Un sommet régional se tenait hier à Conakry en présence des chefs d'Etat de Guinée, Liberia, Sierra Leone et Côte d'Ivoire, consacré à l'épidémie d'Ebola qui a fait plus de 700 morts en Afrique de l'Ouest. La Sierra Leone et le Liberia ont adopté de strictes mesures pour lutter contre cette épidémie de fièvre hémorragique, d'une ampleur sans précédent, un effort soutenu par un plan de l'OMS d'un montant de 100 millions de dollars. La directrice de l'Organisation mondiale de la Santé, Margaret Chan, participera au sommet de Conakry pour lancer avec les participants ce plan contre Ebola. Le Dr Chan a justifié cette «augmentation des ressources» par «l'ampleur de l'épidémie», qui au 27 juillet totalisait plus de 1.300 cas, dont 729 mortels, (339 en Guinée, 233 en Sierra Leone et 156 au Liberia), selon le dernier bilan de l'OMS publié jeudi. Elle a ajouté que ce plan de 100 millions de dollars (75 millions d'euros) visait à déployer «plusieurs centaines» de travailleurs humanitaires supplémentaires pour renforcer les quelques centaines déjà sur le terrain, dont 120 employés de l'OMS. Le directeur des Centres fédéraux de contrôle et de prévention des maladies (CDC) américains, le Dr Tom Frieden, a annoncé jeudi l'envoi de «50 experts en plus dans la région au cours des 30 prochains jours», estimant qu'il faudrait au mieux de trois à six mois pour enrayer l'épidémie. Devant l'aggravation de la situation, des mesures de précautions se multiplient en Afrique et ailleurs dans le monde. Les présidents sierra-léonais Ernest Bai Koroma et libérienne Ellen Johnson Sirleaf ont préféré renoncer à se rendre au sommet Afrique/Etats-Unis la semaine prochaine à Washington et annoncé de nouvelles mesures radicales. Evoquant un «défi exceptionnel», M.Koroma a décrété jeudi «l'état d'urgence pour nous permettre de prendre des mesures plus fermes», sur une période de 60 à 90 jours, éventuellement reconductible. Il a énuméré une batterie de dispositions, dont le placement en quarantaine des foyers d'Ebola, l'escorte des travailleurs sanitaires par les forces de sécurité et des perquisitions pour repérer les malades présumés. Peu auparavant, son homologue libérienne avait ordonné la fermeture de «toutes les écoles» ainsi que de «tous les marchés dans les zones frontalières». Mme Sirleaf a aussi annoncé la mise en quarantaine de certaines localités, «dont l'accès serait limité aux personnels des services de santé». Le chef de l'Etat sierra-léonais a également suspendu toutes les réunions publiques, sauf celles consacrées à l'épidémie et renvoyé le Parlement. De la même manière, au Liberia, la présidente a mis «tout le personnel non essentiel» du secteur public «en congé obligatoire de 30 jours» et décidé que vendredi (hier) serait «chômé pour permettre la désinfection des bâtiments publics». Les autorités américaines et allemandes ont recommandé de leur côté jeudi à leurs ressortissants d'éviter de se rendre dans les trois pays frappés. La France y a ajouté le Nigeria, qui a enregistré un premier mort d'Ebola la semaine dernière, un Libérien arrivé en avion via Lomé et Accra. Lagos a d'ailleurs annoncé jeudi avoir placé deux personnes en quarantaine car elles avaient été en contact étroit avec la victime et 69 autres sont sous surveillance médicale. Des pays d'Afrique centrale et orientale ont eux aussi pris des précautions. Le Kenya et l'Ethiopie, qui abritent deux des plus importantes plates-formes aéroportuaires d'Afrique, ont affirmé avoir renforcé leur dispositif. Le médecin belge Peter Piot, co-découvreur du virus Ebola en 1976 au Zaïre, l'actuelle République démocratique du Congo, a imputé les difficultés à juguler l'épidémie au fait que la Sierra Leone et le Liberia «sortent de décennies de guerre civile». Le virus, contre lequel il n'existe pas de vaccin, provoque hémorragies, vomissements et diarrhées. Son taux de mortalité varie de 25 à 90%.