Sur les 13,5 millions de tonnes de déchets produits annuellement en Algérie, 60% sont récupérables. Seuls 5% sont récupérés «Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer.» Guillaume d'Orange Dans le droit fil de mes contributions précédentes sur les vertus du développement durable qui appelle à une prise de conscience nouvelle, un nouveau paradigme qui doit nous faire sortir des temps morts actuels et de l'illusion de la rente, je veux, dans cette contribution, attirer l'attention sur l'opportunité offerte par le recyclage qui consiste à redonner une seconde vie aux choses. Mon plaidoyer concernera, cette fois-ci la possibilité de récupération de trois matières premières qui nous coûtent l'équivalent de plusieurs milliards de dollars, je veux parler du papier, des matières plastiques et du verre. Sans oublier bien entendu les matériaux ferreux et non ferreux qui peuvent aussi être récupérés. Sur les 13,5 millions de tonnes de déchets produits annuellement en Algérie, 60% sont récupérables. Seuls 5% sont récupérés. S'agissant du papier, à peine 15% seulement sont récupérés soit environ 100.000 tonnes de papier. Aux Etats-Unis, c'est 40% que l'on recycle, en Europe de l'Ouest 50%, et en Asie de l'Est c'est plus de 60%... Il faut apprendre à ce même citoyen, qu'en France, la fabrication de la pâte à papier utilise 40% de bois et 60% de papiers et cartons recyclés. Les décharges algériennes contiennent en moyenne 62% de matière organique qui peut fournir du gaz combustible et le reste pouvant servir de composte, 12% de plastique, 9% de papier et carton, 2% de métal, 1% de verre 14% en autres produits non valorisables Le principe de base: donner une seconde vie aux choses Chaque fois qu'une tonne de papier est recyclée, 1,41 tonne de bois est économisée, ainsi que 48,2 m3 d'eau et 10,25 MWh d'énergie. Une tonne de verre recyclée représente 0,66 tonne de sable et 0,1 tonne de calcaire et 1,46 MWh conservés soit 0,46 tonne d'équivalent CO2 évitée. Une tonne de PET recyclé représente 0,61 tonne de pétrole brut et 0,2 tonne de gaz naturel et 10,96 MWh soit 2,29 tonnes d'équivalent CO2 évitées. Nous voyons donc comment on peut faire à la fois des gains financiers, mais aussi en termes d'énergie. Nous gagnons sur tous les plans, même celui de la non-émission de CO2. Le modèle circulaire qui permet de valoriser sans rien jeter repose sur une approche biomimétique. Les règles du jeu indispensables qui doivent être mises en place dans la perspective d'un développement durable:Cinq principes fondateurs: Déchet = nourriture. La nature ne connaît pas le concept de déchet. Chaque élément biologique, doit être conçu dans la perspective de son désassemblage et de sa réutilisation. La diversité est une force. Les systèmes complexes dotés de connections et de strates multiples sont plus résistants aux chocs extérieurs que les systèmes conçus pour leur seule efficacité. Fonctionner à l'énergie renouvelable.À l'image de tout organisme vivant, chaque système devrait tendre à fonctionner à partir d'énergie renouvelable. Les prix doivent refléter la réalité. Les prix sont des indicateurs, pour utiliser les ressources de manière rationnelle, ils doivent refléter le véritable coût (1). Consommation de papier en Algérie et recyclage 600.000 tonnes importées de papier sont consommées chaque année en Algérie. Le recyclage du papier et autres déchets est une question qui sera de plus en plus récurrente si on veut consommer moins en consommant mieux le manque à gagner généré par le non-recyclage des déchets en tous genres est considérable. La facture de l'ordre de 600 millions de dollars. Pourquoi nous gaspillons le papier? Ce n'est pas une question de matière à recycler qui fait défaut en Algérie, c'est plutôt une question d'éducation et de persuasion du citoyen à lui faire entendre raison pour ne pas jeter de grosses quantités de sa consommation de papier dans les ordures Si chaque individu économisait 2/3 du papier qu'il utilisait on peut récupérer 432.000 tonnes de pâte. Pour compléter cette quantité et la dépasser largement, il y a la richesse de l'alfa qui couvre 4 millions d'hectares sur les Hauts-Plateaux, La production était de 200.000 tonnes en 1930. L'exploitation de l'alfa a été abandonnée à l'indépendance. 4 millions d'hectares qui peuvent donner 250.000 tonnes de papier. L'alfa est une matière de choix elle contient en moyenne 50% de fibres de papier. Peut-être qu'il faille examiner la possibilité de la réutiliser en même temps d'ailleurs que tous les déchets de bois qui pourrissent D'après le P-DG de Tonic industriel on peut faire mieux et récupérer jusqu'à 200.000 tonnes d'ici 2016. Nous l'écoutons: «Une campagne aussi qui sera lancée avec les municipalités pour essayer de faire le tri à la source, c'est-à-dire au niveau des ménages avec des bacs de papier, verre, plastique, etc. ensuite, aller vers les écoles pour former l'élève en tant que citoyen. Il y a aussi un programme de communication et d'information soutenue et qui est déjà lancé pour lui inculquer l'éducation environnementale et lui expliquer que rien ne se perd, tout est à récupérer, à recycler et à se transformer.