Le Sunday Times se serait procuré des dizaines de documents considérés comme «secrets», qui permettent de penser que Mohammed Bin Hammam, ex-membre exécutif de la FIFA, a effectué un lobbying très agressif auprès de certains membres de la FIFA pour que le Qatar bénéficie d'une sorte d'élan. Dix-huit mois après les premières révélations du magazine France Football, quelques semaines après l'aveu d'une «erreur» par Sepp Blatter, le quotidien britannique The Sunday Times publie hier ce qui pourrait être des preuves que, par l'entremise de Mohammed Bin Hammam, la désignation du Qatar pour accueillir la Coupe du monde 2022 a été influencée. Le 3 décembre 2010, peu après avoir confié l'organisation de la Coupe du monde 2018 à la Russie, la FIFA annonce que le Qatar organisera l'événement en 2022. Et ce malgré des facteurs contraires tels que des conditions climatiques intenables en raison de la chaleur durant la période traditionnelle d'organisation de la Coupe du monde, entre juin et juillet. Cette désignation est venue quelques mois après l'exclusion à vie de la FIFA de Mohammed Bin Hammam, ancien président de la Confédération asiatique de football et vice-président de la FIFA, pour avoir tenté d'acheter des voix dans le but de déloger Sepp Blatter de la présidence de la Fédération. En janvier 2013, les premiers soupçons sérieux autour de la désignation du Qatar pour organiser la Coupe du monde 2022 sont apparus après la publication par le magazine France Football d'un dossier où certaines malversations ont été révélées et ont jeté le trouble sur la FIFA et sur le Qatar. Dans ce dossier, Guido Tognoni, un ancien membre de la Fédération, parlait de «petite mafia» pour décrire l'organisation de la Coupe du monde 2022 au Qatar. Face à ces accusations, la FIFA avait décidé de faire l'autruche et de ne pas remettre en question la désignation du Qatar face au manque de preuves objectives et aux dénégations des organisateurs qataris. Des preuves émergent Mais ce dimanche, le quotidien britannique The Sunday Times relance la polémique et les interrogations autour de cette désignation en publiant ce qui pourrait constituer des preuves directes de malversations venues du Qatar dans le but d'obtenir l'organisation de la Coupe du monde 2022. Le Sunday Times se serait procuré des dizaines de documents considérés comme «secrets», des mails, des lettres mais aussi des traces de transferts bancaires qui permettent de penser que Mohammed Bin Hammam a effectué un lobbying très agressif auprès de certains membres de la FIFA pour que le Qatar bénéficie d'une sorte d'élan de sympathie auprès des membres africains du Comité exécutif de la Fédération internationale, chargé de désigner le pays organisateur. Pour diluer les soupçons, la stratégie mise en place par Mohammed Bin Hammam avait pour but d'influencer leur vote sans intervenir directement auprès de ces derniers. Pour cela, près de cinq millions de dollars auraient été dépensés par ce dernier pour obtenir cet élan de sympathie. Il aurait dépensé 300.000 euros en faveur de l'ancien représentant de l'Océanie, Reynald Temari, pour couvrir des frais de justice. Il aurait versé près de 1,2 million d'euros à l'ancien vice-président de la FIFA Jack Warner, dont 330.000 euros dans la période précédant le vote. Au total, il y aurait eu une douzaine de paiements qui auraient indirectement permis au Qatar d'obtenir l'organisation de la Coupe du monde 2022. Réaction de la FIFA attendue Suite à ces allégations, la BBC a contacté l'entourage de Mohammed Bin Hammam, mais sans aucune réponse donnée, ce qui ne semble pas surprenant tant les accusations sont lourdes. De plus, le Qatar et le comité d'organisation du Mondial 2022 continuent à assurer qu'ils n'ont joué aucun rôle dans les malversations supposées révélées par le Sunday Times. Néanmoins, cela relance une nouvelle fois la polémique surtout depuis que le président de la FIFA Sepp Blatter, au micro de la chaîne suisse RTS, a déclaré que l'attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar était, de ses propres mots, «une erreur» liée à «une volonté politique, aussi bien en France qu'en Allemagne». Face à cela, quelle sera l'attitude de la Fédération internationale? Va-t-elle remettre en cause l'attribution de cette Coupe du monde 2022 au Qatar et faire repartir de zéro le processus de désignation? Ou bien va-t-elle à nouveau faire la sourde oreille face à ces accusations et continuer à soutenir cette décision malgré tout, des soupçons de malversations aux soucis de calendrier que son organisation en hiver va poser? Une réunion devait avoir lieu ce lundi, à Oman entre Michael Garcia, chargé par la FIFA d'enquêter de manière impartiale sur les conditions de l'attribution de la Coupe du monde 2022, et des responsables du Comité d'organisation de ce Mondial. Mais, à la lumière de ce qui a été publié par le Sunday Times, cette réunion a été annulée, signe que les choses pourraient bouger assez rapidement.