Les observateurs avaient vu dans les trois mois de non-convocation du Conseil des ministres, un remake du scénario du printemps 2003. Le président de la République signera la loi de finances 2005 le 29 décembre prochain, et ce, à l'issue d'un Conseil des ministres qui sera le dernier de l'année en cours. Le chef de l'Etat réunira les ministres de la République plus de trois mois après le dernier Conseil des ministres qui s'est tenu, rappelons-le, le 27 septembre dernier. Il y a été essentiellement question de la loi des Finances 2005. Aucun projet de loi n'a été abordé lors de cette réunion. Une série de communications d'ordre technique ont été données par des ministres. Ledit Conseil n'avait donc d'autre finalité que l'endossement de la principale loi qui va gérer le pays tout au long de l'année prochaine. Il y a lieu de rappeler qu'avant ce «vide» de trois mois entre deux réunions, les Conseils des ministres se tenaient quasi hebdomadairement, exception faite de la période située au printemps 2003 où l'opinion a largement constaté une interruption brutale des rencontres Bouteflika-gouvernement. Tout le monde aura compris ensuite qu'une grave crise couvait au sommet de l'Etat entre le président de la République et son chef du gouvernement de l'époque, Ali Benflis. Laquelle crise a éclaté au grand jour à travers le limogeage de Benflis à la mi-mai de la même année. Les observateurs de la scène nationale avaient vu dans les trois mois de non-convocation du Conseil des ministres, un remake du scénario du printemps 2003. Aussi, les spéculations n'ont pas manqué sur un probable différend entre le chef de l'Etat et Ahmed Ouyahia. En effet, depuis le dernier Conseil des ministres, le gouvernement a tenu six réunions, sans que les décisions prises ne soient entérinées par la plus haute instance exécutive de la nation. Cette situation que certains n'ont pas manqué d'assimiler à un blocage, a considérablement alimenté la rumeur dans les milieux politiques algérois. Ni l'agenda très chargé de Bouteflika ni les grands événements qu'a abrités l'Algérie, à l'image du Sommet du Nepad ou de la réunion des 5+5 n'ont convaincu les observateurs, et encore moins les démentis répétés du chef du gouvernement n'ont pu faire taire la rumeur. Rumeurs persistantes Celle-ci avait même dérivé vers la probabilité d'un remaniement ministériel où plusieurs ministres étaient donnés partants. Certaines indiscrétions avançaient le nom du chef du gouvernement dans le lot des personnalités dont le président de la République ne voulait plus. Ces «informations» avaient circulé au moment où le chef de l'Etat avait entrepris d'auditionner les membres de l'Exécutif. Cette démarche quelque peu inédite dans les moeurs de la République, ajoutée à l'absence de Conseil des ministres, a amené certains milieux intéressés à nourrir la polémique sur un proche divorce au sommet de l'Etat. Or, les auditions des ministres étaient déjà prévues lors du dernier rendez-vous de Bouteflika avec le gouvernement. En effet, dans son communiqué final, il est clairement stipulé que «le président de la République a instruit le gouvernement pour qu'il consolide la finalisation du projet de programme de soutien au développement et à la croissance qu'il entend examiner personnellement de très près avant sa discussion et son adoption proche en Conseil des ministres.» A l'origine de cette prétendue mésentente, l'on évoquait des raisons idéologiques, notamment sur la question de réconciliation nationale. Bouteflika et Ouyahia ne semblaient pas en phase sur le sujet. L'on se rappelle d'ailleurs les propos du chef du gouvernement devant l'APN sur la question, où il avait clairement affirmé que le concept de réconciliation nationale ne signifiait pas la mise en oeuvre d'un quelconque texte de loi. Une affirmation qui avait fait sortir le MSP de ses gonds, accusant à demi-mot Ouyahia de travailler dans le sens contraire du programme de Bouteflika. De tels couacs, il y en a eu au sein de l'Alliance présidentielle, mais il est entendu que le projet d'amendement du code de la famille a largement participé à fissurer la coalition gouvernementale. Adopté en Conseil du gouvernement, ledit projet n'a connu aucune suite en Conseil des ministres. Cette amnistie qui rapproche Le MSP qui tient à sa lecture de la charia semble faire discrètement pression pour amener le chef de l'Etat à reconsidérer le travail accompli par la commission Boutarène. De nombreux observateurs estiment, en effet, que le nouveau code de la famille pourrait constituer l'un des points d'achoppement au sein de la coalition gouvernementale et que le parti de Bouguerra, conscient de son poids dans l'alliance, prend le risque d'une crise interne. Cela dit, l'avènement de la loi sur l'amnistie générale, applaudie des deux mains par le MSP et soutenu par le RND, est susceptible de ramener le calme dans la maison présidentielle. Les sorties médiatiques récentes des deux formations politiques renseignent sur leur volonté de faire un bout de chemin ensemble sur cette question. L'importance, en fait, du prochain Conseil des ministres, tient dans son ordre du jour qui demeure pour l'instant inconnu. Si le projet de loi sur les amendements du code de la famille figure sur la liste des sujets abordés, cela voudra dire que le MSP a mis de l'eau dans son...lait. Cependant, il est également un autre projet de loi, tout aussi important, qui n'arrive toujours pas à passer le cap du Conseil des ministres. Il s'agit du nouveau code de la nationalité, dont l'approche a toutes les chances de provoquer une véritable révolution dans la société algérienne. Attendu par de très nombreuses personnes désirant prendre la nationalité algérienne, ledit projet, présenté par le ministre de la Justice, le premier septembre dernier, attend toujours d'être étudié en Conseil des ministres.