Des migrants secourus, mais malheureusement ce n'est toujours pas le cas «Il est inacceptable qu'au XXIe siècle des personnes fuyant les conflits, les persécutions, la misère et la dégradation des terres doivent endurer ces terribles expériences dans leurs pays d'origine, (...) pour finalement mourir aux portes de l'Europe.» William Lacy Swing, directeur général de l'OIM «Un jour, des millions d'hommes quitteront l'hémisphère Sud pour aller dans l'hémisphère Nord. Et ils n'iront pas là-bas en tant qu'amis. Parce qu'ils iront là-bas pour le conquérir. Et ils le conquerront avec leurs fils. Le ventre de nos femmes nous donnera la victoire.» Houari Boumediene L'histoire des migrations humaines commence avec les déplacements d'Homo erectus hors de l'Afrique à travers l'Eurasie il y a environ un million d'années. Homo sapiens semble avoir colonisé toute l'Afrique il y a 150.000 ans. Tout a commencé. Un crâne découvert en Israël pourrait apporter des précisions sur la migration de l'homme moderne hors d'Afrique il y a environ 60 000 ans. Cette migration a conduit à la colonisation de la planète entière par nos espèces, ainsi que l'extinction d'autres groupes humains tels que les Néandertaliens. Les premiers migrants en provenance d'Afrique ont migré de l'Afrique de l'Est qui ont traversé le Sahara et le désert de Nubie avant de s'installer dans la zone méditerranéenne Les causes des migrations Les migrations sont souvent qualifiées d'économiques ou de politiques et plus récemment de climatiques. Elles sont dues pour la plupart à des situations de guerre ou encore, à une situation économique précaire, de famine ou d'influence politique. Les réfugiés climatiques ou écologiques ou écoréfugiés sont une catégorie de réfugiés environnementaux. Les causes principales et «classiques» de leurs déplacements sont la désertification, la déforestation, la salinisation, l'érosion ou divers problèmes de toxicité du sol, de l'air ou de l'eau. Ainsi, entre 2006 et 2011, la Syrie a connu la plus longue sécheresse et la plus importante perte de récoltes jamais enregistrée, près d'un million et demi ont été touchés par la désertification. Les statistiques officielles évaluent entre 185 et 192 millions le nombre de migrants internationaux pour les années 2000. La réalité des migrations A entendre le tintamarre concernant le refus des épaves humaines venant des pays de guerre, on pourrait penser à un grand remplacement. De quoi s'agit-il? De 200 à 250.000 damnés de la Terre qui tentent de joindre le supermarché de la forteresse Europe. Pour fixer les idées, il est admis que le nombre de Syriens réfugiés à l'étranger - du fait d'une guerre déclenchée par l'Europe et les Etats-Unis pour installer un régime à leur convenance- dépasse les quatre millions, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). La majorité d'entre eux se trouve dans les pays voisins de la Syrie. Le conflit qui a commencé en mars 2011 a jeté des millions de Syriens sur les routes. Il y a désormais plus de quatre millions de réfugiés syriens dans le monde. «C'est la plus grande population de réfugiés pour un seul conflit en une génération», souligne le haut-commissaire Antonio Guterres. «C'est une population qui a besoin du soutien du monde mais qui vit dans des conditions d'extrême précarité et s'enfonce de plus en plus dans la pauvreté», poursuit-il. La plupart des réfugiés se trouve dans les pays voisins de la Syrie et atteint le nombre de 4.013.000 de personnes, suite notamment aux derniers chiffres fournis par la Turquie qui en accueille près de la moitié (1,8 million). Le HCR table maintenant sur 4,27 millions de réfugiés d'ici à la fin de l'année, auxquels s'ajoutent les quelque 7,6 millions de déplacés à l'intérieur de la Syrie. L'appel aux fonds pour 2015 lancé par le HCR pour venir en aide aux réfugiés syriens se monte à 5,5 milliards de dollars, mais il n'est pour l'heure financé qu'à 24%. Le Programme alimentaire mondial a déjà réduit ses rations pour les réfugiés en raison d'un manque d'argent.» (1) Les besoins financiers du HCR pour le Moyen-Orient ont considérablement augmenté ces dernières années, passant de 506,4 millions de dollars E.