L'édition 2005 du mois sacré a eu ses bons et ses mauvais moments, ses démons et ses vedettes. Marqué par la «guerre des puces» que se livrent les trois opérateurs de téléphonie mobile, le Ramadan 2005 aura prouvé que la concurrence a du bon en Algérie. En effet, les campagnes de promotion lancées par Mobilis, Djezzy et Nedjma ont, dès le premier jour du mois de Ramadan, donné le ton d'une des plus «passionnantes» courses au client qu'ait vécues l'Algérie depuis l'indépendance. De tous les messages qui envahissent les panneaux publicitaires des grandes villes du pays, ceux des opérateurs de téléphonie mobile sont, sans conteste, les plus attirants. Et pour cause, les Algériens, agréablement surpris d'être au centre de la convoitise de trois grandes entreprises maniant l'outil technologique, se sont pris au jeu et l'essentiel des discussions qui ont lieu avant et après l'ftour dérivent fatalement vers le sujet de l'heure, à savoir les dernières offres de tel ou tel opérateur. Lesquelles offres ont fini par s'imposer comme un véritable phénomène de société et, partant, par donner un cachet particulier au Ramadan 2005. Cette inédite campagne de promotion, qui a vu les prix des lignes GSM chuter au-delà de toute espérance a manifestement contrasté avec la flambée qu'ont connue cette année les prix des viandes rouges. Les Algériens ont donc eu tout le loisir de constater durant ce mois, tous les bienfaits de la concurrence, mais ils ont également appris, aux dépens de leur porte-monnaie, le mal que peut engendrer une politique protectionniste. Cela dit, dans cet énième épisode de l'histoire du couple «viandes rouges-Ramadan», c'est la sortie du ministre de l'Agriculture qui en constitue la nouveauté. En effet, devant les niveaux astronomiques auxquels sont parvenus les prix des viandes, Saïd Barkat a tout simplement décidé d'autoriser l'importation de la viande fraîche, avec pour objectif de tirer les prix vers le bas. Le ministre de l'Agriculture n'a sans doute pas mesurer l'impact de ses paroles sur l'opinion. La décision de Barkat n'est, ni plus ni moins, que l'un des événements qui ont meublé les journées de jeûne. Sitôt le mot importation prononcé, les Algériens se sont mis à attendre cette viande avec une grande impatience. Ainsi, il ne se passe pas un jour sans qu'un titre de la presse nationale n'évoque le sujet pour révéler que la viande d'importation a été aperçue dans telle ou telle autre région du pays. Mais après une longue attente, les Algériens se sont rendu compte qu'en matière de prix, la viande coûtait toujours aussi cher. Alors on s'est mis à spéculer sur l'origine de cet état de fait. Certains accusent les bouchers de bouder ce produit, d'autres apportent une accusation encore plus grave, en affirmant que les bouchers vendaient la viande d'importation au prix de la celle locale. En tout état de cause, la fameuse viande fraîche a constitué l'un des sujets phares de ce Ramadan. Un mois politique Ce mois a été également marqué par une série d'événements de portée politique et historique. Ainsi, le cinquantième anniversaire du déclenchement de la Révolution a sorti l'Algérie de sa torpeur ramadanesque pour suivre, «et décoder» les deux discours du chef de l'Etat, prononcés à l'occasion, et où l'idée d'une amnistie générale a été mise sur le tapis, suscitant les réactions les plus diverses de la classe politique nationale. Une proposition présidentielle qui n'a pas laissé indifférente l'opinion puisque Bouteflika parle de soumettre son projet à référendum. Cela dit, même si la rue n'a pas trop commenté les discours du chef de l'Etat, il n'en demeure pas moins que le cinquantenaire de la Révolution a capté l'attention des Algériens, notamment grâce à une implication sans précédent des médias français dans la commémoration de l'événement. En d'autres termes, en plus du feux d'artifice qu'ont pu apprécier les Algérois, les citoyens ont tout de même appris des choses nouvelles sur leur révolution. Ils ont, à tout le moins, assisté à un débat contradictoire par médias interposés. Certaines soirées du Ramadan auront donc été instructives à plus d'un titre. Cela étant, les deux événements «spectaculaires» qui ont capté l'intérêt de l'opinion se sont déroulés à une semaine d'intervalle. Il y a eu d'abord le crochet algérois de Hocine Aït Ahmed, un certain 31 octobre, où il a réussi un grand meeting nocturne à Aïn Benian. Le séjour du président du FFS a donné un coup de fouet à la vie politique nationale, de sorte qu'une impression de retour aux belles années du pluralisme effectif ait traversé l'esprit de beaucoup de partisans d'Aït Ahmed, parmi les Algériens. L'autre événement qui a tenu la classe politique en haleine a été sans conteste le débat à l'APN sur la loi de finances 2005. Un grand moment de vie parlementaire que le commun des Algériens n'a pu suivre pour non retransmission des débats par la télévision. Cela n'a pas empêché les parlementaires de renouer avec le dynamisme, après trois semaines de somnolence en rapport direct avec le mois de Ramadan. Un Ramadan où les Algériens ont été surpris par un deuil de trois jours décidé par le président de la République à la suite du décès du président des Emirats arabes unis. L'autre surprise, très commentée par les citoyens et largement couverte par la presse nationale, est, bien entendu, la soudaine maladie puis le décès du chef historique de l'OLP. Ce «joueur» qui rassemble les Algériens Les soirées ramadanesques auraient été essentiellement consacrées à ces sujets d'ordre social, politique et historique, n'était l'attentat terroriste qui a coûté la vie à pas moins de 16 citoyens dans la région de Médéa. Le réveil du terrorisme n'aura pas été effectif, puisque hormis ce massacre et quelques autres opérations de moindre importance, le Ramadan, version 2005, a été globalement calme de ce côté, sauf qu'avec le net recul du terrorisme, il a été constaté une recrudescence sans pareil des crimes et délits liés à la délinquance. Les Algériens éprouvent quelques difficultés à se balader. La raison tient dans la prolifération des pickpocket et autres voleurs n'hésitant pas à utiliser la violence. Enfin, comme depuis une dizaine d'années les Ramadans algériens se suivent, mais ne ressemblent pas forcément, celui de 2004 a aussi ses spécificités, tant au plan politique que social. Il aura permis, par ailleurs, à un nombre impressionnant d'artistes de se produire devant un public qui, faut-il le souligner, a été très bien servi. Toujours dans le volet culturel et artistique, la palme revient à la Télévision nationale qui diffuse, depuis le premier jour du Ramadan, la désormais très célèbre série «Le joueur». Dernière oeuvre du défunt Djamel Fezzaz, cette production a battu tous les records d'audimat étant suivie par des millions d'Algériens.