Mal nantis et non protégés, les magistrats demeurent une proie facile à la corruption et certains cèdent aux pressions du prince. La chambre basse dépoussière un dossier épineux en souffrance, dans les tiroirs, depuis 6 ans. Les deux projets de loi sur le statut de la magistrature et celui de la composante du Conseil supérieur de la magistrature, seront présentés demain en séance plénière. Le projet de loi comprend essentiellement trois volets : la consécration de l'indépendance de la justice, la réglementation de la profession de magistrat et enfin, sa promotion. Un premier test pour le président de l'APN, Ammar Saïdani, fraîchement élu au perchoir. Beaucoup d'encre a coulé sur l'indépendance de la justice algérienne. Les responsables du secteur reconnaissent que les conditions sociales et professionnelles des magistrats sont loin de consacrer le principe de cette indépendance. Mal nantis, ils demeurent des proies faciles à la corruption. Non protégés, certains cèdent aux pressions. M.Tayeb Belaïz, ministre de la Justice, garde des Sceaux, a affirmé, devant la commission des affaires juridiques à l'APN, que «ce projet de loi vise la protection du magistrat, la consécration de l'indépendance de la justice et sa promotion». Le ministre a insisté sur «le droit du magistrat à la stabilité, à la protection contre la diffamation, l'injure et les menaces, à un salaire qui lui permet de vivre dignement, à un logement de fonction et à une retraite convenable». De son côté, le gouvernement s'est engagé à augmenter les salaires des magistrats et à leur accorder des logements. Le volet formation n'est pas en reste. M.Ouyahia a affiché sa volonté de doter le secteur de 1500 nouveaux magistrats qui viendront s'ajouter aux quelque 3000 qui exercent actuellement. La réouverture de ce dossier intervient au moment où le ministère de la Justice organise, à partir de lundi, 4 séminaires régionaux regroupant magistrats et auxiliaires de justice pour évaluer la mise en oeuvre du programme de réforme du secteur. Le chemin parcouru par ces deux projets de loi a été long. En 1998, sept articles du statut des magistrats ont été rejetés par les membres du conseil de la nation après leur adoption par les députés de l'APN. Les réserves du sénat avaient porté notamment sur les obligations et droits des magistrats, les règles d'organisation du conseil supérieur de la magistrature, ses actions et prérogatives, la rémunération des magistrats, les conditions au concours d'accès au corps des magistrats et la constitution du conseil supérieur de la magistrature présidé par le président de la République. Le 17 octobre 2002, le Conseil de la nation avait adopté le dernier rapport de la commission paritaire (APN-sénat). Le 24 octobre de la même année, le président de la République, M.Bouteflika, a saisi le Conseil constitutionnel. Ce dernier déclare «non conforme à la Constitution», la loi organique relative au statut de la magistrature, en novembre 2002. Depuis, ces articles sont restés en souffrance entre les deux chambres du parlement, avec pour conséquence le blocage du statut des magistrats.