-U. en 2011 à un budget 2014 révisé de 1,6 milliard de dollars E.-U., pour tenir compte de l'augmentation des besoins liés à la crise en Syrie. En 2015, ces besoins financiers ont de nouveau augmenté, pour atteindre 1,7 milliard de dollars E.-U. en raison de besoins croissants découlant principalement des évolutions en Iraq, en Syrie et au Yémen. «Terre d'accueil depuis toujours, accueillant déjà des réfugiés palestiniens, le Liban et la Jordanie doivent aujourd'hui faire face à une arrivée massive de réfugiés syriens sur leur territoire. Au Liban cela représente déjà plus 1,14 million de personnes et plus de 600.000 en Jordanie. Proportionnellement à la taille du Liban, l'afflux de réfugiés a été tel qu'à titre de comparaison, si cela s'était passé en France, il aurait fallu accueillir l'équivalent de 8 fois la population parisienne en deux ans soit environ 16 millions de réfugiés. Au nord du pays, dans certains villages on dénombre plus de réfugiés syriens que de Libanais. Dans le même esprit, il y avait eu au Liban, vers la fin des années 1970, de violents affrontements, car les camps qui accueillaient les 450.000 réfugiés palestiniens étaient rapidement devenus des sortes de quartiers généraux des organisations propalestiniennes, dont l'OLP.» (2) Réagissant au fait que l'Europe n'a pas trouvé d'accord pour héberger 40.000 migrants, Vincent Cochetel directeur Europe du (HCR) déclare.: «Aujourd'hui, 86% des personnes déplacées sur la planète vivent dans des pays en développement. Et en 2014, ce sont 42.500 personnes qui ont été déplacées quotidiennement par les guerres et violations des droits de l'homme. Réinstaller 20.000 réfugiés et relocaliser à partir de la Grèce et de l'Italie 40.000 personnes en deux ans sur un continent de 500 millions d'habitants me semble de l'ordre du possible. Ne jetons pas la pierre à la Turquie. Avec 1,8 million de réfugiés sur son territoire, c'est le premier pays du monde pour l'accueil des réfugiés. Quand nous ferons autant qu'elle, nous pourrons critiquer!(...)» (3) On le voit, les migrants accueillis dans les pays voisins des pays en conflit sont sans commune mesure avec ceux «accueillis» en Europe (moins de 10%). On dit que bousculée par l'arrivée massive de migrants, la ville de Paris organise l'accueil. Actuellement, entre 200 et 300 migrants, venus du Darfour, d'Erythrée, du Soudan, de Libye, du Tchad ou du Maghreb, squattent le lycée dans des conditions précaires.... Comme c'est touchant! Les murs du supermarché Des murs sont partout érigés contre les faibles il n'est que de citer le mur entre le Mexique et les Etats-Unis, les murs en Europe, en Hongrie, Bulgarie, Grèce. Plusieurs milliers de migrants et de réfugiés sont passés samedi en Macédoine en enfonçant un cordon de police à la frontière sud. Ils ont passé plusieurs jours dehors et la dernière nuit sous la pluie. Beaucoup viennent de Syrie, d'Afghanistan et d'Irak via la Grèce, où ils affluent au rythme de 2000 par jour pour tenter de pénétrer dans l'espace Schengen. Tout est fait pour tenir à distance les épaves humaines chassées par la misère et la guerre. En 2015, un migrant meurt toutes les deux heures en moyenne en Méditerranée. Plus de 2000 c'est le nombre de migrants portés disparus en mer Méditerranée en 2015, Ces personnes qui rêvaient d'une vie tranquille, qui voulaient échapper à la mort en se noyant. Des dizaines d'enfants dont le destin a été de mourir sans éclore à la vie. Quand on pense à tout le tintamarre occidental: quand un Occidental