Sa colère va crescendo Devant un auditoire des plus attentifs, elle s'est livrée à une attaque en règle contre ce qu'elle a qualifié «de dérive dangereuse du gouvernement». La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT) ne décolère pas contre le pouvoir. Pis encore, la colère de Louisa Hanoune semble aller crescendo. A chacune de ses sorties, elle passe, en effet, à un palier supérieur dans les critiques. Hier, l'occasion de le faire lui a été fournie par la réunion de la coordination nationale de l'Organisation des jeunes pour la révolution, la structure juvénile de son parti. Devant un auditoire des plus attentifs, elle s'est livrée à une attaque en règle contre ce qu'elle a qualifié «de dérive dangereuse du gouvernement». Une dérive illustrée par «l'orientation erronée que prend sa politique économique», qui, a-t-elle déclaré, «menace la pérennité de l'Algérie en tant qu'Etat» et dont la gravité réside, a-t-elle laissé entendre, dans le fait que ladite dérive est intentionnellement provoquée: «Certains responsables - une minorité, a-t-elle pris le soin de préciser - agissent ouvertement au profit d'intérêts étrangers», a, en effet, lancé Louisa Hanoune. Non sans pointer clairement du doigt la partie étrangère bénéficiaire de ces agissements: «La priorité (dans l'octroi des marchés) est ouvertement accordée aux entreprises de l'ancienne puissance coloniale», a-t-elle ajouté en guise d'explication. Etayant son accusation par «l'incessant ballet de personnalités qui se déroule, présentement, entre Alger et Paris», elle n'a pas manqué de faire part de sa crainte de voir «l'Algérie devenir, à l'instar du Sénégal, de la Côte d'Ivoire et du Maroc, un protectorat» français, s'entend. Une perspective qui l'a poussé à se poser la même question que s'était posée, en 1964, dans son livre, le défunt président Mohamed Boudiaf. «Où va l'Algérie?», s'est, en effet, interrogée la première responsable nationale du PT. Comme pour dire que la réponse est évidente, elle a déclaré qu'il «ne saurait y avoir de souveraineté pour un pays s'il était soumis à l'hégémonie d'un autre». Et ce, pour déplorer l'étrange retournement de situation, dont l'Histoire a le secret, qui est en passe «de faire de l'Algérie, dont la capitale avait été qualifiée, dans les années 1960, par Amilcar Cabral, le charismatique chef historique du Paigc (Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap vert), de Mecque des révolutionnaires, un futur paradis de la rapine et de la corruption». Pour Louisa Hanoune, cette dernière perspective est clairement annoncée par les propos du ministre des Finances qui, de retour de Lima où s'est tenue dernièrement une importante réunion du FMI, avait déclaré que les responsables de cette institution financière lui avaient annoncé que l'Algérie «allait devenir la future Mecque des IDE». Une manière de dire que le «cadeau» annoncé de cette institution financière internationale, «à l'origine, a-t-elle rappelé, des malheurs de nombre de pays du Tiers-Monde», ne sera pas sans contreparties. Qui, craint-elle, «mettront en péril l'indépendance du pays». «Très chèrement acquise», a-t-elle tenu à le rappeler à son juvénile auditoire: «De 1830 à 1962, quelque 10 millions d'Algériens ont payé de leur vie pour s'opposer à la pénétration coloniale puis pour libérer le pays», a-t-elle, en effet, déclaré en se référant à des estimations établies par des historiens. Clarifiant sa pensée, Louisa Hanoune a estimé que «les périls internes sont plus grands que ceux externes» dont le caractère dangereux réside, selon elle, «dans la diversité de leurs formes». Y font partie, a-t-elle précisé, aussi bien «les grands changements intervenus dernièrement dans les différents services de sécurité» que les «graves décisions prises, depuis quelque temps, dans les domaines économique et financier», des décisions qu'elle n'a pas hésité à assimiler «à de somptueux cadeaux» accordés «aux prédateurs nationaux et aux étrangers». Et dans le même temps, «par les retombées qu'elles ne manqueront pas d'avoir sur nombre de secteurs d'activité, à de sérieuses atteintes au pouvoir d'achat de larges pans de la société algérienne». Dénonçant la remise en cause en cours de la nature de l'Etat né de la lutte de Libération nationale, la secrétaire générale du PT a appelé les jeunes militants de son parti, en cette veille de célébration du 1er Novembre, «à prendre exemple sur les combattants de la guerre de Libération nationale, dans leur majorité des jeunes, et à se mobiliser pour bloquer la dangereuse dérive en cours et, partant, à défendre, par l'action politique pacifique et démocratique, l'Etat national...»