Il était venu à Cannes avec «Alexandrie...New York» pour dire, à travers sa propre histoire (qui commence avec ses premiers pas d'étudiant dans le cinéma, en Californie, jusqu'à ce jour, soit un demi-siècle de passion) pour dire aux Américains, «combien je vous ai aimés ». Et de ce point de vue, il n'est pas le seul! Qui n'a pas aimé - pour peu qu'il en ait su l'existence - Gene Kelly, Fred Aster, Rita Haythworth, Ginger Rogers? Ou même la Beat Génération celle de Kerouec, Burrough etc... Soit, mais prendre la peine, à 78 ans, de vouloir revendiquer une filiation que beaucoup d'Américains ignorent, élevés qu'ils sont, à la Stallone et autres Shwrazie... Une Amérique qui défend les peuples au nom de son droit, qu'elle estime légitime, de disposer de leurs puits de pétrole! C'est un peu décalé. Et le malaise était perceptible à Cannes, en plus d'une certaine déception dans l'air. Chahine a promis de revenir à Hamlet, dans son prochain film. L'occasion pour lui de nous parler de ce qu'il y a «de pourri dans le royaume du Danemark» pour reprendre Shakespeare. Un «Danemark» qui peut être fluctuant au gré des origines. Chahine reviendra-t-il à l'Egypte? Lui seul peut dire ce qui a pourri cette société millénaire et référentielle au point de ne lui laisser que la pensée fanatique et radicale comme seul exutoire, réduisant peu à peu l'espace de la réflexion qui avait fait, jusque dans les années soixante, un incontournable repère pour le monde arabe. Où est le nouveau Taha Hussein, le nouvel Abdul Qaddus? Chahine a peut-être son idée là-dessus, car... Jo c'est aussi l'Egypte. Pour pasticher un titre que les cinéphiles ont encore en mémoire... En attendant, Walter Salles a postulé, et sérieusement, pour une grande consécration avec son émouvant «Carnets de voyage» inspiré d'un périple latino-américain du futur Che Guevara et de son ami Gael Garcia Bernal. Une oeuvre qui a touché plus d'un à Cannes. L'émotion était à son comble lorsque l'octogénaire Bernal, fondateur à Cuba de l´école de médecine, a gravi les marches, en smoking. La légende et la fiction ont effectué un des plus beaux fondu-enchaîné. «Innocence», un manga japonais, dans cette squelettique sélection, est, lui aussi, promis aux plus hautes distinctions. Les paris sont ouverts...