Invité du Café littéraire de Béjaïa dans sa première activité depuis la rentrée sociale, tenue samedi dernier, Hend Sadi a décortiqué son dernier livre intitulé Mouloud Mammeri ou la colline emblématique en revenant longuement sur la polémique qu'avait suscitée la parution, en 1952, du premier roman de Mouloud Mammeri La Colline oubliée. Après une lecture de deux textes choisis du roman La Colline oubliée, devant une salle pleine à craquer, Hend Sadi n'a pas été avec le dos de la cuillère pour désigner les «traqueurs» de Mammeri. Une vieille polémique, en somme, à laquelle le conférencier a déjà consacré un livre qu'il a publié aux éditions Achab sous le titre Mouloud Mammeri ou la colline emblématique, dans lequel il a tenté de décortiquer les tenants et les aboutissants de la cabale médiatique dont avait fait l'objet l'illustre écrivain Mouloud Mammeri. Dans une conférence-débat, Hend Sadi a revisité le lynchage médiatique subi par l'auteur de La Colline oubliée et auquel se sont livrés certains intellectuels proches du PPA-Mtld, à l'exemple de Amar Ouzegane et Mohamed Chérif Sahli, et Mostefa Lacheraf qui ont accusé l'auteur de La Colline oubliée d'avoir écrit «une oeuvre littéraire et non politique» tout en favorisant le jeu du colonialisme. La première alerte, a-t-il précisé, a été donnée par Amar Ouzegane qui écrivait, dans le n°7 de la revue Le jeune musulman, un organe de presse fondé par Ahmed Taleb Ibrahimi, fils du successeur de Ben Badis, dirigeant de l'Association des ouléma musulmans d'Algérie, un article critique intitulé «Qui nous donnera une version nationale de la case de l'Oncle Tom?». Allusion faite au roman de Mammeri. Une première attaque, en somme, rappellera l'invité du Café littéraire qui a été suivie trois mois après par celle de Mohand Cherif Sahli, l'un des amis proches de Mammeri, qui s'est attaqué à Mouloud Mammeri en publiant un autre article dans le même organe en s'interrogeant sur la nature et l'objectif du roman qui: «Une oeuvre signée d'un Algérien ne peut donc nous intéresser que d'un seul point de vue: quelle cause sert-elle? Quelle est sa position dans la lutte qui oppose le mouvement national au colonialisme?» M. Sadi précisera accuser clairement Mammeri de faire l'éloge du colonialisme sans toutefois citer un passage dudit roman «Sahli avait poussé le bouchon un peu loin en titrant son article La Colline du reniement, sans pour autant citer un élément du livre incriminé» avait-il rapporté. Le troisième détracteur, que l'écrivain a présenté comme intellectuel de son époque et surtout comme la plume familière du PPA n'était autre que Mostefa Lacheraf, un membre influent du PPA et ancien ministre de l'Education nationale sous Boumediene qui a publié une contribution, toujours dans Le jeune musulman, sous le titre La colline oubliée ou les consciences anachroniques, dans laquelle il qualifie Mammeri de régionaliste. Par ailleurs, Hend Sadi soulignera l'honnêteté intellectuelle du célèbre écrivain et non moins ancien ministre de l'Education égyptien, Taha Hussein, qui ne manquera pas de faire l'éloge de l'esthétique et la force narrative de Mammeri. A l'issue de sa conférence, animée samedi dernier, au Théâtre régional Malek-Bouguermouh de Béjaïa, l'auteur de Mouloud Mammeri ou la colline emblématique a procédé à la dédicace de son livre en présence d'un public nombreux.