Au moment où l'on compte les morts à Bagdad, à l'ONU, les points de vue se sont rapprochés. Incontestablement, l'Irak continue à faire la une de l'actualité et ce n'est pas la vingtaine de morts enregistrée, entre samedi et hier - quand confrontations et explosions de voitures piégées laissent, chaque jour, leur lot de morts - qui rassure sur une situation plus que jamais explosive. C'est celle-là l'Irak post-occupation et le retour au calme à Najaf et Kouffa, ces derniers jours, n'a pas empêché le feu de se déclarer ailleurs, dans d'autres parties du pays. Aussi, il est évident, singulièrement pour les nouvelles autorités irakiennes, que les jours à venir seront plutôt difficiles. De fait, le cabinet provisoire s'est lancé dans une vaste campagne mettant en garde la communauté internationale contre un abandon prématuré de leurs responsabilités envers l'Irak, notamment en matière de sécurité. En effet, après le ministre des Affaires étrangères, Hoshayr Zebari, qui a plaidé jeudi à l'ONU pour un maintien des forces étrangères jusqu'à ce que l'Irak soit en mesure de prendre en charge, par ses propres moyens, la sécurité de ses citoyens, c'était au tour, hier, du Premier ministre désigné du gouvernement intérimaire, Iyad Allaoui, de revenir à la charge en se faisant l'avocat de la présence provisoire de troupes étrangères, dans les conditions qui sont celles de l'Irak aujourd'hui. Ainsi, affirme-t-il, dans une déclaration à la BBC Télévision, à propos de la sécurité de l'Irak, en rapport avec les forces de la coalition, et la position que prendrait son gouvernement au lendemain du 30 juin. «Nous ne voulons pas utiliser le mot de veto, nous préférons la notion de coopération complète», dira-t-il, précisant que cette «coopération» devrait jouer «dans des situations où la coalition serait en situation offensive ou défensive». Cependant, le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, écarte toute négociation avec le gouvernement irakien indiquant: «En fin de compte, toutefois, s'il s'avère que les forces américaines se protègent ou qu'elles sont en train d'accomplir leur mission d'une manière qui ne soit pas totalement conforme avec ce que le gouvernement intérimaire irakien pourrait vouloir à un moment donné, les forces américaines resteront sous commandement américain et feront tout ce qui est nécessaire pour se protéger elles-mêmes». De fait, M.Powell prévoit que de nouvelles discussions s'ouvriront d'ici un an avec les autorités irakiennes, ce qui laisse entendre, à tout le moins, que les forces de la coalition seront encore en Irak au moins jusqu'au mois de juillet 2005. C'est là le dilemme qu'il sera sans doute très difficile de dépasser car il va y avoir en Irak deux souverainetés qui cohabitent, celle de l'Etat irakien, qui a besoin, dans la situation actuelle, de l'aide internationale, et celle du commandement militaire des forces d'occupation de la coalition, une situation où c'est encore l'Etat irakien qui doit faire profil bas. Aussi, ne voulant pas s'engager sur une date de retrait des forces étrangères, Iyad Allaoui indique toutefois: «Les forces multinationales restent encore quelque temps, jusqu'à ce que l'Irak soit capable de gérer, seul, les questions de sécurité»; insistant: «Cela dépendra de la manière dont nous réussirons à former nos forces de sécurité et notre armée, et nous espérons que nous atteindrons cet objectif aussi rapidement que possible». C'est dans ce contexte de discussion autour du retrait des forces étrangères, après le 30 juin, que le Conseil de sécurité devait se réunir hier en soirée pour examiner à nouveau le projet de résolution amendé, déposé par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Sur ce volet, des progrès ont été réalisés et les positions des principaux membres (permanents) du Conseil de sécurité semblent s'être rapprochées notamment sur la question du statut futur des forces de la coalition établies en Irak. En réalité, les réserves exprimées tant par la France que par la Russie, notamment, sont quelque peu battues en brèche par les positions prises par le gouvernement intérimaire qui a apporté son soutien au projet américano-britannique, après les déclarations faites, ces derniers jours, par le chef de la diplomatie du gouvernement intérimaire, Hoshayr Zebari, particulièrement devant le Conseil de sécurité. De fait, les Américains, comme l'a exprimé le président Bush, samedi à Rome, sont très confiants et s'attendent à l'adoption de leur projet de résolution comme le déclarait hier l'ambassadeur américain auprès de l'ONU, John Negroponte, qui indiquait: «Nous sommes dans la dernière ligne droite et nous nous attendons à un vote, bientôt».