A gauche, c'est un nouveau coup dur pour François Hollande qui bat déjà des records d'impopularité. Accusations de tentative de manipulation de la justice et de mensonges au plus haut niveau, intrigues de couloirs, déclarations changeantes: la classe politique française -partis traditionnels mais aussi l'Elysée - est éclaboussée par un scandale qui pourrait une fois de plus profiter à l'extrême droite. «Marine Le Pen les remercie», titrait dans son éditorial le journal le Figaro, en référence à la présidente du Front national. Au départ, deux journalistes du Monde ont affirmé que François Fillon, ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, a sollicité le secrétaire général de l'Elysée Jean-Pierre Jouyet pour lui demander d'accélérer les procédures judiciaires contre son ancien patron, devenu rival à la course à la présidentielle 2017. François Fillon a démenti formellement, portant plainte contre Le Monde, mais l'affaire a pris de l'ampleur lorsque M.Jouyet a revu sa version des faits. Après avoir nié jeudi, il a reconnu dimanche avoir évoqué avec M. Fillon la procédure judiciaire portant sur les comptes de campagne de M. Sarkozy. On est ainsi passé d'une possible «affaire Fillon» à une «affaire Jouyet», de nombreuses voix demandant la démission du secrétaire général de l'Elysée pour avoir «menti aux Français». Ancien secrétaire d'Etat du gouvernement de droite de François Fillon, M. Jouyet, 60 ans, est aussi un ami de longue date du socialiste François Hollande, dont il est devenu le bras droit à la présidence. Plusieurs voix dans l'opposition ont demandé sa démission. «Aujourd'hui, Jean-Pierre Jouyet est confondu de manipulation et de mensonge, et je crois qu'il doit quitter immédiatement son poste de secrétaire général de l'Elysée», a déclaré le porte-parole de Nicolas Sarkozy, Gérald Darmanin, également député. «M. Jouyet est dans une situation extrêmement inconfortable, (...) (son) autorité manifestement est atteinte», a souligné Hervé Mariton, candidat à la présidence de l'UMP, le parti de MM. Fillon et Sarkozy. Les deux grands partis UMP et Parti socialiste sont désormais empêtrés dans l'affaire, chacun tentant de se renvoyer la balle. A droite, l'affaire montre que le combat des chefs fait toujours rage et que tous les coups semblent permis. Depuis juin, M. Fillon assure, avec deux autres anciens Premiers ministres, Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin, la direction provisoire de l'UMP, en grave crise financière. M. Sarkozy est candidat à la présidence du parti et l'élection doit avoir lieu à la fin du mois. Il entend se servir de la fonction comme d'un tremplin en vue de 2017 mais MM. Fillon et Juppé sont aussi sur les rangs. A gauche, c'est un nouveau coup dur pour François Hollande, qui bat déjà des records d'impopularité. Si les versions concordent pour dire que le président a refusé d'intervenir dans les affaires judiciaires, son choix de faire venir M. Jouyet à ses côtés est désormais en cause. En cas de démission de M. Jouyet, M. Hollande serait obligé de nommer un troisième secrétaire général, un des postes clés du pouvoir en France, en moins de trois ans. L'affaire met aussi en lumière les relations, surprenantes pour le citoyen lambda, entre des dirigeants politiques issus souvent des mêmes écoles et accusés de connivence malgré leurs désaccords politiques affichés. Si le quotidien Les Echos estime que Nicolas Sarkozy, visé par plusieurs procédures judiciaires, peut aussi profiter du scandale car il donne «corps à son statut autoproclamé de «victime»», la plupart des analystes estiment que c'est l'extrême droite et Marine Le Pen, déjà donnée en tête des sondages au 1er tour pour la prochaine présidentielle, qui peuvent tirer les marrons de feu. Cette succession d'affaires va entretenir le discours du Front national qui met dans le même panier les politiques de droite et de gauche, les accusant d'être tous «pourris» et de nourrir des connivences d'intérêt tout en affichant des différents idéologiques qui ne trompent plus personne.