Mercredi matin a eu lieu, à Paris, l'attaque de Charlie Hebdo, un journal satirique connu pour sa dérision, sa provocation et son peu ou pas de respect pour le conventionnel. Cette attaque a été traitée et passée en revue, par la presse française et mondiale, sous plusieurs angles. Considéré sous son aspect géographique, l'évènement du XXIe arrondissement parisien est lu comme un acte terroriste perpétré contre la France. L'attaque meurtrière du siège de Charlie Hebdo, lit-on un peu sur toutes les dépêches, a été un coup très dur pour la France. Cet évènement tragique marquera sans doute, et de manière profonde, l'évolution de la France, ses futures décisions et sa politique. Il constituera un jalon d'importance dans son Histoire à venir. Un 11 septembre à la française, ajoutent même certains. Le président Hollande a appelé les Français à manifester leur union dans ce moment difficile et, malgré les quelques couacs quant à une invitation officielle du FN à la manifestation de ce dimanche le sentiment d'unité nationale est à son maximum. Prise du côté civilisationnel, la tuerie du journal satirique n'a pas été ressentie de manière moins dure. Elle est présentée comme un assaut du fanatisme contre la démocratie, une déclaration de guerre faite à l'ouverture et à la tolérance. Un retour imposé de l'éternelle lutte entre le bien et le mal et dans laquelle les hommes libres n'hésitent pas à reconnaître leur place. Ce qui a été oublié D'un point de vue médiatique, c'est surtout la liberté de presse qui est désignée pour montrer l'atrocité de l'acte de mercredi. «Ils en veulent à la liberté d'expression!» s'écrie le monde dans sa globalité et il est incontestable que cette attaque du Charlie Hebdo fera aussi date dans les annales de la presse du monde entier. L'aspect politique n'est pas absent car, en France, cet attentat a rapproché, comme cela ne s'est jamais produit auparavant, les différents acteurs de la scène française. Les extrémistes, dont le Front national notamment, font désormais tolérables aux côtés des autres parties. Une place qui leur a toujours été refusée jusque-là et, on n'en doute pas, cet évènement contribuera à changer beaucoup de choses sur le plan politique dans l'Hexagone. Sur le plan religieux, tous les regards sont braqués, encore une fois malheureusement, vers les musulmans. Vers l'Islam. Plus que jamais, notre religion est accusée et nous-mêmes sommes considérés comme des barbares, des êtres préhistoriques, des monstres dangereux pour la quiétude du monde et qui perturbent la stabilité de l'univers pour des idées révolues, sans aucune relation avec le monde ni avec le présent. Pour ceux qui observent, la tuerie de Charlie Hebdo, qui a coûté la vie à douze personnes sans compter les blessés, n'a pas que des zones de lumière. Elle a aussi ses côtés d'ombre que, malheureusement, les médias français, (parce que trop secoués ou pour autre chose?) et d'ailleurs ont omis (?) de souligner. Depuis mercredi dernier, la police est aux trousses de deux frères français, d'origine algérienne, qui seraient les auteurs de la tuerie et l'hypothèse islamiste semble se confirmer de plus en plus car les deux frères seraient revenus de Syrie. En quelque sorte, un retour de colis que la France n'avait peut-être pas envoyé mais qu'elle n'avait, en tout cas, pas essayé d'empêcher car, maintenant, on sait que, déjà, l'un des deux frères était connu des services, qu'il était suivi, interpellé en 2005, alors qu'il s'apprêtait à partir pour Damas et qu'il a été aussi jugé en 2008 dans le cadre du démantèlement d'une filière, dite «la filière irakienne». Comment un tel individu pourrait-il préparer un coup comme celui du Charlie Hebdo sans éveiller de soupçons? La chose nous paraît impossible surtout que le milieu des djihadistes en France semble parfaitement infiltré (nous reviendrons sur ce point plus loin). Tout le monde a exprimé son émotion et sa peine et, à travers le monde, la presse a condamné l'agression du journal satirique français qui a perdu un très grand nombre de ses journalistes parce que l'attaque meurtrière avait eu lieu au moment de la réunion de rédaction qui, rappelons-le, ne se tient pas chaque jour mais une fois par semaine. Cela laisse supposer que les assaillants savaient exactement quand mener leur odieux forfait. Or, cela serait inexplicable pour, au moins, deux raisons. La première raison c'est que, l'un des deux frères au moins était connu des services de sécurité français et ceci aurait dû, en principe, attirer l'attention de ces derniers qui auraient pu éviter la tuerie sachant ce que représente Charlie Hebdo pour ce type d'individus depuis les caricatures de Charb. La seconde raison est que, depuis les menaces dont il avait fait l'objet suite aux caricatures et surtout depuis l'incendie de ses locaux en 2011, le journal satirique est en permanence sous surveillance policière. Comment, dans ce cas, auraient-ils