Les grandes puissances - singulièrement les puissances dotées de l'arme atomique - ont cela en commun qu'elles regardent les choses autrement, du sommet de la puissance et de l'arrogance que leur confère leur suprématie militaire, économique et financière. Dans ce contexte elles ont des faits et des événements des lectures exclusives qui ignorent la pondération et la raison garder. Ne reconnaissent jamais leurs torts, ont raison sur tout et sur tous, comme le montrent encore les déclarations, à la limite impertinentes, du président français, François Hollande, et américain, Barack Obama, à propos de la Syrie et de l'«Etat islamique» (EI) qui sème la terreur au pays du Cham et en Irak. Le chef de l'Etat français, au regard du développement de la situation dans ces deux pays du Moyen-Orient, eut ces mots définitifs devant les ambassadeurs français réunis à Paris: «Une large alliance est nécessaire, mais que les choses soient claires: Bachar al-Assad ne peut pas être un partenaire de la lutte contre le terrorisme, c'est l'allié objectif des jihadistes.» Si l'on peut se permettre cette formule, M.Hollande parle pour ne rien dire, prenant sur lui de réécrire l'Histoire à sa convenance faisant fi de la réalité dès lors qu'elle n'arrange pas ses certitudes et la vision qu'il a des faits. En effet, le président français a des trous de mémoire alors que le monde entier sait comment lui-même et donc son pays ont soutenu à bras-le-corps la rébellion en Syrie. Rébellion (ladite «Coalition nationale de Syrie)», faut-il le souligner, alliée du front Al Nosra (représentant local de la nébuleuse Al Qaîda) et les groupes jihadistes, devenus depuis deux mois l'«Etat islamique». Depuis 2011, le gouvernement syrien combat cette rébellion - incitée, voire initiée, notamment par la France - et les entités jihadistes. Aussi, si «allié objectif» des jihadistes en Syrie, il y a, celui-là n'est autre que la France qui qualifiait la pseudo-«opposition armée» (majoritairement composée de jihadistes) de «combattants de la liberté». La désinformation et la manipulation aussi sophistiquées soient-elles ont une limite et celle-ci semble avoir été atteinte dans le cas du président français qui ne peut plus tromper personne. Les faits en témoignent largement. Aussi, si cette «large alliance» que réclame le président français doit se faire, elle ne peut se réaliser qu'avec l'accord et la coopération des autorités syriennes. C'est à peu de chose près le même propos qu'a tenu, jeudi dernier, le «maître» de la Maison-Blanche, Barack Obama, quelque peu indécis de devoir - si cela arrive - «coopérer» dans la lutte contre l'«Etat islamique» avec son homologue syrien qu'il a placé, un peu vite, sur un siège éjectable. M.Obama affirme: «Je ne vois aucun scénario dans lequel Assad serait capable d'une façon ou d'une autre d'apporter la paix dans une région qui est à majorité sunnite. (...) Nous continuerons à soutenir l'opposition modérée car nous devons offrir aux gens en Syrie une alternative à Assad ou l'EI», jugeant que le dirigeant syrien avait perdu «toute légitimité» sur la scène internationale. Que veut-il dire par «opposition modérée» (qui peut être un régime, un Etat «modéré») quand le représentant d'une superpuissance - dont le concept de modération lui est tout à fait étranger - le met en avant, qui signifie surtout qu'il veut, face à cette puissance des interlocuteurs «soumis». M.Obama incite aux rivalités quand il fait la distinction entre des croyances qui ont vécu en parfaite harmonie en Syrie. Posez la question aux chrétiens syriens. Vous serez édifié! Quant à la légitimité d'un président, sa légitimité internationale lui est conférée par le peuple qui l'a élu et certainement pas par les Etats-Unis ou l'Occident, nonobstant - dans le cas syrien - le peu de charisme et sympathie que dégage M.Assad. Ceci dit, MM.Hollande et Obama savent évidemment que les jihadistes qui combattent en Syrie viennent d'une cinquantaine de pays étrangers - comme l'a confirmé il y a encore quelques jours le départeme d'Etat américain - et que les groupes formant l'«Etat islamique» qui dispose d'une véritable armée structurée, sont financés directement, ou indirectement (à travers la Coalition de Doha et le Conseil d'Istanbul ou encore le conseil militaire de ladite «Armée syrienne libre») par des pays amis de l'Occident qualifiés de «modérés», le Qatar et l'Arabie Saoudite. Ainsi, les puissants ne sont pas à une contradiction près, utilisant et instrumentant sciemment le terrorisme islamique, pour la réalisation de leurs projets. C'est celle-la la triste réalité du monde aujourd'hui qui fait payer le prix fort aux peuples des guerres qui ne sont pas les leurs.