Leçon de démocratie. Elle nous vient de nos compatriotes de In Salah qui s'opposent au gaz de schiste. Voilà un mois qu'ils manifestent de manière civilisée. Pas un brin de violence. Vu que nous sommes habitués au contraire et que pour un oui ou un non, jusque-là, l'expression s'est toujours faite par la casse, leur pacifisme les honore et les hisse au podium de l'exemple. De ce fait, ils ont le droit, tous les droits de s'interroger, de douter sur l'impact réel d'une exploitation du gaz de schiste sur leur environnement. Ils ont le droit car ils ont entendu d'autres voix s'élever ailleurs contre ce type de gaz non conventionnel. Leur questionnement attend des réponses. Mais qui pourra les convaincre? Les spécialistes? Ils sont à couteaux tirés. Qui croire? Les pour ou les contre? Exercice difficile pour le commun des mortels. Comment départager des scientifiques qui se livrent à des polémiques sans fin quand on n'est pas soi-même un scientifique? C'est pourquoi, il est vain de se lancer dans des considérations chimiques ou géologiques que tout le monde ne maîtrise pas. Alors que faire? écouter attentivement les uns et les autres. Entendre les arguments des uns et les contre-arguments des autres. Ce qui permet dans un premier temps de comprendre qu'il y a, en arrière-plan, des intérêts différents. C'est aux Etats-Unis que l'aventure, du gaz de schiste, a démarré au début des années 2000. Grâce à quoi, non seulement ils ont réduit de manière considérable leurs importations d'hydrocarbures mais ils deviendront, d'ici peu, des exportateurs. Ce qui veut dire quoi? Que les intérêts des Etats-Unis, dans les régions produisant des hydrocarbures et notamment au Moyen-Orient, vont forcément changer. A terme, ils n'auront plus besoin de faire la guerre pour assurer leur approvisionnement en hydrocarbures. Jusque-là et chacun le sait, le pétrole et le gaz ont été des détonateurs de conflits. Que ce soit en Irak. Ou en Libye. Ou bien avant en Angola. Pour ne citer que ces exemples. Que les Etats-Unis n'aient plus le même intérêt pour le Moyen-Orient n'arrange pas tout le monde dans cette région. A commencer par Israël qui doit ses outrances à la force de frappe militaire américaine. Concernant l'Europe et selon la Commission européenne, le Vieux Continent n'arrivera jamais à son autosuffisance énergétique par le gaz de schiste. Les réserves n'étant pas abondantes. Ce qui n'a pas empêché une dizaine de pays d'Europe à s'être lancés dans l'exploitation du gaz de schiste. Seules la France, qui défend l'exportation de son énergie nucléaire et la Bulgarie sont contre ce gaz non conventionnel. D'ailleurs, l'Ukraine, pour sortir de sa dépendance au gaz russe, a déjà délivré deux permis d'exploitation de gaz de schiste à des sociétés pétrolières. Il y a le cas de la Chine qui fait du gaz de schiste le carburant de son mégadéveloppement. Elle ne s'en priverait pour rien au monde. Si l'Arabie saoudite a refusé de réduire sa production de pétrole, c'est tout simplement parce que sa production de gaz ne couvre que sa consommation. Elle n'a que le choix d'augmenter sa production de pétrole face à la baisse du prix du baril. Pour faire court, rappelons que l'écologie c'est d'abord et avant tout de la politique. Revenons à notre pays. Nos réserves en gaz de schiste sont aussi importantes que celles des Etats-Unis. Cela ne peut faire plaisir qu'aux Algériens et à personne d'autre. Et s'il était possible de nous en priver, beaucoup sont tentés de le faire. Cette Algérie qui réussit dans tous les domaines agace. Les habitants de In Salah devraient pousser leur curiosité pour voir plus loin que les discours d'environnement servis à l'étranger. Le gaz de schiste préoccupe au plus haut point l'ordre mondial tel qu'il est aujourd'hui. C'est là que se cache la vérité. Il suffit de lever, juste un peu, le voile!