(2) Le manque à gagner pour le non-recyclage du papier estimé, aujour-d'hui, à 300.000.000 d'euros. soit 3,5 milliards de dinars de perte. Les raisons sont connues l'absence de collectes régulières des déchets qui provoque inéluctablement l'amoncellement des ordures. L'incivisme de certains citoyens en toute impunité, font qu'aucun plan ne pourra réussir sans prise de conscience. C'est en tout cas le rôle du wali et de l'APC qui se doit de tout faire pour une gestion harmonieuse de la cité. Un plan opérationnel avec une approche de développement durable permettra la mise en place d'un marketing environnemental ciblant tous les acteurs: associations entreprises, citoyens, éducation ́ ́Il y va aussi de la santé, de la sécurité alimentaire, de la potabilité de l'eau. C'est dire si le plan de charge de la wilaya à travers les daïras et les APC devra être rigoureux. Pour cela, nous n'inventons rien. Les responsables à commencer par le wali, les présidents d'APC et les responsables à quel échelon qu'ils soient devraient s'imprégner de cette culture du développement durable. L'industrie des plastiques Un autre mine d'or inexploitée est le recyclage du plastique. C'est surtout dans les pays très industrialisés que le recyclage est efficace contrairement aux pays du Sud qui gaspillent. Les Algériens utilisent 7,5 milliards de sacs en plastique soit l'équivalent de 35.000 tonnes. Le moment est peut-être venu de reconvertir les unités de production et revenir à la bonne vieille «koffa» qui est utilisable des dizaines de fois par an. Avec une consommation annuelle d'un million de tonnes, dont la moitié est importée d'Asie et d'Europe, le potentiel du marché algérien des plastiques est considérable. La consommation par tête se situe entre 8 et 10 kg. L'Algérie est leader africain dans l'importation des technologies de l'emballage. Avec des importations d'une valeur de 131,1 millions de US$ en 2013 l'Algérie figure parmi les Top 3 importateurs les plus importants de la technologie de la plasturgie en Afrique, Avec des importations d'une valeur de 301,3 millions US $ en 2013 (+ 58,9%), l'Algérie est l'importateur le plus important de la technologie d'emballage en Afrique. loin devant l'Afrique du Sud, l'Egypte et le Nigeria. L'Italie est le deuxième fournisseur de l'Algérie en machines et produits en plastique et caoutchouc, derrière la Chine, a rappelé le même responsable, précisant qu'en 2010, les exportations italiennes vers l'Algérie en la matière ont été estimées à 21 millions d'euros. Plus d'une soixantaine de chefs d'entreprises algériennes spécialisées, publiques et privées, tentent de créer des partenariats dans ce créneau. Le secteur de la plasturgie tarde à atteindre le niveau de développement escompté, en dépit des potentialités existantes et les facilités accordées par l'Etat aux PME, relèvent des professionnels. Avec une consommation annuelle estimée à 1 million de tonnes de produits en plastique, l'Algérie importe plus de 500.000 tonnes d'Asie et d'Europe. Les importations en produits de plastique sont estimées à 71,2 millions de dollars, alors que celles des machines de conditionnement ont atteint 132,9 millions de dollars en 2011, selon les chiffres du Centre national de l'informatique et des statistiques (Cnis). (3) L'Algérie importe chaque année pour près de 1 milliard de dollars en produits et d'équipements d'emballage dont ce dernier occupe les 60% de la facture. Une facture d'autant plus lourde que la transformation du papier importé ne représente que 15% du total des importations. Les importations en papier et cartons sont passées de 93 millions de dollars en 2005 à 610 millions de dollars en 2014, soit une évolution de 655%. L'Algérie représente en 2011 un marché avec un volume d'importation de 200 millions de dollars portant sur le seul secteur des technologies de l'impression, du papier et de l'emballage, 132, 9 millions de dollars pour les machines à emballer et 67,1 millions de dollars pour les technologies de l'impression et du papier. L'emballage représente parfois jusqu'à 50% du prix du produit pour un matériau recyclable à l'infini, le verre coûte le même prix ou plus cher que le produit net. Par exemple, le prix d'une bouteille de jus en verre coûte environ 110 dinars le litre, contre 65 dinars le litre pour une bouteille de jus en PET. Un kilogramme emballé dans une boîte en plastique coûte environ 350 dinars alors que le même produit emballé dans un flacon en verre coûte 650 dinars, soit pratiquement le double. Il en est de même du plastique. En moyenne, un fardeau contenant six bouteilles d'eau minérale de 1,5 litre (soit 9 litres au total) coûte 135 dinars contre une bouteille de 5 litres d'eau de la même marque qui revient à 60 dinars. Le consommateur paye