Le dernier round des négociations nucléaires à Vienne a commencé tambour battant, hier, l'Iran opposant ses «lignes rouges» aux grandes puissances qui le pressent de «ne pas gâcher une chance historique». La République islamique «n'a rien à cacher» de son programme atomique, «mais nous ne braderons pas nos avancées technologiques», a averti dans Le Monde le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammed Javad Zarif. Après des mois de dialogue intense, il reste une quinzaine de jours aux deux parties pour trouver un accord garantissant que Téhéran n'aura pas l'arme atomique, en échange d'une levée des sanctions internationales contre son économie. Les délégations devaient arriver hier dans la capitale autrichienne. La tribune de M.Zarif dans le quotidien français a pour titre «Occidentaux, ne manquez pas l'occasion de négocier». Le ministre y convoque l'historique de ce dossier qui empoisonne depuis dix ans les relations internationales. Il rappelle également en détail les efforts consentis par l'Iran pour faire la transparence sur ses activités, et plaide à nouveau que son pays, pour des raisons «morales», «religieuses» et «stratégiques», ne veut pas la bombe. Il tente enfin de démontrer que les sanctions infligées à l'Iran n'ont pas empêché la poursuite d'un programme nucléaire civil, et met en garde les grandes puissances contre «l'illusion» que l'Iran pourrait renoncer à celui-ci. Les limites du débat sont ainsi fermement rappelées, avant même que les négociateurs de l'Iran et du 5+1 (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Russie) n'entament, en principe ce matin, leur marathon final. Les grandes puissances ont répliqué aux «lignes rouges» iraniennes -selon l'expression du vice-ministre des Affaires étrangères Majid Takht-Ravanchi- en désignant le calendrier. L'accord de novembre 2013, qui a relancé la discussion nucléaire, prévoit que celle-ci s'achève au 20 juillet. Il réserve aussi la possibilité, d'un commun accord, d'une prolongation du dialogue pour six mois. «Le temps est compté», a souligné mardi le secrétaire d'Etat américain John Kerry, et «les Etats-Unis et leurs partenaires n'accepteront aucune prolongation si c'est pour faire traîner les négociations en longueur». Le rendez-vous de Vienne offre «n choix aux dirigeants de l'Iran» a-t-il insisté dans le Washington Post: «Ils peuvent accepter les mesures nécessaires» pour rassurer le monde sur leurs intentions, ou bien «ils peuvent gâcher une chance historique de mettre fin à l'isolement économique et diplomatique de l'Iran, et d'améliorer la vie de leur population». La capacité d'enrichissement d'uranium que conserverait l'Iran après un accord est l'un des principaux points de divergence. Concrètement, les Occidentaux ont en tête un nombre maximal de centrifugeuses. Dans une entorse remarquée au secret qui entoure le détail des négociations, le ministre français Laurent Fabius a ainsi jugé acceptable que Téhéran conserve «quelques centaines»» de ces machines qui réalisent l'enrichissement. L'Iran en possède environ 20.000 aujourd'hui, dont la moitié sont opérationnelles, selon le décompte de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), l'organe spécialisé de l'ONU. L'Iran a confirmé, de son côté, être prêt à modifier les plans de son réacteur à eau lourde en construction à Arak, près de Téhéran, en vue de garantir qu'il ne pourra pas produire de plutonium - l'autre combustible possible d'une bombe nucléaire, au côté de l'uranium hautement enrichi. Téhéran refuse enfin de discuter de son programme de missiles -les vecteurs possibles d'une bombe-, en arguant que cette capacité balistique est une question de défense nationale et non de politique nucléaire.