Sans rien renier de ses luttes et de ses combats et après trois longues et dures années de colère, de deuil et de tristesse, la Kabylie a décidé de tourner la page et de regarder vers l'avenir. Beni Yenni, ce joyau de la Kabylie du Djurdjura, citadelle du «nif» et du savoir a donné le La! Ce jeudi, elle a renoué avec la beauté grâce à la 6e édition de la fête du bijou. Taourirt El Hadjadj, les Aït Larbaâ, Aït Lahcène, Agouni-Ahmed et les autres hameaux formant la citadelle des Ath Yenni étaient là pour accueillir leurs invités venus des quatre coins du pays. Artisans, personnalités, simples citoyens de la wilaya ou d'ailleurs sentaient battre leur coeur à l'unisson : la fête du bijou a donné à tous un moment intense d'émotion et de retrouvailles. Fidèle à elle-même, la citadelle a démontré une fois de plus combien les coeurs apaisés pouvaient battre au même rythme. Plus belle encore que les bijoux qu'elle présente, ces joyaux finement ciselés et richement décorés de l'émail le plus beau et du corail le plus vrai, Beni Yenni, président de l'APC en tête, accueillait jeudi, outre la délégation officielle composée des ministres de la PME et de l'Artisanat, de l'Habitat, le wali de Tizi Ouzou et les élus locaux, les autres invités: artisans venus de quatorze wilayas du pays pour être aux côtés de leurs collègues de Tizi Ouzou et simples citoyens, venus admirer d'abord l'écrin puis les belles pièces en argent qu'il renferme. Avant la visite des stands, le maire de la commune, après les souhaits de bienvenue, interpelle les autorités face à la crise du secteur de l'artisanat. Il est vrai qu'à Beni Yenni, plus qu'ailleurs, cette crise est palpable. Devant les innombrables obstacles de toutes natures, plusieurs maîtres-artisans ont dû baisser rideau. Dans son allocution d'ouverture, le ministre de la PME en charge du secteur a annoncé plusieurs décisions du gouvernement en faveur de l'artisanat. Une enveloppe de 4,2 milliards de dinars est ainsi consentie au secteur pour sa relance. L'artisanat étant, comme disait si bien le ministre, «un vivier très important pour la création d'emplois». Le ministre a en outre évoqué la prochaine construction de 30 maisons de l'artisanat qui complèteront les douze déjà en réalisation, cinq musées, un centre de documentation et d'informations pour le secteur, onze nouvelles chambres de l'artisanat sont également prévus dans la nouvelle politique développée par l'Etat pour la relance du secteur. Un secteur que le ministre, au nom du gouvernement, s'est engagé à soutenir. Enfin, le ministre annonce «un programme spécial» pour Beni Yenni pour encourager les artisans de la région. Il termine son allocution en se déclarant heureux que la région renoue avec ses traditions festives : fête du bijou de Beni Yenni, fête de la poterie à Maâtkas, fête du tapis à Aïn El Hammam... Ensuite, la délégation officielle a visité les stands: ceux de la bijouterie au CEM Larbi-Mezani, et ceux des autres disciplines: poterie, vannerie, décoration, broderie et même pâtisserie, présentés par Mme Benferhat des Ouacifs. Une dame qui a su allier le beau et la douceur en innovant avec son doigté féminin, ou encore les tapis de belle facture d'Aïn El Hammam et de Ouaghzine. Avec les artisans, le ministre a surtout écouté les doléances et promis que les choses, désormais, seront appelées à changer désormais. A Beni Yenni, les artisans étaient nombreux à se retrouver aux côtés des locaux. Ils étaient ainsi 67 exposants à venir de Ghardaïa, Blida, Touggourt, Alger, Laghouat, Sétif et d'ailleurs. La beauté des oeuvres exposées rivalisait avec les sourires. Mais la grâce, toute la grâce revenait aux bijoux des Ath Yenni. La débauche de coraux, de broches lourdement chamarrées, de fibules à l'ancienne, de bracelets finement ciselés et de tant d'autres merveilles étaient un ravissement pour les yeux. Il est difficile de s'extraire de cette ambiance festive où le beau rivalise avec la générosité de la région. C'est avec regret que nous quittons les Ath Yenni, cette sentinelle du nif qui veille, face au majestueux Djurdjura, sur la tradition. Beni Yenni est une récompense que la nature offre au visiteur après la longue ascension depuis Tizi Ouzou. Non seulement la région est d'une époustouflante beauté, avec des sites magnifiques et des panoramas à vous couper le souffle, mais en plus, il y a cette générosité des hommes comme seule la montagne sait façonner. Beni Yenni est à voir et à revoir, le visiteur ne peut qu'être satisfait.