Le président Bush maintient le cap et promet plus d'interventions des Etats-Unis dans le monde. C'est un président américain triomphant qui a prêté serment jeudi pour son second mandat. Une prestation menée sous très haute surveillance après les menaces fomentées par Al Qaîda. Sûr de lui, et de son étoile, le président George W.Bush a fait non pas le discours d'un président américain s'adressant aux Américains, mais un discours sans nuance, celui du dirigeant du monde s'adressant à «ses sujets» encensant les uns, blâmant les autres, et promettant plus d'interventions dans le monde, pour «sauver les libertés». Une deuxième magistrature qui débute sous la devise comme quoi le droit du plus fort fait loi. Ainsi, d'emblée, George W.Bush joue cartes sur table en déclarant «Les évènements et la raison nous amènent à une conclusion : la survie de la liberté dans notre pays dépend de plus en plus du succès de la liberté dans d'autres pays», quitte à imposer cette «liberté» par les armes, se réservant de pourchasser les «tyrannies» partout où elles se trouvent. Aussi, plus que jamais, les Etats-Unis se donnent le rôle de gendarme du monde et se font forts de faire le ménage afin d'éliminer tout ce qui peut entraver l'exportation du standard de vie américain. M.Bush précise qu'il ne saurait y avoir de démocratie aux Etats-Unis «sans démocratie dans le monde». Aussi, il s'est donné pour mission d'imposer - même si cela doit se faire par les armes - le concept américain au monde entier. En fait, hier, observateurs et analystes avaient le regard tourné vers l'Iran, inquiets du sort de ce pays, de plus en plus considéré comme une cible potentielle du nouvel interventionnisme américain. De fait, le vice-président américain Dick Cheney, enfonce le clou en pointant jeudi le doigt sur l'Iran affirmant: «Si vous cherchez dans le monde les endroits potentiellement dangereux, l'Iran est clairement en haut de la liste». Bush II ne semble pas avoir changé d'un iota la politique belliciste qui a marqué son premier mandat, faisant toutefois plus attention à sa manière de s'exprimer, quand il faisait savoir que ceux qui ne sont pas «avec moi sont contre moi», ouvrant, par son peu de considération aux alliés traditionnels des Etats-Unis, une grave crise dans les relations internationales et singulièrement avec les Européens, Français et Allemands en tête. Aujourd'hui, le discours est sans doute plus policé, mais les intentions restent les mêmes. De fait, Georges W.Bush reprend à son compte ce vieux rêve maintes fois exprimé par les présidents américains au long des décennies, qui affirme le rôle dirigeant des Etats-Unis pour le monde, mais n'avaient pas les moyens dont dispose maintenant le 43e président américain. Ainsi, George W.Bush met en quelque sorte en pratique les doctrines Monroe et Wilson (des présidents américains James Monroe à la fin du XIXe siècle et Woodrow Wilson au début du XXe siècle) de domination du monde par les Etats-Unis. De fait, au moment où le monde est préoccupé par les inégalités et les saccages qui affectent aujourd'hui la planète,-accentuation du fossé entre un Nord industriel riche et repu, vivant dans une autre dimension, et un hémisphère sud de plus en plus pauvre, resté en marge du développement, la récurrence de pandémies dangereuses comme le sida, ou la dévastation de l'environnement mondial, saccage dans lequel l'industrie américaine a une responsabilité prédominante-, l'administration Bush refait la carte du monde à ses normes. De fait, excédé par la politique musclée de Washington et l'unilatéralisme des Etats-Unis, le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a accusé l'an dernier l'administration Bush de vouloir «rétablir la loi de la jungle» exprimant bien l'opinion qui est celle du monde concernant la politique interventionniste des Américains. Le désastre irakien ne semble pas avoir détrompé le président Bush quant au fait qu'il faisait fausse route, bien au contraire, l'hôte de la Maison-Blanche a réitéré jeudi que Washington restait déterminée à «protéger les Etats-Unis» en poursuivant ses interventions ponctuelles, par action diplomatique et intervention armée, cette dernière avec pour objectif le «changement de régime». Inaugurée en Irak, la politique d'intervention armée a, selon toute vraisemblance, des chances de se poursuivre en Iran, en Syrie, voire en Corée du Nord, si Washington n'arrive pas à faire plier ces pays à ses desiderata. Or, en Irak, où George W.Bush promettait aux Irakiens la liberté et la démocratie, c'est la déferlante de la violence avec des massacres au quotidien, constituant aux plans diplomatique et sécuritaire un véritable désastre que seuls les Américains ne semblent pas percevoir. Le monde pourra-t-il, demain, s'accommoder de trois ou quatre nouveaux Irak sans courir le risque d'aller à une confrontation générale ouvrant la voie à une nouvelle guerre mondiale dont personne ne peut prévoir les conséquences? Ainsi, M.Bush II joue à l'apprenti-sorcier en voulant manipuler à sa guise les faits et les hommes avec la menace de provoquer une déflagration mondiale incontrôlable. Fort de la position qui est celle des Etats-Unis, le président Bush donne l'impression de n'avoir tiré aucun enseignement de ses quatre ans à la Maison-Blanche et semble tout prêt a rééditer le même parcours calamiteux, pour la paix dans le monde, pour sa seconde magistrature à la tête du plus puissant pays du monde.