Sans l'ombre d'un doute, la guerre que livrent les forces de la coalition en Irak est beaucoup plus médiatique que militaire. C'est plutôt une guerre d'images diffusées par les plus grandes chaînes de télévision mondiales qui se livrent bataille et qui ont, par-dessus le marché, un grand monopole sur l'opinion publique. Ainsi, ces images choquantes répondent-elles aux besoins du téléspectateur? Si oui, de qui et de quoi dépend cette diffusion? Y a-t-il une certaine déontologie à suivre et à respecter dans ces images? Ce sont autant de questions auxquelles les invités d'une émission spéciale diffusée sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale ont essayé de répondre. On compte parmi eux, Hamraoui Habib Chawki, directeur de l'Entv, le directeur de rédaction d'Al Jazeera, M.Djihad Bellout, Robert Menard de Reporters sans frontières le directeur d'Euronews, M.Asseta et l'ex-directeur de l'Entv et journaliste Abdou Benziane. Pour M.Hamraoui, la manière de couvrir la guerre en Irak répond au choix fait par ces canaux d'information. «Les Français par exemple essaient de couvrir cette guerre avec réticence et réserve. Les USA disent mener une bataille contre le terrorisme donc, selon leur conception des choses, les autres ont tort de ne pas être avec eux. Je pense que la guerre des images a commencé il y a de cela dix ans». Le directeur de la télévision algérienne soutient dans son intervention que les images diffusées permettent de voir les choses de deux manières: la première «elle consiste en l'information et d'une façon importante et utile». Quant à la deuxième, «c'est la banalisation de l'événement en inondant les télévisions du monde d'images qui peuvent montrer la face douloureuse de cette guerre.» Cependant, ce genre d'information doit-t-il ou non dépendre d'une déontologie? Ce en partant du principe de la diffusion des images des sévices sexuels infligés aux détenus irakiens diffusées par la CBS, ou celles montrant la décapitation des otages américains, italiens ou autres. En ce sens, on accuse la chaîne Qatariote Al Jazeera de servir de caisse de résonance aux groupes terroristes activant un peu partout dans le monde. Il convient de rappeler ici que cette chaîne diffuse pratiquement tous les messages et les communiqués émanant notamment des groupes islamistes armés, elle est même montrée du doigt et suspectée d'entretenir des liens avec ces groupes. Sinon comment expliquer le fait qu'elle soit le réceptacle des messages et les cassettes vidéo transmises par les factions islamistes? Son directeur de rédaction, M.Djihad Bellout, déclare qu'Al Jazeera exerce «son travail d'information à partir d'un principe précis qui est le devoir d'informer d'une manière impartiale et objective. C'est ce qui fait que notre chaîne se démarque par rapport aux autres médias internationaux et c'est là même le secret du large audimat dont elle jouit de par le monde arabe, voire occidental!». Aussi, M.Bellout a écarté la thèse selon laquelle Al Jazeera diffuse uniquement les messages des «criminels». Il a rappelé que la chaîne dont il est le directeur de rédaction est parmi les premières à avoir dénoncé publiquement le kidnapping des deux journalistes français ainsi que les différentes prises d'otages. Dans cette optique, le directeur de RSF, M.Robert Menard, dit qu'il est prêt à défendre cette chaîne si jamais elle rencontre des problèmes. Le directeur de la chaîne Euronews, M.Setta, a, de son côté, déclaré que «chacun interprète la déontologie à la manière dont il l'entend». Quant à l'ancien directeur de l'Entv, M.Abdou Benziane, estime que «c'est la déontologie du rédacteur en chef ou du directeur de la chaîne de télévision qui décidera de la façon de couvrir ce genre d'évènements. La décision s'avère assez souvent difficile, vu la lourdeur de la responsabilité à assumer, car dans cette guerre d'images chacun veut passer son propre message.» C'est plutôt un conflit d'intérêts aussi bien politique, géostratégique qu'économique.