 et 2010. MBC Group a vu le jour à Londres en 1991 avant de déménager son siège social à Dubaï en 2002. Elle est majoritairement détenue par des investisseurs saoudiens. Selon le quotidien d'Abou Dhabi The National, elle accapare la moitié des revenus publicitaires de la région, estimés à plus d'un milliard de dollars. [email protected]