meurt, on convoque la planète pour défiler et désigner du doigt l'ennemi héréditaire. Pourquoi les migrants risquent leur vie pour survivre? La tragédie des enfants Plus que mille discours nous donnons la parole à deux mamans qui racontent simplement pourquoi elles ont risqué leur vie et celle de leurs enfants pour leur assurer un avenir sans bombes: «Si ce n'était pas pour les filles, je n'aurais jamais pris ce bateau»: Nada, 33 ans, Syrienne, son mari et leurs trois enfants font partie des 124.000 migrants arrivés en Grèce cette année, à leurs risques et périls. Il y a un mois à peine, ils avaient quitté leur ville d'Alep dévastée.» (4) «Encore aujourd'hui, elles pleurent et elles hurlent de peur chaque fois qu'elles entendent un bruit fort, elles craignent que ce soit un bombardement», raconte la mère, tee-shirt rose et voile lilas. Mais elles ont retrouvé leur rire, et elles se sont remises à jouer. Au moins, la guerre est derrière nous maintenant», se réjouit-elle. Il faudra longtemps à tous ces enfants pour retrouver le sens de la normalité, estime l'association caritative Save the Children. Beaucoup de ces enfants syriens ne sont pas allés à l'école depuis plusieurs années, et ont grandi trop vite, perdant leur enfance Mais avec des familles qui ne cessent de changer de place, et un accueil grec réduit au strict minimum, les enfants n'ont reçu que quelques jouets, albums à colorier et crayons de couleurs donnés par les touristes et les habitants.» (4) «Nisreen, 34 ans, qui est également arrivée d'Alep à Kos par la Turquie, dit que la guerre a eu un impact psychologique massif sur ses petits garçons âgés de six et quatre ans.» «La guerre, ils l'ont dans le sang à présent, ils ne jouent qu'à ça. Il fallait que je les sorte de Syrie, je suis venue en Europe pour eux», remarque-t-elle. Elle s'inquiète de les voir s'affronter avec des petites cuillères et des crayons, en imitant le bruit des mitraillettes et des explosions. «Et ils me demandent pourquoi on n'entend plus de bombardement... Je veux que mes enfants puissent se détendre, jouer, et aller à l'école comme tous les enfants», dit-elle, Selon le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), la moitié des quatre millions de personnes qui se sont enfuies de Syrie ces dernières années sont des mineurs.» (4) La dimension coloniale et ses conséquences On croit, à tort, que ces noyés ont jailli du néant et qu'un jour, ils ont décidé d'aller à la conquête de cette Europe opulente qui cultive à tort le «chauvinisme de la prospérité». Il me semble que le premier responsable de cette débâcle humanitaire est encore et toujours le colonialisme, puis le néocolonialisme qui permet au colonialisme initial de perdurer en adoubant des tyrans tant qu'ils servent l'intérêt des anciennes puissances et qu'on jette ensuite aux chiens quand ils ont fini de remplir le rôle qui leur est assigné au profit d'autres tyrans quelle que soit leur couleur «islamiste modéré» «moderniste», laïc; «despote éclairé», bref pourvu que le siphonage des potentialités du pays colonisé continue... Il y a une responsabilité de l'Europe coloniale puis post ou néocoloniale dans ces désastres humanitaires, qu'il s'agit de l'accueil d'épaves humaines scories de l'histoire coloniale dont aucune nation anciennement colonisatrice, ne veut accueillir. Des voix s'élèvent pour imputer cette situation de désastre humanitaire, de crimes de masses à la politique américaine et française et britannique (Nicolas Sarkozy et David Cameron le Premier ministre britannique responsables du drame des migrants en Libye en intervenant en Libye au-delà du mandat de l'ONU). On oublie, aussi, de citer l'architecte de cette imposture, l'éminence grise Bernard-Henry Lévy qui est l'âme du complot. Il y a une responsabilité de la coalition qui est intervenue en Irak il y a douze