Abdelhak Lamiri, expert économiste Le développement de la ressource humaine est la colonne vertébrale de la création d'une économie productive. L'économie productive en Algérie peine à décoller. De nombreux plans d'action ont été établis pour développer l'économie du pays mais en vain. La raison? Pour l'expert économiste, Abdelhak Lamiri, 90% du problème de développement économique est dû à la vision politique ainsi que la forte présence des lobbies de l'importation. «Tous les spécialistes du développement sont arrivés à conclure que le problème du développement économique est un problème politique», a déclaré hier M.Lamiri, sur les ondes de la Radio nationale de la Chaîne III. Le spécialiste a jugé que «les politiques ne créent pas l'environnement qu'il faut et ne donnent pas l'opportunité aux techniciens pour développer l'économie du pays». L'autre bête noire qui freine le lancement de l'économie en Algérie est celui des lobbies de l'importation. «La présence des lobbies qui polluent les décisions économiques et le politique qui est incapable d'y faire face, contribuent à l'arrêt de tout processus de développement économique pour aller dans le sens d'une croissance et l'émergence de l'économie», a précisé M. Lamiri. Pour l'hôte de la Chaîne III, «il faut un signal politique fort pour orienter ces importateurs vers la production». Il a suggéré aux autorités d'orienter, à titre d'exemple, «80% des crédits vers la croissance économique et donc la création d'entreprises. C'est à ce moment-là que ces importateurs deviendront des producteurs». A l'occasion de l'élaboration du prochain plan quinquennal 2015-2019, M. Lamiri a proposé deux recommandations complètement différentes des plans passés pour créer une véritable économie productive indépendante des hydrocarbures. La première orientation consiste, selon M.Lamiri, à soumettre le prochain programme quinquennal au dialogue et à la concertation générale entre les parties prenantes, à savoir les acteurs économiques, au patronat, les ONG, les universités et les centres de recherche. Pour ce qui est de la deuxième recommandation, il s'agit «d'apprendre des erreurs et ne plus les refaire». Les erreurs diagnostiquées par l'économiste sont celles d'avoir «mis en chantier des projets grandioses sans préparer les ressources humaines, ni les entreprises ni les administrations. On a tout fait à l'envers», a-t-il déploré. Il a indiqué que toutes les entreprises sont «sous-gérées», mis à part quelques-unes, «qui se comptent sur les doigts d'une seule main». Il a estimé qu'au lieu d'inonder les entreprises «inefficaces», il a suggéré de débourser l'argent plutôt pour le développement des ressources humaines ainsi que le management des entreprises et des administrations. Une fois que celles-ci deviennent efficaces, M. Lamiri a indiqué que «c'est à ce moment-là que les autorités leur procurent de l'argent». L'invité de la Chaîne III, a porté énormément d'intérêt pour le développement de la ressource humaine et sa qualification au niveau international. Il a estimé qu' «il y a un écart important entre les qualifications de nos ressources humaines comparées à celles au niveau international». Evoquant d'autres ingrédients manquants en Algérie pour que l'industrie fleurisse, il s'agit d'établir «l'économie de la connaissance et l'industrie du savoir». «Il faut créer des passerelles entre l'entreprise et l'université en impulsant les activités de recherche de développement» a-t-il encore préconisé. Dans l'ordre de lancement des réformes, M. Lamiri a insisté sur le problème de centralisation. Dans ce cadre, il a indiqué qu' «on est l'un des pays les plus centralisés au monde. L'Etat central veut régler tous les problèmes, alors que c'est une chose complètement impossible». La vision de M. Lamiri sur le prochain plan d'action doit s'articuler sur une vision stratégique à long terme avec «la décentralisation de l'économie du pays, en donnant aux régions et communes de se développer et mener leur propre plan de croissance». Une méthode, selon M.Lamiri qui a été bénéfique pour la Chine, alors pourquoi pas nous. «On forme des personnes au niveau des communes et wilayas, on modernise le management, on donne des ressources pour développer leurs propres communes et régions. Si l'expérience donne un résultat satisfaisant, les autorités pourront étendre l'expérience sur le reste des wilayas du pays», a-t-il conclu.