Il seront, cette année, plus de 100.000 jeunes Africains à tenter la traversée du Sahara, selon les estimations de l'OIM. Morts il y a plusieurs mois dans le désert, 30 migrants nigériens, dont les restes ont été retrouvés lundi dernier, ont vu leur «aventure» stoppée net par les «griffes» du Sahara, bien avant de goûter aux «dents» de la mer ou la matraque des policiers européens. L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) qui a fait, hier, l'annonce de cette macabre découverte, au lieudit Dirkou, au nord-est d'Agadez, sur la route vers la Libye, dans un communiqué, constate que «le Sahara peut être aussi meurtrier que la Méditerranée mais beaucoup de ces décès ne sont pas connus. Il n'y a pas d'opération de secours dans le Sahara». Cette «évidence» cache un drame, sans doute aussi affreux, sinon plus, que celui qui se joue quotidiennement au large des côtes italiennes. En effet, on peut être sûr que les 30 cadavres découverts, lundi dernier, ne constituent qu'une infime partie des milliers de jeunes Africains qui décèdent, parce que perdus dans les immenses contrées désertiques du plus vaste et plus chaud désert de la planète. Le directeur de l'OIM, le général William Lacy, avait annoncé, avant-hier, «la découverte de 18 migrants morts d'épuisement et de soif après avoir perdu leur chemin dans une tempête de sable». Il seront, cette année, plus de 100 000 jeunes Africains à tenter la traversée du Sahara, selon les estimations de l'OIM. Dans le lot, plusieurs centaines vont sans doute y laisser la vie en raison des conditions climatiques exceptionnelles dans le Sahara, généralement très peu habité. En cas de souci, les candidats à l'émigration clandestine n'ont quasiment aucune chance d'être secourus à temps pour nombre d'entre eux. Il reste néanmoins que les autorités nigériennes font preuve de vigilance et annoncent avoir assisté 5100 migrants, depuis le début de l'année. Ce chiffre «impressionnant» montre l'ampleur du drame qui commence bien avant l'arrivée des migrants sur les côtes libyennes, prêts à croire le premier passeur qui leur promet une traversée de la Méditerranée en quelques jours, mais qui leur fait courir un grand risque pour leur vie. Quelque 1770 hommes, femmes et enfants sont morts en tentant la traversée de la Méditerranée depuis le début de l'année en cours. De son côté, l'Europe, principale destination des migrants arabes et africains, préconise une surveillance accrue des réseaux de passeurs, dans le but d'assécher la filière et empêcher l'accostage des milliers d'émigrés clandestins dans l'île de Lampedusa. La chef de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini, donne le ton en militarisant son discours, misant sur une opération militaire sans précédent qui vise, selon ses services, à «rendre la vie impossible» aux trafiquants. Cette option a assez peu de chance d'avoir l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU, dont le secrétaire général a affirmé, avant-hier, que l'Europe pouvait recevoir un million de migrants. L'accord du gouvernement libyen installé à Tobrouk doit être requis au préalable. Mais les Européens ne sont généralement pas très à cheval sur la question de l'autorisation onusienne. L'on se dirige donc vers une autre «guerre», avec ses victimes collatérales.