Les étoiles dont il s'agit dans ce nouveau livre sont, entre autres Tahar Djaout, El Anka, Kateb Yacine, Djamel Amrani, Fellag, Azeddine Medjoubi, Sid Ahmed Agoumi, etc. Nadjib Stambouli, journaliste depuis des décennies, versé plus dans la culture et l'art, publie aux Editions Casbah, un livre à lire absolument. Il s'agit de «Ma piste aux étoiles». Ayant connu et surtout longuement côtoyé les écrivains, hommes de théâtre et artistes dont il dresse des portraits parfaits et précis, Nadjib Stambouli ne fait pas dans la complaisance. Il raconte ces hommes exceptionnels avec objectivité. Il ne s'agit pas de portraits d'anges avec uniquement des «hauts faits d'armes» mais réellement de reflets où l'auteur dit tout ou presque et même ce qui peut paraître relever du domaine de l'intimité amicale. C'est le cas par exemple en racontant les rapports qui étaient tendus entre Kateb Yacine, le romancier et Abdelkrim Djaâd, le journaliste. Mais il s'agit d'une mésentente purement professionnelle due à un malentendu dans laquelle Nadjib Stambouli avait joué volontiers aux bons offices. Et c'est ainsi qu'il fit la connaissance pour la première fois de l'un des plus grands écrivains algériens et maghrébins de tous les temps, l'auteur de l'immortelle Nedjma. Au-delà de l'intérêt que pourrait exprimer tout lecteur amoureux de la littérature, du théâtre et de la chanson et du coup aux personnalités présentées dans ce livre, il y a aussi et surtout cette musique des mots qui se dégage du style d'écriture de Nadjib Stambouli. La forme est tellement agréable que l'on est à chaque fois happé par un goût inachevé renouvelé à chaque fin de portrait. On aimerait encore pénétrer davantage dans l'univers d'El Hadj Mhamed El Anka, de Saïd Mekbel, de Azeddine Medjoubi ou d'Abdelkader Alloula en ayant comme guide cette plume trempée on ne sait où mais qui a un effet d'attraction certain sur le lecteur. On se régale en lisant les portraits de Nadjib Stambouli qui sait injecter un humour caustique à chaque détour d'anecdote à telle enseigne que parfois l'on se croirait dans un roman. On est vite rattrapé toutefois par les noms des artistes évoqués et des personnes concernées par le récit. Il y a des passages poignants dans ce livre surtout quand l'auteur revient sur l'épisode de l'assassinat d'une partie des personnages évoqués comme Djaout, Mekbel, Medjoubi et Alloula. Nadjib Stambouli raconte d'abord la triste nouvelle puis l'épisode indélébile des enterrements ayant ponctué le milieu intellectuel algérien dans les années 1990. Ce livre est une nouvelle rencontre ou plutôt une retrouvaille d'un autre genre d'un journaliste dont le talent et surtout le style d'écriture sont incontestables avec des hommes et une femme (oui, il y a une femme, la dramaturge Sonia). Une rencontre dans la solitude de la plume qui fait suite à des années de fréquentation. Et comme le souligne si bien Arezki Metref, l'auteur de la préface: «Pour qui le connaît, Nadjib Stambouli est contenu dans ces portraits; les traits invisibles des personnages qu'il croque, dessine comme en une trame révélée par les réponses à un jeu de piste dont on ignore les règles, un portrait en creux de lui-même.» Arezki Metref finit par rappeler cette évidence quand il s'agit de Nadjib Stambouli: le trait principal en est l'humour prolongé en autodérision, et jamais en dérision à l'égard des autres. Pourquoi Nadjib Stambouli a écrit ce livre? Il répond spontanément que l'évocation quasi incessante de ces noms dans des discussions, au travail ou ailleurs, fait souvent réagir ses interlocuteurs, qui lui demandent, parfois avec insistance, d'écrire ces histoires et anecdotes pour que de l'évanescence de la parole, ils passent à la longévité de l'écrit, et ainsi étendre l'auditoire restreint à un large lectorat. Et c'est ainsi qu'est née cette piste vers les étoiles. Un joli recueil de portraits avec une préface d'Arezki Metref qui apporte un éclairage sur Nadjib Stambouli, mais aussi des dessins de Yacine Brahimi. Presqu'une oeuvre d'art. Et Nadjib Stambouli est d'ores et déjà interpellé à en livrer une suite car il y a encore des dizaines d'hommes de culture algériens qu'il a eu la chance d'approcher et qui ne figurent pas dans cette galerie de 18 portraits. Un deuxième tome ne serait pas de trop pour qui a lu ce livre.