L'affaire a fait grand bruit. Un médecin algérien qui découvre le traitement d'une maladie incurable c'est plus qu'un scoop. Lorsque le médecin en question fait un démenti cela devient un flop. Tout a commencé... Pschitt! Après plusieurs semaines de matraquage médiatique greffé à la rumeur, il s'avère que le traitement miracle contre le diabète n'en est pas un. Pour ne pas dire bidon. Cette semaine, un médecin algérien est apparu au JT de 20 h de la Télévision nationale pour démentir avoir découvert un quelconque remède contre le diabète. Certains d'entre vous n'ont pas suivi cette histoire colportée dans la presse privée depuis son origine. Pour que tout le monde comprenne le sens de ce démenti nous avons décidé de remonter jusqu'au début de cette mascarade de mauvais goût. Il y a quelques mois, une chaîne de télévision privée, comme il y en a beaucoup dans notre pays, se saisit du sujet et du médecin en question. Ce dernier aurait trouvé selon «l'investigateur» de la télé, le remède miracle contre le diabète. Une révolution scientifique. Des «témoins» sont présentés au petit écran de la chaîne pour appuyer les bienfaits de ce nouveau «médicament». Bien entendu, tous ces intervenants affirmaient avoir reçu ce «traitement» et se sont, au final, débarrassés de leur maladie. Cette affaire passait en boucle et donc fatalement, a vite fait de créer le «buzz». C'est le taux d'audience quand il a pulvérisé tous les records. Le «médicament» agissait déjà sur «l'embonpoint» de la chaîne». Le «journaliste» et sa chaîne n'hésitaient pas à évoquer un scoop. Coup de théâtre. Le ministre de la Santé invite le médecin «découvreur» à son bureau. Les caméras de la chaîne qui tient à son scoop sont de la partie. Le ministre déclare en outre que le dossier du «médicament» en question est entre les mains des experts et que l'AMM (autorisation de mise sur le marché» est une opération longue et minutieuse et qu'il convient d'attendre ses résultats pour se prononcer. Cette audience est vite transformée par la chaîne qui «sponsorise» par une caution ministérielle. D'ailleurs, un autre entretien est programmé par la chaîne avec le même ministre de la Santé peu après. Avec une douteuse insistance sur les «témoins» qui ont déclaré être guéris du diabète après avoir pris le fameux «médicament. Fort heureusement, le ministre est resté sur ses positions en exigeant de laisser les experts des laboratoires travailler et donner leurs résultats. Voilà brièvement exposée l'affaire du «médicament contre le diabète découvert par un Algérien». Tout le monde aura relevé que tout au long de ces étapes, aucune intervention du milieu médical n'a été enregistrée. Le Conseil de l'ordre des médecins n'a pris position que le même jour du démenti du «découvreur» du médicament. C'est-à-dire cette semaine. Une absence qui a laissé libre cours aux promoteurs. Pour se rattraper, le Conseil de l'ordre a même contesté l'argument refuge du «découvreur» qui a voulu placer son «médicament» dans la catégorie des «compléments alimentaires». Même dans ce cas, il existe une procédure à suivre. Nous laissons à chacun de nos lecteurs de tirer lui-même les conclusions de cette scabreuse affaire. Nous ne la laisserons cependant pas nuire à l'ensemble de la corporation des journalistes et des médias. Les professionnels de l'information n'agissent pas ainsi. Des quidams présentés comme témoins ne suffisent pas à accréditer une découverte scientifique de cette importance. L'agenda d'un ministre non plus. Notre corporation est elle-même malade de ces intrus. C'est une minorité certes, qui fait cependant énormément de dégâts à notre métier. Les genres journalistiques ont carrément disparu. Du rédacteur au grand reporter, du chef de rubrique au directeur de la rédaction, il y a plusieurs étapes à franchir et un arbitrage qui n'existe malheureusement plus. Avant sa disparition on l'appelait la commission paritaire. Alors et quand aujourd'hui quelqu'un, comme celui qui est à l'origine de ce faux médicament, s'autoproclame journaliste «d'investigations» il faut plus que l'aplomb pour encaisser, sans broncher, le démenti de son «enquête». L'affaire a fait tant de bruit qu'un autre «découvreur» nous a été signalé cette semaine du côté de Bouhnifia, dans la wilaya de Mascara. Lui tape plus fort, il prétend guérir le cancer avec...une feuille de cactus. Voilà comment s'ouvrent des brèches à toutes sortes d'aventuriers qui s'abattent sur des Algériens affaiblis par la maladie. Notre rôle de journalistes, avant même celui de la police ou de la gendarmerie, est de les protéger en refusant d'être des relais pour les charlatans. Dans le cas contraire, nous devenons des complices! [email protected]