Inédit. Le consommateur algérien aura un privilège unique au monde. Plutôt le casse-tête de reconnaître une marque détenue par deux industriels différents. En effet, une étrange transaction vient d'avoir lieu entre deux opérateurs économiques. La marque Trèfle a vendu «sa ligne de production de yaourts» à Danone. Seulement les yaourts. Enfin, les équipements qui produisent les yaourts. L'annonce en a été faite lors d'une conférence de presse «restreinte» qui s'est tenue jeudi dernier. Le site TSA qui donne l'information précise que «Danone ne compte pas changer la marque, reconnue par les consommateurs». Dans le même temps «Trèfle conserve ses autres activités, notamment dans la production de jus et de boissons lactées» précise le journal électronique. On connaissait le principe de la franchise dans le commerce qui consiste à payer l'autorisation d'ouvrir une boutique au nom d'une marque réputée mais dans l'industrie et sauf erreur, c'est une première mondiale qui nous avons l'honneur d'abriter dans notre pays. En clair, sur nos étals il y aura deux yaourts de marques différentes (Trèfle et Danone) fabriqués en réalité par une seule marque (Danone). Remarquez, Danone n'en est pas à son premier coup dans ce genre de transaction. Il avait commencé au début des années 2000 avec la marque Djurdjura. Toujours dans les produits laitiers. Après une première entrée dans le capital de l'entreprise algérienne, Danone en prend le contrôle en prenant possession de 95% des actions. Les 5% restants sont laissés à l'ancien propriétaire. A noter que c'était avant l'entrée en vigueur de la règle des 51/49% en 2009. C'est pourquoi, jeudi dernier, le P-DG a précisé qu'il ne «s'agissait pas du rachat de l'entreprise Trèfle mais uniquement des unités de production de yaourt». Il répondait à la question sur «le droit de préemption de l'Etat algérien». Trèfle et Danone semblent avoir trouvé une faille dans les textes pour s'y engouffrer. Et puis il y a cette ambiance d'opacité qui complique la compréhension de la transaction. Les deux parties n'ont pas voulu divulguer le montant de la transaction. Pourquoi? Peuvent-ils le cacher au fisc? Autre question, quel est l'intérêt de Danone dans cette opération? Est-ce réellement les équipements de production de yaourts qui lui manquent? Quelle plus value peut tirer le leader mondial Danone de la petite marque algérienne Trèfle? Il y a comme un chemin dérobé et sinueux que veut emprunter Danone dans le contrôle de la production laitière dans notre pays. Il faut rappeler que cette entreprise a créé son propre réseau de collecte de lait frais, dans notre pays, en conventionnant des éleveurs de vaches laitières. Contre l'aide et l'accompagnement accordés aux éleveurs Danone s'assure l'exclusivité de leur production. C'est dans cette continuité «expansionniste» que la dernière acquisition des yaourts Trèfle prend du sens. Une expansion qui se fait en marge des règles et de la politique de souveraineté de l'Etat algérien pour la sécurité alimentaire du pays. Notamment par le développement des capacités de production locale de lait frais en vue de réduire les importations de poudre de lait. Visiblement, Danone prend ses devants en s'inscrivant dans cette nouvelle perspective. On s'attend à une réaction du gouvernement algérien devant cette nouvelle forme «d'entrisme» de Danone qui contourne la règle des 51/49%. Il est prévu beaucoup de correctifs dans la loi de finances complémentaire 2015 prévue en juillet prochain. Ce serait le moment de remettre les pendules à l'heure. Pour corriger un «oubli» ou colmater une «brèche». D'autant que cette marque est déjà mondialement connue...pour ses abus. Comme lorsqu'elle a été contrainte de retirer le label «santé» à ses produits (Activia et Actimel) Danone qui ose. Ce n'est pas un slogan!