La guerre en Syrie filmée par un drone russe La politique étrangère des Etats-Unis se fonde toujours sur les deux alliés traditionnels qu'elle compte au Moyen-Orient, l'Arabie saoudite et Israël. Quarante-huit heures avant la reprise des discussions inter-syriennes qui auront lieu demain à Genève, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a indiqué hier, en Arabie saoudite, où il a eu des entretiens avec diverses parties au conflit telles que les représentants des rebelles syriens et leurs mentors saoudiens, que des «équipes d'observateurs américains et russes vont se rencontrer aussi bien à Genève qu'à Amman (...) pour examiner la question des violations du cessez-le-feu» question sur laquelle, a-t-il ajouté, il devrait pour sa part avoir un entretien téléphonique avec son homologue russe Sergueï Lavrov. Pour John Kerry, le sujet n'est pas de nature à compromettre la reprise des pourparlers de paix, considérant que «le niveau de la violence a été réduit de 80% à 90%, ce qui est très significatif». Cependant, il a accusé le régime du président Bachar al-Assad d'essayer d' exploiter la trêve pour réaliser des avancées sur le terrain alors que «les autres (l'opposition) tentent de bonne foi de la respecter».»La patience a des limites à cet égard», a-t-il averti, reprenant ainsi à son compte les arguments de l'opposition syrienne parrainée par l'Arabie saoudite et les pays du Conseil consultatif du Golfe. Se fiant aux accusations des ONG syriennes qui ont évoqué pour la seule journée de vendredi, sept civils tués et une dizaine d'autres blessés dans des raids de l'aviation du président Bachar al Assad sur la ville d'Alep, au nord du pays, américains et saoudiens ne cessent de crier au loup comme si le but recherché est de clouer au pilori le responsable, forcément le régime syrien en l'occurrence, coupable de «graves violations» face à une opposition aussi angélique qu'islamiste radicale, dans bien des cas. Le gouvernement américain qui est le co-parrain avec la Russie du cessez-le-feu, en vigueur depuis le 27 février, entre, d'un côté, les forces pro gouvernementales appuyées par l'aviation russe et, de l'autre côté, des groupes de rebelles dits «modérés» selon la terminologie occidentale s'est pourtant félicité à plusieurs reprises, et notamment ce même vendredi, du fait que le cessez-le-feu soit «en général respecté», les seules organisations jihadistes à en être exclues étant l'Etat islamique et le Front Al-Nosra. Mais il leur semble de bon ton de brandir régulièrement le reproche des violations de la trêve par la seule partie syrienne légale, c'est àdire l'armée du régime Al Assad, afin de maintenir une pression constante sur celui-ci. Des centres de contrôle chargés du suivi de la cessation des hostilités ont été mis en place à Washington, Moscou, Lattaquié (Syrie), Amman et Genève. En cas de non-respect de la trêve, un système d'alerte des Etats-Unis et de la Russie, puis des autres membres du groupe international de soutien à la Syrie (Giss) est également en exercice. John Kerry a formulé ces considérations, juste avant son départ pour Paris où il doit débattre avec ses homologues européens, après cette visite en Arabie saoudite où il a rencontré le roi Salmane et de hauts responsables du royaume, dont son homologue saoudien Adel al-Jubeir. Parmi les dossiers qu'il a eu à examiner avec eux, outre les pourparlers de paix sur la Syrie demain à Genève, dans lesquels Riyadh reste le principal soutien arabe de l'opposition syrienne, figurent également les perspectives d'une relance de la médiation onusienne au Yémen, pays ravagé par la guerre depuis environ un an, ainsi que les moyens d'aider au règlement de la crise libyenne, d'après l'entourage de John Kerry. Or, la Libye est d'abord et avant tout un enjeu maghrébin dans lequel l'Arabie saoudite ne saurait jouer un rôle modérateur, loin de là. Mais la politique étrangère des Etats-Unis se fonde toujours sur les deux alliés traditionnels qu'elle compte au Moyen-Orient, l'Arabie saoudite et Israël. Dans ce contexte, le chef de la diplomatie syrienne Walid Mouallem a affirmé hier que le sort du président Bachar al-Assad était une «ligne rouge» et que si l'opposition voulait en discuter lors des pourparlers de Genève prévus lundi, elle ferait mieux de ne pas venir. «Nous ne négocierons avec personne qui veut discuter de la présidence. Bachar al-Assad est une ligne rouge et s'ils (l'opposition) veulent continuer avec cette position c'est mieux qu'ils ne viennent pas», a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Damas durant laquelle il a aussi averti qu'il donnera vingt-quatre heures à l'opposition pour se présenter et non trois jours, comme lors de la rencontre précédente. L'envoyé spécial pour la Syrie le reconnaît Les Kurdes doivent pouvoir s'exprimer sur l'avenir politique du pays L'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie estime que les Kurdes syriens devront pouvoir donner leur opinion sur la future gouvernance et la Constitution du pays, bien qu'ils ne soient pas invités aux pourparlers de paix qui reprennent lundi à Genève. Dans une interview publiée hier par le journal suisse Le Temps, Staffan de Mistura reconnaît que «les Kurdes syriens sont une composante importante du pays, donc il faudra trouver une formule dans laquelle ils puissent avoir l'occasion d'exprimer une opinion sur la Constitution et la gouvernance du pays». Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a appelé vendredi M.de Mistura à inclure les Kurdes dans les négociations de paix sur la Syrie. «Le lancement de pourparlers sans la participation de ce groupe (...) serait un signe de faiblesse de la part de la communauté internationale», a estimé M.Lavrov, qui a fustige l'opposition de la Turquie à la participation des Kurdes aux pourparlers de paix. Alliés de Moscou et de Washington, les Kurdes syriens - qui contrôlent désormais plus de 10% du territoire et les trois quarts de la frontière syro-turque - avaient été exclus des premières négociations de paix tentées sans succès début février à Genève. L'envoyé spécial pour la Syrie a réaffirmé que pour ce deuxième round, qui débute demain, il avait envoyé des invitations aux mêmes participants. Mais, a-t-il dit au Temps, «j'ai le mandat de trouver des formules, même à géométrie variable, pour être aussi +inclusif+ que possible». Dans cette interview, M.de Mistura revient sur les étapes du processus de paix adopté par le Conseil de Sécurité de l'ONU. Il explique qu'il a lui-même décidé de faire démarrer au lundi 14 mars le compte à rebours des 18 mois nécessaires pour organiser des élections législatives et présidentielle. «Sinon, le danger est qu'on repousse sans cesse cette échéance», dit-il. Il ajoute que «d'ici à 6 mois, il faudra avoir une nouvelle gouvernance et une nouvelle Constitution». «On peut rédiger une Constitution en 48 heures. Il n'est pas non plus impossible de mettre en place rapidement un gouvernement de Transition», estime-t-il. A propos des élections législatives convoquées par le président syrien Bachar al-Assad pour le 13 avril, l'émissaire de l'ONU considère qu'elles n'auront aucune valeur. «Pour moi, les seules élections qui comptent sont celles décidées par le Conseil de Sécurité. Même s'il y a des élections demain ou après-demain, il y en aura de nouvelles, cette fois-ci supervisées par l'ONU»..