D'élection en élection, la chancelière allemande, Angela Merkel, perd du terrain face aux populistes de l'AFD, qui ont le vent en poupe Les électeurs de Berlin votaient hier pour renouveler leur Parlement, un scrutin dans une métropole réputée libérale et branchée qui devrait voir une autre poussée des populistes anti-migrants de l'AFD et une déception pour la chancelière. Les Berlinois votaient hier. Les premières estimations de résultats, publiées par les chaînes de télévision publiques, devraient suivre à la fermeture des bureaux de vote à 18 heures locales. Le Parlement local élu hier désignera ensuite le maire de cette cité en mutation de 3,5 millions d'habitants. La chancelière allemande ne devrait s'exprimer qu'aujourd'hui en milieu de journée. Selon un dernier sondage de la chaîne publique ZDF, le SPD (sociaux-démocrates) du maire sortant Michael Müller fait la course en tête avec 23% des intentions de vote, devant la CDU de Mme Merkel (18%) et les Verts (15%) alors que la droite populiste AfD, pour sa première participation à ce scrutin, devrait atteindre 14% des voix. Si ces scores se confirment, les deux grandes formations, qui gouvernent dans une «grande coalition» au niveau fédéral, enregistreraient un résultat historiquement bas depuis la Réunification. Même si les conservateurs sont traditionnellement assez faibles à Berlin, un mauvais score viendrait compliquer la tâche de la chancelière à un an des législatives, alors que sa généreuse politique migratoire de 2015 est dénoncée par certains de ses alliés comme la cause de la fin du tabou populiste en Allemagne. L'AfD, jeune formation qui en trois années d'existence est passé d'un programme anti-euro à un discours islamophobe, est déjà représentée dans neuf des seize Länder. Elle a enchaîné les bons résultats lors de quatre régionales en 2016 en surfant sur les inquiétudes nées de l'arrivée d'un million de demandeurs d'asile l'an dernier. Les derniers jours de la campagne ont été marqués par les appels à faire barrage à la droite populiste dans cette ville qui compte 13,5% d'immigrés et une forte communauté turque et russe. Le maire, qui a posé pour une affiche électorale avec une femme voilée, a comparé l'essor de l'AfD à celui des nazis appelant les électeurs à éviter «que l'histoire ne se répète». Après avoir voté hier, un policier de 27 ans a décrit l'AfD comme «un loup déguisé en agneau». «L'AfD attire des gens qui, autrement ne voteraient pas. C'est un vote Protestataire», a expliqué Tobias Ludley, en vantant sa ville «exemple rayonnant du multiculturalisme». Le principal opposant du maire et ministre berlinois de l'Intérieur, le conservateur Frank Henkel, a lui dénoncé un parti qui «tolère des racistes à sa tête». Même le légendaire club techno Berghain, qui a contribué à faire de Berlin LA ville en vogue en Europe, a appelé à stopper la percée populiste dans les urnes. Mme Merkel, dont le parti a été humilié le 4 septembre par l'AfD lors d'un scrutin en Mecklembourg-Poméranie occidentale (nord-est), a reconnu que la classe politique avait du mal à répondre au défi populiste et à la défiance vis-à-vis des élites politiques. Mais c'est bien la chancelière et sa politique migratoire qui est la cible des populistes. En marge d'un meeting de la CDU mercredi, elle a essuyé les sifflets et les invectives «Dégage» de sympathisants d'extrême droite. Le maire espère, après le vote, pouvoir former une coalition avec les Verts voire la gauche radicale et rompre ainsi son alliance à la tête de Berlin avec la CDU. Au-delà du contexte politique national, des thèmes spécifiques à Berlin ont largement entamé la confiance des électeurs vis-à-vis des deux grands partis. Considérée comme l'une des villes les plus dynamiques d'Europe grâce notamment à un réseau dense de start-up, Berlin voit les prix de l'immobilier s'envoler. Franziska Ersil, 38 ans, qui travaille dans la publicité, estime «que de nombreux problèmes propres aux grandes villes ne sont pas résolus» à Berlin. «Nous nous inquiétons au sujet de l'éducation, du manque de logements et du fait qu'une ville multiculturelle comme Berlin n'arrive pas à accueillir, loger et intégrer les réfugiés», a-t-elle détaillé.