A la veille de sa réunion à Alger, le 22 mars prochain, le SG de la Ligue arabe, M.Amr Moussa, dans un entretien accordé à l'agence algérienne d'information APS, annonce de profonds changements au sein de cette institution de près de soixante ans d'existence. Et qui a jusque-là fonctionné plutôt sous l'aile exclusive de l'Egypte. Le choix de la capitale algérienne, s'il n'est pas le fait du hasard, est sans doute éloquent et en dit long sur la «démocratisation des moeurs» au sein de cette institution qui demeure irréductible sur la question palestinienne. Dans son entretien accordé à l'APS, M.Amr Moussa évoque la création d'un Parlement arabe provisoire appelé à être permanent ainsi que l'amendement de la charte. Non sans ajouter que «des réformes radicales ont été engagées au niveau du conseil économique et social à l'effet, dira-t-il, de permettre aux organisations de la société civile de prendre part, pour la première fois depuis sa création, aux sessions du conseil». Un intérêt accru, ajoutera-t-il, sera accordé aux questions sociales, longtemps négligées. Le secrétaire général de la ligue poursuivra en déclarant encore qu'à côté des préoccupations économiques, tout un rapport sur les efforts engagés dans le cadre de l'amendement du système de vote, la création d'une instance chargée du suivi de la mise en oeuvre des décisions, sera mis sur la table des discussions. Un saut qualitatif en soi, qualifiera-t-il à ce propos. Il renchérira que «si la ligue parvient, dans les deux ou trois ans à venir, à développer ses structures et ses modes de fonctionnement, nous pourrons alors parler de succès à même de permettre à notre organisation d'être, à l'orée du nouveau siècle, la locomotive de l'action arabe commune au mieux des intérêts des peuples dont elle se fait l'écho!». Ainsi il est évident qu'après la question palestinienne, qui a toujours constitué le cheval de bataille de cette institution, c'est au tour de la charte de connaître, selon Amr Moussa, des réformes décisives, vu qu'elle compte intégrer, fait sans précédent dans l'histoire de son fonctionnement, la société civile. Une première en soi, à entendre le secrétaire général qui évoque des amendements révolutionnaires, dont celui important du système de vote. Ce qui sonne, à ne pas en douter, le glas de l'ostracisme qui a jusque-là caractérisé la ligue, appelée désormais à se mettre plus que jamais à l'écoute des peuples arabes dont elle inscrit au premier chef et dorénavant, les préoccupations d'ordre économique et social. Une démocratisation annoncée donc, de cette institution, qui pourtant n'est pas près d'être libérée de la mainmise égyptienne. Rappelons qu'à la demande algérienne consistant en l'instauration d'une présidence tournante de la ligue, toute une levée de boucliers égyptienne s'en est suivie. Il a fallu une rencontre au sommet Bouteflika-Moubarak pour que les choses reviennent en place, non sans qu'Alger ait mis un peu «d'eau dans son vin», pour ne pas envenimer une situation déjà parvenue à son comble. Quoi qu'il en soit, et en dépit de cette annonce tout aussi enthousiaste qu'optimiste quant à l'avenir du régime de la ligue, l'Egypte demeure, à en croire les observateurs, maîtresse du jeu de stratégie qui règne au sein de la Ligue arabe. Le pays du Nil étant dans la grâce des pays du Golfe qui y voient une nation à caractère «modéré» par rapport à l'Algérie. Néanmoins et de par le choix géographique arrêté, le rendez-vous d'Alger annonce une révolution des «moeurs» certaine au sein d'une institution à l'évolution aussi lente que lourde. Alger venant rompre avec le choix quasi-réflexe de capitales de pays arabes tels le Liban ou le Maroc.