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Les islamistes pavoisent
DEVANT LA RECULADE DU GOUVERNEMENT
Publié dans L'Expression le 16 - 04 - 2015


De concession en concession
Ayant perdu la bataille sur le terrain militaire, ils changent leur fusil d'épaule pour se reconvertir dans le prosélytisme. C'est ainsi qu'ils ont conquis les esprits et les coeurs des citoyens.
Le gouvernement courbe l'échine et les islamistes ne se font pas prier pour ramasser les dividendes des errements injustifiés de l'actuel Exécutif. Les islamistes font-ils aussi peur au point de leur concéder des «offrandes», ô combien symboliques? Ayant perdu la bataille sur le terrain militaire, ils changent leur fusil d'épaule pour se reconvertir dans le prosélytisme. C'est ainsi qu'ils ont conquis les esprits et les coeurs de citoyens en s'attaquant à des sujets sensibles pour faire reculer le gouvernement et utiliser ainsi cette reculade comme une victoire de la religion sur les mécréants. Dangereuse approche, par ailleurs reliée tout aussi dangereusement par certaines télévisions privées que l'Etat doit sérieusement rappeler à l'ordre
Tout a commencé en leur laissant ouvrir un faux débat sur le caractère «halal» des microcrédits. Des rencontres pour palabrer stérilement sur les intérêts dans ces crédits accordés aux jeunes ont été organisées en grande pompe au niveau du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs. Les mêmes genres de «débats» ont été réservés aux logements Aadl, qui ont même eu droit à une «fatwa»!
Ces petits cadeaux «emballés» en forme de polémique ont ouvert la porte à des dérapages encore plus grands. Car, entre-temps, un certain Abdelfatah Hamadache, qui se dit imam et chef d'un mouvement salafiste non agréé, le Front de la Sahwa (éveil) islamique libre, a menacé de mort l'écrivain et journaliste algérien Kamel Daoud sur sa page Facebook, sans que cela ne fasse bouger les autorités d'un iota.
Trouvant le terrain propice pour ce genre de controverses, les islamistes remettent au goût du jour les mêmes scènes télévisées qui ont précédé la décennie noire. Au lieu de réagir, les autorités font la sourde oreille, mettant sous le coude la loi du Code pénal portant de nouvelles procédures inhérentes à la protection de la femme contre toutes les formes de violence. Cela après que cette loi ait affolé les islamistes qui sont montés au créneau pour dénoncer le fait qu'on veuille... protéger nos femmes, filles et soeurs contre la violence! Le pouvoir a reculé et montré une terrible faiblesse en concédant aux islamistes le fait de mettre cette loi en sourdine, pourtant elle a été votée par les parlementaires. Si cette loi venait à être annulée, le précédent serait d'une extrême gravité et risque de susciter une terrible levée de boucliers. Nos polémistes en herbe ont pris sous leurs ailes une autre «cause nationale», à savoir l'uniforme réglementaire des douanières et l'interdiction de porter le voile (hidjeb).
Le directeur général des Douanes, Mohamed Abdou Bouderbala, a eu le courage de dire non à cette réclamation, qui ne semble toutefois pas trop les intéresser puisqu'ils n'ont pas vraiment insisté. Amara Benyounès n'a lui pas eu la même chance vu qu'il a été descendu en flammes par ces islamistes et leurs relais médiatiques à cause de sa circulaire portant la suppression de l'autorisation préalable pour la commercialisation de l'alcool en gros.
Après plusieurs semaines passées au gril et la menace d'une marche nationale vendredi prochain, Amara Benyounès s'est vu désavouer par son propre chef, à savoir le Premier ministre Abdelmalek Sellal. Même si Amara Benyounès est coupable d'avoir ouvert la voie à ce genre de polémique, en s'attaquant à un sujet qui n'est pas une priorité nationale alors qu'il n'arrive même pas à réguler le marché des fruits et légumes, il n'en demeure pas moins que cette sortie de Sellal est une nouvelle concession faite aux islamistes! Ces derniers pavoisent! Et il y a de quoi! Le gouvernement qui les drague depuis des années, a flirté périlleusement avec eux au point où comme dans une liaison dangereuse, il est sous leur emprise, sans savoir dire non. Ils ne sont pas au pouvoir, mais ils ont leur mot à dire sur les grandes décisions du pays qui ne passent pas par leur bénédiction. La preuve: avec la montée crescendo de leurs caprices qui sont passés de simples débats à l'annulation de loi et le désaveu public entre membres du même gouvernement. Et ce n'est que le début! Les caprices n'ont pas de fin. Au contraire, non stoppés, ils empirent car grâce à eux les islamistes testent les limites du gouvernement et prennent de plus en plus de pouvoir. Nous voilà donc revenus à l'époque du «Yadjouz» ou «Layadjouz», sous un gouvernement, dont beaucoup de membres ont pourtant combattu cette triste époque. Mais ne voilà pas que 23 ans plus tard, le pays qui a d'autres priorités, retombe exactement dans la même polémique du halal ou haram? L'Algérie avance-t-elle à reculons...?


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