Pourquoi faire, en effet! Voilà une institution qui semble s'être spécialisée dans l'inquisition des Africains et singulièrement de ses dirigeants. Il est patent que ces derniers sont loin d'être des enfants de choeur et ont, sans doute, besoin dêtre surveillés. Mais est-ce seulement eux? Nous n'imaginons pas un seul instant que les gouvernants en Europe, en Asie, dans les Amériques soient des êtres angéliques. Loin s'en faut. De fait, si les présidents africains se conduisent comme des éléphants dans un magasin de porcelaine, se mettant à dos l'ensemble des organisations de défense des droits de l'homme et des libertés, leurs homologues des autres contrées de la planète ne le leur cèdent en rien et n'en font pas moins, mais le font avec plus de subtilité et de doigté. Ainsi, même si le monde est conscient de leurs forfaitures, il s'en trouve pour les légitimer, à l'exemple des crimes s'apparentant à ceux contre l'humanité des dirigeants d'Israël et des Etats-Unis. Cependant, on ne condamne ni Israël ni les Etats-Unis ce qui permet de condamner de façon vigoureuse d'autres dirigeants de moindre poids politique, dès lors qu'ils sont africains et/ou arabes. Nous ne défendons pas ces derniers - certains ont même la conscience très lourdement chargée, qui se sont incrustés au pouvoir sans avoir, quelque part, piétiné les règles du droit et de la gouvernance - mais nous relevons cependant que les procès faits aux (seuls) dirigeants africains - notamment - ont fini, outre de discréditer ce que l'on nomme «Cour pénale internationale (CPI)», par soulever moult questionnements. Le dernier procès instruit par cette institution l'a été contre le président kenyan, Uhuru Kenyatta, accusé de crimes contre l'humanité. Face au peu de preuves réunies pour étayer ces accusations, la procureure générale de la CPI, Fatou Bensouda, a été contrainte, vendredi, de retirer sa plainte, se promettant toutefois de poursuivre son enquête. Ce qui est étrange est que la CPI enquête actuellement dans huit pays africains: au Kenya donc - dont le vice-président William Ruto est toujours en procès - au Soudan, dont le président en exercice, Omar El Bechir est «recherché» par la CPI, en Côte d'Ivoire - dont l'ex-président Laurent Gbagbo est actuellement emprisonné dans les geôles de la CPI à La Haye -, en Libye - accusation contre Seif el-Islam El Gueddafi -, en RD du Congo, en Centrafrique, au Mali et en Ouganda. Cela fait, quand même beaucoup, lorsque la CPI ferme les yeux sur des crimes parfois plus violents - commis notamment par Israël et les Etats-Unis - ou se déclare incompétente comme dans le cas de crimes de guerre, contre l'humanité ou même de génocide d'Israël contre les Palestiniens. Cela a été le cas quand les Palestiniens tentèrent de porter plainte auprès de la CPI contre le boucher de Sabra et Chatila, Ariel Sharon. La CPI s'est dite incompétente, au prétexte qu'Israël n'est pas signataire du traité de Rome. En revanche, elle s'est considérée parfaitement apte à instruire le cas du président soudanais, dont le pays n'est pas, pas plus qu'Israël, membre de la CPI. Le plus grave, si cela se peut, est que les Etats-Unis ont rendu inopérante cette institution avant même qu'elle ne soit fonctionnelle. Ainsi, Washington a soudoyé des Etats pour obtenir que les ressortissants américains coupables de crimes ne soient pas remis à la CPI. Et puis, qui pouvait demander des comptes aux Etats-Unis, à l'instar des crimes qu'ils commirent en Irak et les destructions qui ramenèrent ce pays des décennies en arrière? Israël pour les innombrables forfaits contre les Palestiniens - cela sans remonter au rasage du village de Deir Yassine en 1948 et le massacre de ses habitants ou encore à l'assassinat, jusqu'ici impuni, du comte suédois Folke Bernadotte par le groupe terroriste Stern, aujourd'hui oubliés de l'histoire - perpétrés depuis la fondation de la CPI. En fait, beaucoup de terroristes du Stern, de l'Irgoun, de Lehi, de Haganah ont gouverné Israël jusqu'au milieu des années 1970. Aussi, George W. Bush et Benjamin Netanyahu, singulièrement, ont largement leur place aux côtés de l'ex-président ivoirien, Gbagbo, embastillé à La Haye. Question: pourquoi la CPI axe-t-elle et concentre-t-elle ses investigations uniquement sur l'Afrique et ses dirigeants? Dès lors, la question qui se pose est: à part de juger les Africains, à quoi sert la CPI?