Artur Mas, l'indépendantiste catalan, qui fait peur à Madrid et à Bruxelles (UE) Le chef du gouvernement multiplie les interventions dans les médias et les meetings avant les élections régionales de dimanche en Catalogne, que son propre parti juge «historiques». Les menaces et avertissements voilés ou directs, y compris du chef du gouvernement espagnol, sur ce qui attend la Catalogne (nord-est de l'Espagne) en cas de sécession se sont multipliés à cinq jours d'un scrutin régional crucial, où les séparatistes sont donnés gagnants. Une Catalogne indépendante «sortirait de l'Union européenne (UE), et que ferait-on avec les retraités? (...) il y a beaucoup plus de retraités que de cotisants et que se passerait-il avec les entités financières, la monnaie?», s'est interrogé Mariano Rajoy (conservateur) au micro de la radio privée Onda Cero. Le chef du gouvernement multiplie les interventions dans les médias et les meetings avant les élections régionales de dimanche en Catalogne, que son propre parti juge «historiques». Destinées simplement à renouveler le Parlement régional de Catalogne, elles sont présentées par le gouvernement régional sortant comme un plébiscite pour ou contre la sécession. La fièvre indépendantiste inquiète au-delà même des frontières espagnoles car, selon les derniers sondages, les listes prônant la sécession obtiendraient une majorité absolue en sièges. Or le président sortant de la région, Artur Mas et ses alliés indépendantistes - de droite comme de gauche - prévoient de lancer un processus pour la création d'un Etat catalan d'ici un an et demi, s'ils obtiennent cette majorité absolue. La formation de centre-droit Ciudadanos, militant pour le maintien en Espagne, arriverait en deuxième position. La liste de gauche radicale intégrant Podemos serait troisième, devant le Parti socialiste et le parti conservateur de M.Rajoy. Le chef du gouvernement a cependant encore écarté hier le dialogue avec M.Mas, souhaité notamment par les chefs d'entreprises. Le processus indépendantiste n'aurait «aucune valeur juridique, nous irions évidemment devant le Tribunal constitutionnel (pour le contester) et point final», a-t-il martelé. Déjà, lundi, le gouverneur de la banque d'Espagne Luis Linde avait évoqué les risques d'une «sortie de l'euro» et d'éventuelles mesures de contrôle des capitaux semblables à celles adoptées par la Grèce en juin. La presse espagnole a aussitôt développé l'hypothèse d'un inquiétant gel des avoirs bancaires. Un responsable de la Sécurité sociale a également évoqué un hypothétique problème de paiement des retraites, dans une région comptant 1,7 million d'habitants âgés de plus de 60 ans. L'argument avait déjà été utilisé en Ecosse, avant le référendum d'autodétermination de 2014, où le non à l'indépendance l'avait l'emporté. Le président catalan n'a pas apprécié et agité à son tour une menace, assurant que la région pourrait, de son côté, cesser de rembourser sa part de la dette publique espagnole, soit 32,8 du total. «Le prix à payer en l'absence d'accord pourrait être implacable», a prévenu M. Mas. Lors d'un meeting dimanche, il avait brocardé les «grands chefs» - du Parti populaire de M. Rajoy, du Parti socialiste et de Podemos - venus «dans la réserve catalane dire aux indigènes ce qu'ils doivent voter» et encouragé les électeurs à leur faire «un bras d'honneur» en votant pour sa liste. «Queue de cheval mauve pas comprendre», a répondu le chef de Podemos, Pablo Iglesias en ironisant sur sa propre queue de cheval et la couleur de son parti, avant de dénoncer la «langue de vipère» de M. Mas. «Qu'un gouvernant qui aspire à être président d'un pays indépendant (...) se présente devant les marchés financiers internationaux en disant qu'il ne va pas payer la dette de l'Espagne», est «irresponsable», a de son côté dénoncé hier sur la chaîne Telecinco le chef de l'opposition socialiste Pedro Sanchez. En Catalogne vivent 7,5 millions de personnes, soit 16% de la population de l'Espagne. Cette puissante région du nord-est crée un cinquième de la richesse nationale et représente un quart des exportations. «La rupture supposerait la ruine non seulement de la Catalogne mais aussi du reste de l'Espagne», a lancé M.Sanchez.