Alors que le groupe Canal+ vit une révolution rouge au sein de son entreprise, Les Guignols, fer de lance de la grande émission du prime time, le Petit Journal a osé ce qu'aucun salarié n'a encore réussi à faire: critiquer et se moquer ouvertement de son nouveau puissant patron. Au point où certains se demandent si le Petit Journal est devenu le seul survivant de l'ancien «esprit Canal». Dans le passé, c'étaient les Guignols qui se moquaient de leurs patrons, Pierre Lescure, Alain de Gref, Antoine de Caunes, mais depuis les derniers bouleversements au sein de Canal +, les salariés de la chaîne n'ont pas osé se manifester vis-à-vis de Vincent Bolloré, nouveau patron du groupe. Même les anciens, qui ont été remerciés et les nouveaux qui bénéficient des faveurs du boss de la chaîne, n'ont pas réagi à la polémique. La plus silencieuse comme une tombe, c'est bien Maïtena Biraben (qui a remplacé Antoine de Caunes à la tête du Grand journal depuis lundi), qui fait partie des gens qui ont respecté l'omerta mise en place jusqu'à présent en ne faisant aucune déclaration sur les récents changements. Mais la loi du silence à Canal + n'a pas eu d'impact sur Yann Barthès et son Petit Journal. Pour l'émission de sa rentrée lundi, Yann Barthès a annoncé la couleur en commençant fort. Le journaliste évoque l'été «agité» de Canal + et Vincent Bolloré présenté comme «l'homme responsable de cette tempête interne». L'équipe du Petit journal s'est même rendu au Medef afin de faire découvrir le personnage à travers la voix d'autres chefs d'entreprises. Le Petit journal qui n'a recensé que de belles choses a laissé passer une diatribe, celle d'un patron, Gabriel Szapiro, qui a indiqué que Vincent Bolloré avait un «ego surdimensionné». Et comme cela ne suffisait pas, Le Petit Journal ira même jusqu'à mettre en scène ses deux comiques fétiches: Eric et Quentin, les deux trublions du programme, qui ont tourné en dérision la crainte permanente de se faire virer par Vincent Bolloré et la nécessité de toujours abonder dans son sens pour éviter un licenciement expéditif. Restant dans l'humour et la dérision, Le Petit Journal est en train de jouer avec le feu. Les auteurs de ce journal satirique savent pertinemment qu'en les virant il fera d'eux des symboles de la liberté d'expression. Aucun P-DG n'a pu sanctionner Les Guignols et encore moins Le Petit Journal. L'émission est devenue le Canard enchaîné de l'audiovisuel. Il décortique la politique, dénonce les injustices et surtout grille les gens du pouvoir. Le Petit Journal est devenu même une tribune d'expression pour les pays étrangers. Son journaliste Martin Veil, a voyagé en Iran, en Colombie, en Corée du Sud et au Japon, mais n'a pas réussi à faire un sujet surtout sur l'Algérie, le pays arabe et maghrébin le plus égratigné par l'émission. [email protected]