Les Emirats arabes unis ont annoncé hier avoir démantelé et déféré devant la justice un groupe de 41 suspects accusés de préparer des attentats pour renverser le pouvoir et instaurer «un califat», en référence à l'EI. L'annonce de tels projets imputés à des extrémistes s'inspirant de groupes jihadistes sont rarissimes dans ce riche pays pétrolier du Golfe, relativement épargné par la vague de violences dans le monde arabe et qui mène une politique de tolérance zéro vis-à-vis des islamistes radicaux. Cité par l'agence officielle Wam, le procureur général, qui a annoncé cette affaire, n'a toutefois pas précisé la date du démantèlement du groupe, ni les différentes nationalités des suspects ni si ces derniers sont tous en état d'arrestation. Mais il a souligné que des Emiratis figuraient parmi les suspects qui ont créé le «Groupe des Jeunes d'Al-Manara», adepte du «takfir, une idéologie terroriste et extrémiste» selon lui. Les adeptes du «takfir», idéologie adoptée par Al Qaîda, l'EI et d'autres groupes extrémistes, qualifient d'infidèles les musulmans qui ne partagent pas leurs croyances. Les 41 suspects ont projeté de «commettre des attentats aux Emirats» afin de «s'emparer du pouvoir et y établir un califat», a accusé le procureur, laissant entendre qu'ils pourraient être liés à l'EI qui a autoproclamé un «califat» sur les territoires conquis à cheval entre l'Irak et la Syrie. Ils étaient «en contact avec des organisations terroristes étrangères (...) pour les aider à réaliser leurs dessins», a ajouté le procureur sans préciser lesquelles. Au sein de leur groupe, les suspects se sont dotés d'une «hiérarchie», avec un chef et un adjoint, ainsi que de comités chargés du recrutement de jeunes émiratis, du maniement des armes, de la fabrication d'explosifs et de la propagande extrémiste, selon le procureur. Avant cette annonce, les Emirats avaient en 2013 procédé au démantèlement du premier réseau extrémiste dans le pays. Soixante-neuf personnes, liées aux Frères musulmans et jugées pour complot contre l'Etat, avaient alors été condamnées à des peines allant de 7 à 15 ans, dans le plus grand procès du genre aux Emirats. En juillet dernier, les autorités ont promulgué une nouvelle législation prévoyant de sévères peines de prison, allant jusqu'à la peine de mort, pour les crimes liés à la «haine religieuse», et ont lancé en coopération avec les Etats-Unis, un centre chargé de contrer la propagande de l'EI. Cette législation a été rendue publique quelques jours après l'exécution, le 13 juillet, d'une Emiratie condamnée à mort pour avoir tué en décembre 2014 à Abou Dhabi une enseignante américaine avec un couteau de cuisine, en s'inspirant des groupes jihadistes. Ce meurtre, le premier du genre, a été perpétré dans un pays qui a pourtant multiplié les mesures pour se prémunir de la vague de violences qui ensanglante les pays du Printemps arabe. En 2014, les Emirats, qui ont renforcé leur répression de toute dissidence, se sont dotés d'une sévère loi antiterroriste et ont établi une liste de 83 groupes classés «terroristes», dont la confrérie des Frères musulmans, l'EI et Al Qaîda. Les Emirats, où la population locale ne représente qu'environ 10% des habitants, participe à la coalition internationale menée par les Etats-Unis qui mène des frappes aériennes contre les jihadistes de l'EI en Syrie et en Irak. Ce groupe ultraradical, qui sévit dans d'autres pays arabes, a revendiqué ces derniers mois une série d'attentats meurtriers en Arabie saoudite et au Koweït, deux autres monarchies pétrolières du Conseil de coopération du Golfe (CCG) qui regroupe aussi Oman, Bahreïn et le Qatar.