Cate Blanchett dans Carol Nahid de l'Iranienne Ida Panahandeh et Carol de l'Américain Todd Haynes ont fort touché le public cannois. Deux longs-métrages, deux époques différentes. Des pays éloignés aussi bien géographiquement que culturellement. L'un projeté dans le cadre de la compétition officielle et l'autre dans la section d'Un certain regard. Le premier se passe dans le New York des années 1950. C'est l'histoire d'une rencontre de Thérèse, campée par la belle Patricia Rooney Mara, jeune employée d'un grand magasin de Manhattan, avec une cliente fortunée et distinguée, Carol alias Cate Blanchett. Une femme séduisante, prisonnière d'un mariage peu heureux mais obligée de rester pour l'amour de son enfant. Et pour cause, elle cache un secret que peu le savent. À l'étincelle de la première rencontre avec Thérèse succède rapidement le trouble. Jeune fille en fleur aimant la photographie, harcelée par son fiancé pour qu'elle se marie vite, Thérèse choisit de partir quelques jours en voyage avec Carol qui, elle, veut fuir ses problèmes conjugaux. Mais c'est sans compter sur la malice de son mari qui lui pose un piège. En fait, Carol préfère les filles et finit par ne plus s'en cacher. Dur aveu pour cette femme à cette époque, a fortiori dans une société puritaine comme l'Amérique. Si le sujet paraît bien romanesque, la fluidité du filmage et l'esthétique de l'image, la délicatesse des gros plans sur les visages rendent ce film de Todd Haynes, à la sauce british, amplement attachant, d'où l'enthousiasme des critiques à la sortie de la salle. Dans une autre contrée, aujourd'hui, vit une femme divorcée mais qui ne peut se remarier faute de se voir retirer la garde de son enfant de 10 ans. Chantage masculin typique, que celui vécu par Carol. Nous sommes en Iran. Ida Panahandeh brosse dans ce long-métrage le portrait d'une femme au bord de l'explosion. Mariée de force à un jeune délinquant et camé, elle voit aujourd'hui sa jeunesse partir en fumée. Selon la loi iranienne, la garde de l'enfant revient au père, mais ce dernier a accepté de la céder à son ex-femme à condition qu'elle ne se remarie pas. La rencontre de Nahid avec un nouvel homme qui l'aime passionnément et veut l'épouser, va bouleverser sa vie de femme et de mère. Nahid cède à la tentation du mariage temporaire... Film poignant, Nahid dévoile à travers cette histoire tous les dessous des traditions de la société iranienne et par là même, la condition de la femme musulmane en Iran, obligée de se soumettre à l'autorité familiale et masculine. Sa liberté d'être est reniée, tout comme Carol qui pendant longtemps a préféré faire comme les autres, au lieu d'affirmer qui elle est vraiment. Une personnalité brimée et refoulée. Un débat d'actualité toujours vivace, qui pose avec acuité le droit à la garde des enfants pour les homosexuels pour l'un et la femme célibataire pour l'autre et son combat au remariage. Deux films sensibles sur la condition de la femme dans le monde et son éternel statut inférieur et ambigu. Le film dira la réalisatrice Ida Panahandeh est «inspiré d'un fait lié à mon enfance». Dora Bouchoucha et Abderrahmane Sissako récompensés Couronné de sept Césars pour son film Timbuktu, le cinéaste mauritanien, Abderrahmane Sissako a reçu pendant le festival de Cannes, le prix France Culture 2015, récompensant l'ensemble de son oeuvre. Présent cette année à Cannes comme président du jury de la Cinéfondation et des courts-métrages, Abderrahmane Sissako a été fait vendredi après-midi commandeur dans l'Ordre des Arts et des Lettres par la ministre de la Culture Fleur Pellerin. «Dans votre cinéma de la différence, de poésie et de lumière, la beauté est bien le dernier rempart contre l'obscurantisme», a souligné Mme Pellerin. La ministre a annoncé que le cinéaste prendrait prochainement la présidence de la commission d'aide au cinéma du monde du Centre national du cinéma (CNC) et de l'Institut français. Pour sa part, la productrice engagée depuis 20 ans dans la promotion des cinémas du Sud, Dora Bouchoucha a été faite, jeudi pour sa part, à Cannes, commandeur des Arts et des Lettres par la ministre de la Culture Fleur Pellerin. Mme Bouchoucha a produit de nombreux documentaires et films tunisiens, dont La Saison des hommes de Moufida Tlatli et Barakt de Jamila Sahraoui. Elle est aussi l'une des principales organisatrices des Journées cinématographiques de Carthage. Elle sera d'ailleurs présidente d'honneur de la prochaine édition des JCC, la direction ayant changé, il y a sous peu par la nomination du cinéaste Brahim Ltayef.