Devant l'absence de contrôle des prix, le citoyen est livré au diktat des spéculateurs. Ça devient presque un luxe. Après les viandes et les fruits, les légumes prennent des ailes. Les prix des produits de base donnent sérieusement le tournis. Les familles nombreuses souffrent sérieusement de la crise de l'assiette. Avec des prix exorbitants, un simple plat revient trop cher pour les petites bourses. La pomme de terre, la reine de la cuisine, passe de 35 DA à 80 jusqu'à 100 DA le kg. Selon les statistiques de l'Ugcaa, la pomme de terre a battu le record avec une flambée de plus de 150% par rapport à la même période de novembre 2013. Les autres produits ne sont pas en reste. L'oignon, qui était à 20 DA il y a quelques semaines, a grimpé pour atteindre les 60 DA le kg pour ne pas dire plus. La tomate se fait encore désirer en haut des 90 DA le kg. Pour les navets et les carottes qui étaient les moins chers, ils se situent entre 80 et 100 DA le kg. La salade ne dégrippe pas en se maintenant entre 120 et 150 DA le kg. N'en parlons pas pour la courgette qui a mis la barre haute et se négocie entre 160 et 180 DA le kg. Un petit tour d'horizon permet de constater le triste quotidien des pères de famille. «Le marché est devenu comme une pharmacie», ironise une vieille dame pour commenter la flambée des prix. Rencontrée au marché de Kouba, cette sexagénaire revient avec un couffin presque vide. «Tout est cher on va se mettre au régime», se plaint-elle. Pour les fruits, c'est une autre histoire. Les fruits sont à la portée des familles aisées. Avec des bananes à 180 DA et le raisin de fin de saison qui dépasse la barre de 300 DA, ces deux fruits affichent une augmentation de plus de 40% et de 140% respectivement. Devant l'absence de contrôle des prix, le citoyen est livré au diktat des spéculateurs. Le pire est que la flambée enregistrée à la veille des fêtes s'installe dans la durée. Que fait le ministère du Commerce? Où sont les quantités stockées de pomme de terre? Quel est le rôle du Syrpalac? Cette situation traduit encore une fois l'échec des mécanismes pris par le gouvernement dans la gestion et le contrôle des produits de large consommation. Alors que d'importantes quantités de pommes de terre ont été stockées durant le mois d'août dernier, son prix reste élevé en raison de la pénurie. Pourtant, le président du Conseil national interprofessionnel de la pomme de terre (Cnifpt), Bachir Séraoui a déclaré en mai dernier que l'Etat a réactivé le système Syrpalac. Il a même avancé que les quantités stockées «avoisinent les 250.000 tonnes». Comment expliquer cette flambée? «La flambée des prix de fruits et légumes sur les étals est imputable aux commerçants de détail. J'appelle les autorités publiques à plafonner les prix des produits agricoles frais et à fixer une marge bénéficiaire afin de maîtriser les prix», accuse le secrétaire général de l'Ugcaa, Salah Souilah, qui dénonce les marges bénéficiaires des revendeurs. Cependant, le président de la Fédération nationale des marchés de gros de fruits et légumes relevant de l'Ugcaa, Mustapha Achour, estime que la hausse des prix a atteint également les marchés de gros et qu'il impute aux «carences de la régulation» de ces marchés pénalisés par la spéculation. Selon lui, la hausse s'est aussi accentuée par le manque de pluie. «C'est l'anarchie totale. Comment voulez-vous que les prix soient maîtrisés?», s'indigne-t-il avant d'observer qu'avec la baisse de productivité causée par le déficit pluviométrique, «la spéculation gagne de plus en plus de terrain». Le citoyen reste le seul perdant dans cette affaire. Le président de l'association de protection et orientation du consommateur et son environnement (Apoce), Mustapha Zebdi, réclame, pour sa part, un débat entre les autorités publiques, les producteurs et commerçants sur les prix des produits agricoles. Pour lui, «les prix des fruits et légumes ont atteint des niveaux inadmissibles. Nous appelons les pouvoirs publics à réagir afin de préserver le pouvoir d'achat du consommateur». L'Etat n'a aucun poids sur le marché qui est livré à la mafia de la spéculation. Celle-ci fait la pluie et le beau temps loin de tout contrôle ni la moindre amende. Avec le retour de la pluie, les récoltes seront perturbées ce qui risque de faire grimper les prix des légumes. Face à cette situation, le gouvernement doit assumer ses responsabilités pour éviter une éventuelle émeute comme celle de l'huile et du sucre en janvier 2011.