pu obtenir les informations quant à la date de la réunion sans que les policiers en faction ne s'en rendent compte? Sur un autre plan, nul n'ignore qu'à peine quelques minutes après l'attaque, les photos des suspects circulaient déjà avec un appel à témoins. Une efficacité idéale, presqu'incroyable. Une efficacité qui ne colle cependant pas avec le type d'insuffisances que l'on vient de citer. Pour camoufler la véritable origine de l'information, les autorités ont tenté de donner quelques explications qui ressemblent plus à des insultes de l'intelligence du monde. «Le frère aîné a oublié sa carte d'identité» avait alors déclaré un syndicaliste de la police à la télévision. Comme si, lorsqu'on va mener une pareille attaque, la seule chose qu'il ne faut pas oublier de prendre avec soi et surtout de laisser sur le lieu du crime c'était la carte d'identité! Ensuite, il avait avancé que l'analyse des vidéos permettait de reconnaître les deux frères parce qu'ils tiraient des coups à coups et pas des rafales. Ces deux frères, sont-ils finalement les deux seuls êtres au monde qui savent faire fonctionner un kalachnikov au coup par coup? Ils sont peut-être les derniers à l'avoir appris. Les déclarations de la police ne font qu'ajouter au flou de son intervention. L'autre vérité En réalité, c'est pour protéger leurs véritables sources qui doivent impérativement se trouver à l'intérieur des réseaux, leurs taupes, leurs «insides», qu'il ne faut surtout pas mettre en danger. Si cette infiltration est tout à fait compréhensible et tout à fait utile pour la sécurité du pays, il y a lieu, pour les services français d'avouer qu'elle n'a pas été assez efficace pour prévenir l'attaque du Charlie Hebdo et, sur ce point, nous ne doutons nullement que, un jour, le débat sera ouvert en France autour de cette question comme ce fut le cas pour la tristement célèbre affaire Merah. Une question a aussi bizarrement manqué à l'appel ces jours. «Quel rapport existe-t-il entre cette attaque du XXIe et la reconnaissance de la Palestine par la France?» Serait-ce une simple coïncidence? Tout à fait possible! Serait-ce lié? Tout à fait possible aussi! Essayons de prévoir les grands bouleversements auxquels conduirait, en France, la reconnaissance de la Palestine, Armelle Le Goff, journaliste à 20 minutes.fr citait «violences entre communautés en France». Elle écrivait le 27/11/2014 que l'ambassadeur israélien Yossi Gal avait déclaré que «un tel vote, après les actes survenus en marge des manifestations propalestiniennes de cet été à Paris pourrait engager un nouveau cycle de violences contre Israël et les Israéliens. Mais plus grave encore pour la France et ses citoyens. Comme nous l'avons encore vu cet été, ce cycle de violences pourrait à nouveau s'importer en France». En plus de ces omissions, nul ne s'est posé la question de savoir ce que doivent ressentir les musulmans suite à cette attaque immonde. Certes, les musulmans ont rapidement réagi et condamné avec fermeté mais les musulmans sont aussi fatigués ou que des assassinats, des attentats, des massacres soient perpétrés en leur nom. En France ou ailleurs, aux cris d' «Allahou Akbar», certains commettent les pires exactions alors qu'ils n'ont absolument rien à voir avec l'Islam. Comme nous le disions jeudi dernier, le slogan que l'on décline au moment du crime ne signifie pas toujours ce qu'on en comprend. Les musulmans n'en peuvent plus d'être regardés comme des assassins parce que des jeunes et des moins jeunes, des fous et des plus fous, commettent des crimes en hurlant n'importe quoi. Chaque fois qu'une vie est fauchée au nom de Dieu, les musulmans sont choqués car le crime n'a pas de religion. Le crime est délinquant, il est généré par les conditions de vie des hommes car seuls les hommes sont capables de tuer les hommes. Les musulmans savent que la crainte de Dieu ne vient pas par les bombes et les attentats suicides. Ils savent que le respect à Mohammed (Qsssl) ne viendra pas par les massacres. Ils n'en peuvent plus d'être tenus pour responsables de toutes ces affreuses choses qu'ils ne commettent pas. Les deux suspects de Paris sont des citoyens français et il convient pour la France de s'interroger, d'abord, pourquoi certains de ses citoyens ont-ils pris des chemins aussi dangereux. Il est facile d'expliquer ces déviations par la religion, surtout lorsqu'il s'agit d'une religion qu'on n'aime pas beaucoup, mais le plus juste serait de poser les bonnes questions et de savoir y répondre avec courage, lucidité et sincérité. Le problème dans tout cela c'est que lorsqu'on commence à parler sérieusement on nous sort la théorie du complot! Déjà, sur les réseaux, beaucoup de questions sont posées et, déjà, certaines parties, bien connues, crient à la théorie du complot. La France devra-t-elle rester, elle aussi, silencieuse juste pour ne pas avoir à se voir brandir sous les yeux cette «théorie du complot»?