ans, en violation du droit international. Je suis sûr que les épaves humaines syriennes, irakiennes, afghanes, libyennes et autres auraient préféré mille fois les régimes dans lesquels ils vivaient que leur situation de désespoir actuelle. Qu'a l'Occident à se mêler des droits de l'homme avec une diplomatie aéroportée qui non contente de semer le chaos in situ laisse des brigades de la mort qui n'ont rien à voir avec une quelconque appartenance à l'Islam. Former des gouvernements off shore pour donner l'illusion de gouvernement contrepoids aux régimes en place est un pis aller. Ces nationalistes démocrates de la 25e heure après avoir fait toute leur carrière en Occident viennent dans les bagages des vainqueurs représenter le peuple, adoubés sans aucune légitimité par les pays occidentaux qui les intronisent de Conseil de gouvernement en exil. Une fois leur mission terminée, ils retournent à leurs pénates en Occident. Le manque de vision globale de l'Europe Les citoyens européens, en majorité, ne veulent pas perdre les lambeaux de prospérité qu'ils gardent encore. Ils se sentent menacés par l'immigration. L'immigration en tête des sujets qui inquiètent les citoyens européens, avant le chômage et la crise financière. La solution de la droite et de l'extrême droite est de dénoncer les accords de Schengen. Nicolas Sarkozy appelle à un Schengen II, avec la possibilité de suspendre le traité pour une durée indéterminée dans le cas où les contrôles aux frontières d'un des pays membres sont «défaillants». Bien qu'elle s'apprête à accueillir 80.000 migrants pour compenser en partie son déficit démographique, la chancelière allemande estime que le sujet des migrants doit être pris en charge sérieusement au niveau européen. La question des migrants dans l'UE, confrontée à une crise humanitaire sans précédent, allait occuper les Européens «bien plus que la Grèce et la stabilité de l'euro». Lancer une guerre en Libye, intervenir en Afghanistan, soutenir un régime dictatorial en Egypte, soutenir l'Arabie saoudite dans sa guerre au Yémen, pour ensuite se laver les mains est ignoble. Par sa stratégie du chaos, les gouvernements impériaux jouent un rôle criminel, au Proche-Orient et en Asie centrale. La forteresse Europe, véritable miroir aux alouettes pour les jeunes du Sud, se barricade plus que jamais. La réalité est au-delà des larmes de crocodile. La grande majorité des responsables politiques ne se soucient pas de ce problème Dans ces pays, le populisme progresse. Recroquevillée sur ce qui lui reste de richesse, l'Europe fait preuve d'un chauvinisme sans égal. Certes, c'est un sentiment normal que de ne pas accepter normalement l'étranger surtout s'il est en compétition ave l'autochtone mais, on doit se garder de donner de leçons de se gargariser de mots creux et sonores; les droits de l'homme, la dignité... Allez expliquer cela aux migrants tabassés à Calais ou en Grèce! L'Europe gagnerait à se donner des leçons. Sa prospérité est bâtie pour les ex-pays coloniaux sur le sang et la sueur des épaves qui viennent de lui demander des comptes. Les Nations unies devront s'impliquer réellement,-au nom de l'humanité- si ce mot veut encore dire quelque chose, dans la recherche d'une solution politique en Libye; en Syrie et même dans le Sahel. Tous ces conflits ont été créés, d'une façon ou d'une autre, par les puissants de ce monde. 1. http://www.france24.com/fr/20150709-syrie-nombre-refugies-syriens-turquie-liban-HCR-4-millions 2.http://www.france24.com/fr/20140829-trois-millions-refugies-syriens-record-onu-liban-jordanie-turquie-syrie-etat-islamique-unhcr/ 3.Migrants: «Chacun des 28 pays européens doit prendre sa part» Le Monde.fr 09.07.2015 4.http://www.goodplanet.info/actualite/2015/08/18/cest-souvent-pour-les-enfants-que-les-syriens-risquent-la-traversee-vers-leurope/#sthash.C3tvAxdr.dpuf