La seconde édition de cette manifestation de la ville d'Annaba tire à sa fin, connaissant toutefois, quelques moments de faiblesse. En plus de la déprogrammation de Kindil El Bahr de Damien Ounouri, dans la section courts métrages algériens et The last of us film tunisien de Ala Eddine Slim, dans la catégorie fiction, les projections connaissent aussi quelques retards et des désagréments dans le timing. C'est le cas lundi, alors qu'avait été annoncée la déprogrammation du film Dustour de Marco Santarelli, initialement prévu à 14h, il sera tout de même projeté à notre grande surprise, une heure plus tard. Celui déprogrammé pour de vrai pour cause de non-réception de copie, entendons-nous, a été le film marocain Mélodie de la mémoire de Hicham Amal. A sa place, il a été présenté au public du théâtre régional d'Annaba Azzedine-Medjoubi, un hommage au réalisateur égyptien disparu, à travers notamment, la projection du film Hiyam, la fille de l'usine, sur la condition féminine dans les quartiers pauvres d'Egypte. Un film porté par une jeune et belle comédienne dans le rôle de Hiyam qui travaille dans une entreprise de textiles. Du haut de ses 21 ans elle tombe amoureuse de son patron. Alors qu'il se trouve alité et souffrant, Hiyam se rend à son domicile pour lui ramener à manger et donner un coup de main à sa famille dont la mère ne voit en elle qu'une simple bonne. Un jour, dans cette entreprise, on découvre un test de grossesse. Elle est immédiatement accusée et montrée du doigt. Hiyam ne niera pas et préfère se taire se sachant bien innocente. Alors que la révolution arabe gronde dehors, Hiyam est obligée de faire face aux attaques qui lui viennent de toutes parts, y compris de sa famille et les agressions dont elle fait l'objet dans son entourage. Hiyam ne peut hélas se défendre seule dans une société patriarcale où les traditions font rage. Celles-ci sont en effet impitoyables et ne sont pas prêtes à changer ni à tomber comme le système politique présent, car aux mentalités il faut une autre révolution qui ne viendra que de la femme, fera entendre ce film, tourné dans le style du cinéma «réaliste», soit dans un cadre ouvrier quasi véritable et dans des décors naturels, ceux des rues pauvres du Caire. Réalisé d'après un scénario signé Wessam Suleiman, l'épouse du metteur en scène, ce film plaide en effet pour la liberté de la femme dans tous les sens du terme, un changement qui n'est pas près d'arriver avec la recrudescence de la mentalité conservatrice. La fin du film qui s'avère libératrice porte en elle les stigmates de la marginalisation de Hiyam. Autre film qui apporte un nouveau regard sur la femme algérienne immigrée, cette fois, est D'une pierre deux coups de Fejria Deliba. L'histoire raconte les péripéties de Zayane 75 ans, qui depuis son arrivée en France, n'a jamais dépassé les frontières de sa cité. Or, un jour, elle reçoit une lettre lui annonçant le décès d'un homme qu'elle a connu, autrefois, en Algérie. Le temps d'une journée, elle part récupérer une boîte que le défunt lui a léguée. Pendant son absence, ses 11 enfants se réunissent dans son appartement et découvrent un pan de la vie de leur mère jusque-là ignoré de tous. Parmi ces enfants, le grand frère, alias Slimane Dazi, qui n'accepte pas le passé incongru, voire «sale» de sa mère. Un secret qui va être dévoilé grâce à une lettre. Des vérités qui surprennent les enfants, pourtant eux-mêmes adultes, et dont certains arrivent difficilement à l'admettre...A l' époque-on ne connaît pas la date- Zayane, alors 15 ans, travaillait au sein d'une famille française et tombe amoureuse du jardinier... A la mort de cet homme, son passé la rattrape et on découvre plein de choses sur le passé de Zayane. Graduellement, les préjugés de cette dame âgée vont s'écrouler comme un château de cartes. Aussi, les temps changenr. La réalisatrice prend la peine de brosser une société où une femme reconnaît simplement en aimer un autre et de voir le plus naturellement possible une Française portant le voile, dans une famille d'émigrés, après avoir contracté l'islam. Peut-on reprocher à la réalisatrice d'avoir voulu parler de trop de choses à la fois, en évoquant la France d'aujourd'hui? Lors du débat qui a suivi la projection, Fejria Deliba,(révélée par Yamina Benguigui dans Inchallah dimanche mais aussi à la télé dans le clip de Balavoine, Laziza), cette jeune femme devenue grande aujourd'hui et férue de cinéma dira: «J'ai voulu redonner vie à ces mères dont on parle peu. Elles ont été femme, fille, avant d'être mère. Je voulais rendre hommage à ces femmes maghrébines. Moi-même je suis issue d'une fratrie nombreuse. Ce genre de personnage n'a jamais été abordé à l'écran. Je l'ai fait et je suis contente. Je voulais aborder (le cas de)cette femme sous un regard différent, sous forme d'une fiction car le regard en France n'a pas été traité jusque-là comme ça. J'en parle aussi en tant que comédienne. La trame du film c'est aussi la question du silence entre la mère et les enfants. Le texte sert et porte ce silence-là...»