Le Premier ministre est sorti de son silence pour évoquer plusieurs questions d'actualité à partir de Constantine. «En ma qualité de Premier ministre, j'oeuvre à l'application du programme du président de la République sans aucune autre ambition ni arrière-pensée.» Avec cette déclaration faite, jeudi dernier à Constantine, en marge de la commémoration de la Journée du moudjahid, Abdelmalek Sellal coupe probablement court à toutes les suppositions le donnant comme successeur potentiel. Mais il ne clôt certainement pas le débat sur la question, dans cette conjoncture où l'on a l'impression qu'une guerre de clans fait rage au sommet de l'Etat. Dans sa brève intervention devant les journalistes, le Premier ministre a répété à trois reprises qu'il n'a pas d'ambition personnelle. Il a, en outre, affirmé que le gouvernement ne souffrait d'aucune division. «Il n'y a pas de divisions ni problèmes au sein du gouvernement qui oeuvre sous une seule autorité qui est celle du président de la République, Abdelaziz Bouteflika», a-t-il assuré. Pour M.Sellal, le défi majeur pour le gouvernement demeure celui d'édifier une économie nationale forte, capable de faire face à toute éventualité, notamment dans cette conjoncture difficile. «Il n'est pas question que le citoyen algérien connaisse à nouveau la moindre situation de paupérisation», a-t-il dit. Dans ce sillage, il a annoncé une réunion entre le gouvernement et les walis le 29 août pour «créer de nouvelles opportunités pour le développement de l'économie nationale et l'ouverture sur l'investissement». Suivra une tripartite entre le gouvernement, le patronat et les syndicats le 15 octobre prochain à Biskra. Les critiques à l'égard du gouvernement qui a été remanié à trois reprises ces deux dernières années ont quelque peu provoqué une certaine zizanie. Les observateurs ont relevé un gouvernement instable qui sacrifie ses ministres à chaque fois que l'un d'entre eux est lynché par les milieux islamo-conservateurs. Avec sa déclaration, M.Sellal semble vouloir rassurer la ministre de l'Education nationale, Nouria Benghebrit qui fait face à une campagne de dénigrement qui ne dit pas son nom, depuis sa nomination au gouvernement. Ses détracteurs ont doublé de férocité ces dernières semaines lorsque des experts ont proposé l'introduction de l'arabe algérien dans l'enseignement pour faciliter l'assimilation aux élèves. Pourtant, il ne s'agit pas d'une décision définitive ni d'une proposition personnelle de Mme la ministre. D'ailleurs, depuis «Constantine, capitale de la culture arabe», le Premier ministre a appelé les auteurs des attaques contre Benghebrit à la raison, leur demandant de ne pas faire l'amalgame entre les propositions des experts et les décisions de l'Etat. Aussi, il les a appelés à ne pas instrumentaliser l'école à des fins politiques, rappelant qu'une réforme du système éducatif a été engagée depuis l'année 2000. Sans trancher la question, M.Sellal a indiqué que toutes les propositions faites dans le cadre de la Conférence nationale d'évaluation du système éducatif seront étudiées pour ne retenir que celles qui contribuent au développement de l'école et du système éducatif. «J'ai suivi avec beaucoup d'intérêt le débat engagé au titre de la Conférence nationale d'évaluation du système éducatif et je ne peux que m'en féliciter, car il constitue un apport et une contribution au développement de l'école et du système éducatif (...) Il n'est dans l'intérêt de personne d'instrumentaliser les débats à des fins politiques et de les sortir de leur contexte éducatif et culturel», a-t-il déclaré, en parlant de la proposition d'introduire l'arabe dialectal dans l'enseignement. L'orateur a précisé que la langue arabe «est une référence constitutionnelle, civilisationnelle et culturelle, et un principe tranché de manière définitive, au même titre que tamazight qu'il importe de développer et de généraliser dans le cadre de la préservation de l'unité nationale». «Ce choix souverain s'inscrit dans le cadre des principes constitutionnels par lesquels l'identité et la personnalité nationales ont été tranchées de manière définitive», a-t-il dit, soulignant que le programme du président de la République est clair à cet égard et la mission du gouvernement consiste à s'employer à sa mise en oeuvre, conformément à son plan d'action, en veillant à ce que l'école algérienne préserve tous ses fondements. Même si rien n'est encore tranché, Nouria Benghebrit, qui était aux côtés du Premier ministre et que la rumeur distillée par les mêmes milieux ont donné comme démissionnaire, a donné l'impression d'être satisfaite de l'intervention de son chef hiérarchique. Le gouvernement va-t-il, pour une fois, protéger un de ses membres contre toutes les campagnes de dénigrement?