Dès l'annonce du décès du leader palestinien, le mécanisme de succession s'est mis en place. Première constatation, la mort de Yasser Arafat n'a pas précipité l'autorité palestinienne dans les luttes intestines pour le pouvoir, contrairement à ce que laissaient prévoir les déclarations des uns et des autres tout au long de la semaine passée. En fait, dès l'annonce du décès du leader palestinien, le mécanisme de succession s'est mis en place sans «accroc apparent», puisque les instances palestiniennes ont veillé à combler le vide laissé par Yasser Arafat, d'autant plus que ce derner cumulait pratiquement tous les pouvoirs : chef de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), chef du mouvement Fatah, président de l'autorité palestinienne. Et bien entendu, c'est lui qui gérait les fonds de l'OLP et qui contrôlait les services de sécurité. C'est ainsi que Mahmoud Abbas, dit Abou Mazen, a été désigné dès mercredi comme numéro un de l'OLP, ce qui lui permettra de superviser les négociations avec Israël, au point mort depuis janvier 2001, et de maintenir les contacts avec les organisations palestiniennes de l'opposition, notamment les formations islamistes. Mahmoud Abbas a été le principal architecte des accords d'Oslo avec Shimon Peres en 1993. Sous la pression de Washington, qui a obligé Yasser Arafat à créer le poste de Premier ministre, Mahmoud Abbas a cru prendre sa revanche et relancer un processus de paix moribond, lui qui avait dénoncé la militarisation de l'Intifada. Mais il dut démissionner de son poste de Premier ministre en avouant qu'il n'avait pas les moyens de mener sa politique, notamment dans le domaine sécuritaire. Malgré son pragmatisme et son rôle historique, puisqu'il est cofondateur du Fatah et de l'OLP, Mahmoud Abbas reste impopulaire en Palestine. Pour sa part, Farouk Kadoumi a été désigné à la tête du Fatah, principale composante de l'OLP, par le comité central de cette instance. Il était dans les faits le numéro deux de cette organisation, mais il avait perdu beaucoup de son influence en raison de son opposition aux accords avec Israël en 1993. Résidant à Tunis, il s'est retrouvé forcément isolé du théâtre des opérations. Selon la Constitution palestinienne, c'est le chef du Parlement, à savoir Rawhi Fattouh qui doit assumer l'intérim de Yasser Arafat à la présidence de l'Autorité palestinienne, durant une période de 60 jours. Période suffisante pour préparer des élections présidentielles, pour peu qu'Israël joue le jeu et lève le blocus des territoires palestiniens, permettant aux candidats de circuler librement et de mener campagne. «D'un point de vue pratique, il est possible d'organiser des élections qui étaient prévues pour le printemps prochain» a assuré le politologue Ali Al-Jarbaoui, président de la commission électorale centrale. Par ailleurs, Ahmed Qorei, dit Abou Ala, a été confirmé à son poste de Premier ministre. A ce titre, lui et Rawhi fattouh se partageront le contrôle des services de sécurité, qui étaient auparavant sous la coupe exclusive de Yasser Arafat. En fait, Ahmed Qorei est considéré comme la force tranquille dans les turbulences politiques palestiniennes. Cet homme de 67 ans, également cofondateur du mouvement Fatah, est l'un des acteurs principaux des accords d'Oslo. Non seulement il a pu contenir la crise entre Yasser Arafat et Mahmoud Abbas, mais il est aussi considéré par ses proches comme l'homme des missions difficiles, que ce soit avec les Israéliens ou avec les autres factions palestiniennes. La conjoncture a besoin de son tact et de son pragmatisme pour éviter les éventuels débordements durant cette période de transition. Mahmoud Abbas et Ahmed Qorei sont donc les deux éventuels successeurs de Yasser Arafat à la tête de l'Autorité palestinienne. Mais leur impopularité au sein de la rue palestinienne, qui les soupçonne d'être proches de Washington, voire d'Israël, pourrait jouer en leur défaveur. Deux autres candidats reviennent dans les analyses des observateurs de la scène palestinienne. Ce sont Marwan Albarghouti, chef de la deuxième Intifada, actuellement détenu en Israël, et Mohamed Dahlane, ancien ministre délégué à la Sécurité intérieure, qui s'est prononcé jeudi pour des réformes démocratiques de l'Autorité palestinienne. Celui qui est considéré comme l'homme fort de la bande de Ghaza, et qui est proche de Mahmoud Abbas, nouveau patron de l'OLP, a affirmé par ailleurs «être au centre d'une oeuvre collective visant à assurer le transfert du pouvoir dans la paix et la dignité». Roulera-t-il pour Mahmoud Abbas? Quant à Marwan Barghouti, Israël, qui l'a condamné à perpétuité, affirme qu'elle ne l'autorisera pas à se porter candidat.