Les Etats-Unis, qui se sont retirés d'Irak il y a près de trois ans, ont mené leurs premières frappes vendredi, pour enrayer l'avancée des djihadistes de l'Etat islamique (EI) qui menacent le Kurdistan. Les Etats-Unis ont lancé de nouvelles frappes contre les positions djihadistes dans le nord de l'Irak, où le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a appelé hier à l'unité pour «mener la bataille contre le terrorisme». Les insurgés sunnites menés par l'EI étaient jusqu'à présent restés à distance du Kurdistan, mais depuis fin juillet les jihadistes ont progressé en direction de la province, occupant des positions à une quarantaine de kilomètres de sa capitale Erbil, sans cependant franchir les frontières de la région autonome. Leur progression a jeté sur les routes des dizaines de milliers de personnes, en particulier des chrétiens et de nombreux membres de la minorité kurdophone des Yazidis, bloqués sur les monts Sinjar sous une chaleur étouffante avec peu d'eau et de nourriture. Les forces américaines «ont (mené) avec succès quatre frappes aériennes pour défendre les civils yazidis cibles d'attaques aveugles» près de Sinjar, a indiqué l'armée américaine tard samedi. Parallèlement, les Etats-Unis ont largué dimanche matin de nouvelles cargaisons de vivres - l'équivalent de 52.000 repas - et des conteneurs d'eau après avoir déjà mené des opérations similaires jeudi et vendredi à destination des «milliers de citoyens» menacés par les djihadistes sur les monts Sinjar, entre Mossoul et la frontière syrienne, a annoncé le Pentagone. La prise par l'EI il y a une semaine de Sinjar, bastion des Yazidis, une minorité non-musulmane, a poussé à la fuite jusqu'à 200.000 civils selon l'ONU. Nombre d'entre eux sont piégés dans les arides montagnes environnantes, menacés autant par la faim et la soif que par les jihadistes. Outre les Yazidis, près de 100.000 chrétiens ont été chassés des plaines de la province de Ninive, à l'ouest de Mossoul, par les djihadistes, qui se sont emparés de cette deuxième ville d'Irak et de pans entiers du territoire depuis le début de leur offensive fulgurante le 9 juin. Le président américain Barack Obama s'est dit confiant samedi «dans le fait que nous pourrons empêcher l'Etat islamique d'aller dans les montagnes et de massacrer les gens qui se sont réfugiés là-bas», même si mettre ensuite ces dizaines de milliers de personnes dans un endroit sûr sera compliqué d'un point de vue logistique. M. Obama a déclaré avoir reçu le soutien du Royaume-Uni et de la France. Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius est arrivé hier à Baghdad pour des entretiens avec des responsables du ministère des Affaires étrangères et doit ensuite se rendre à Erbil pour superviser la première livraison d'aide humanitaire française aux déplacés dans la région de Sinjar. A son arrivée à Baghdad, le chef de la diplomatie française a appelé à la mise en place d'un gouvernement d'union «pour mener la bataille contre le terrorisme». «Il faut que tous les Irakiens se sentent représentés et puissent ensemble mener la bataille contre le terrorisme», a-t-il déclaré après une brève rencontre avec le ministre irakien des Affaires étrangères par intérim, Hussein Chahristani. La veille, le président américain avait également de nouveau appelé à la formation d'un gouvernement d'union pour faire face aux insurgés sunnites. M. Obama a insisté sur la nécessité d'aboutir à un gouvernement «dans lequel le peuple irakien et l'armée irakienne (aient) confiance», assurant que «pour partie, ce que nous faisons en ce moment est de leur préserver un espace pour mener à bien ce travail nécessaire», alors que les institutions politiques irakiennes sont quasiment paralysées par de profondes divisions. Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a également appelé à «respecter le calendrier constitutionnel qui régit la nomination du Premier ministre» et à «former un gouvernement élargi acceptable par toutes les composantes de la société irakienne», selon un communiqué de son porte-parole. Le plus haut dignitaire chiite irakien, le grand ayatollah Ali Sistani, a fait allusion samedi au Premier ministre Nouri al-Maliki déplorant qu'il «y ait des personnes qui ne veulent pas le bien du pays».