environ 25 dinars pour l'emballage des six bouteilles, soit environ 5 dinars pour chaque bouteille. Enfin un sachet de 3kg de poudre de lavage de vêtements pour machine à laver coûte 595 dinars contre le même produit en carton vendu à 730 dinars. Soit 135 dinars de plus ce qui représente le coût des 6 bouteilles d'eau minérale. La consommation annuelle est passée de 0.5 litre habitant en 2003 à 23.7 litres en 2012 (41% du volume des boissons consommées), 21 marques pour les eaux minérales naturelles 28 marques pour les eaux de source soit 1.5 milliard de litres en 2012. Cinq marques (Ifri, Saïda, Lalla Khedidja, Guedila, Nestlé) se partagent 70% des parts de marché. (4) Si seulement ce sont des bouteilles de 1 litre cela donne 1,5 milliard de bouteille à 35g chacune soit 50 milliards de grammes ou encore 50.000 tonnes; nous jetons la majorité des bouteilles de plastique. Le prix du PET sur le marché mondial est estimé à plus de 1300 dollars soit 130 et 160 dinars pour le kilogramme. C'est au total plus d'un milliard de dollars en matières plastiques acquis chaque année. Le gros problème de la collecte Maintenant que nous avons les données sur ce que nous perdons potentiellement, nous avons le devoir de récupérer cette manne. Les sociétés qui commercialisent devraient être partie prenante du recyclage et favoriser autant que possible les formats de 5 litres qui utiliseront moins de plastique. Ce que nous pourrions gagner aussi si on mettait en oeuvre une politique hardie de récupération de recyclage, reste le problème de la collecte. De par le monde en France, les taux de collecte sont différents d'un produit à un autre. Ainsi, le taux de collecte du verre d'emballages ménager est arrivé à près de 50% de 38% en 1995 à 55% en 2005. Ceci est dû à L'augmentation permanente de l'implantation de conteneurs d'apport volontaire. Actuellement il y a plus de 100.000 conteneurs d'apports volontaires du verre implantés pour la couverture de l'ensemble du territoire. Tout repose sur la wilaya et les collectivités Le développement durable est un levier pour aussi créer de la richesse. Il n'est que de voir comment le tri sélectif permet de récupérer, les métaux, le plastique, le verre, le papier à qui il est possible de donner une seconde vie en réduisant les importations. De plus, l'engagement citoyen dans certains pays, chaque citoyen donne une demi-journée par mois de son temps à sa commune. La commune, en tant qu'entité vivante, implique un mode de gouvernance participatif qui s'appuie sur la concertation et le dialogue et facilite les dynamiques collectives. Le développement durable donne envie de s'impliquer. Il parvient même à cultiver une dimension «épanouissante» et conviviale en montrant une pratique éco-citoyenne, dans le travail partagé, et les challenges à relever collectivement. Chaque wilaya doit avoir une stratégie en fonction de ses atouts. Elle doit, par principe, tout recycler, ne jeter que le minimum, emportant l'adhésion des citoyens en donnant exemple, en sanctionnant positivement ou négativement toute action. La création de richesse à travers l'exploitation des décharges pour en retirer tout ce qui peut être utile au pays, peut lui permettre si la volonté y est, si l'adhésion des citoyens est acquise par une pédagogie de tous les jours de faire gagner au pays globalement près d' un milliard de dollars entre le papier, le verre, les plastiques, le métal. C'est en gros la moitié de ce que l'on achète chaque année. Donner une seconde vie aux choses en recyclant sans acheter, en organisant des opérations de foire semestrielle, pour les échanges en favorisant des projets porteurs, en consommant moins, en consommant mieux et en étant solidaire d'une commune à une autre en mutualisant des moyens lourds. Cela donnera une rentabilisation des moyens et un meilleur entretien. Chacun devrait faire l'inventaire de ce qu'il a pour éviter les doubles emplois et les doubles acquisitions au niveau des wilayas et des daïras. Il peut s'avérer utile à nos édiles de suivre une formation sur le développement durable qui sera certainement profitable à la cité. C'est tout le voeu que nous faisons. Entre les tenants d'un catastrophisme de la fatalité, et ceux qui veulent faire quelque chose pour ce pays, il n' y a pas à hésiter. Plus que jamais, nous devons nous unir pour traverser cette mauvaise passe où pour une fois nous allons vraiment faire preuve d'intelligence pour gérer sous contrainte, indépendamment de nos chapelles et de nos états d'âmes. 1.http://www.ellenmacarthurfoundation.org/fr/economie-circulaire/les-principes/2e-partie-principes-fondateurs-du-modele-circulaire 2. Mustapha Merzouk, P-DG de Tonic Industrie L'éco n°113 / du 1er au 15 juin 2015 3.http://www.leconews.com/fr/depeches/plastiques-et-caoutchouc-les-entreprises-italiennes-pretes-a-s-installer-en-algerie-27-11-2012-160930_312.php 4.http://agrifood-innovation. blogspot.com/2013/10/industrie-de-leau-embouteillee-en.html