Les officiels et les médias français considèrent que la tragédie du 8 mai 1945, reste l'une des pages les plus sombres de l'histoire des deux pays. «Excellence, nous aimerions vous voir renouveler à Guelma, si vous le désiriez, l'initiative symbolique que vous aviez effectuée à Sétif». C'est là, un extrait d'une lettre adressée par le président de l'association du 8 Mai 1945 de Guelma à M.Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France en Algérie. Dans sa missive M.Saci Benhamla a estimé que les propos de M.de Verdière, tenus récemment à Sétif, ont été appréciés, à juste titre par l'opinion publique «qui considère qu'il s'agit bel et bien d'un grand pas sérieux et appréciable, de la part des autorités françaises, dans l'attente qu'un jour, l'Etat français décide enfin de présenter au peuple algérien des excuses officielles...» A quelques encablures, donc de la signature par les présidents Bouteflika et Chirac, à Paris, au courant de ce semestre, de l'accord d'amitié algéro-français, les officiels et les médias français considèrent que la tragédie du 8 mai 1945, à Sétif, Guelma et Kherrata reste l'une des pages les plus sombres de l'histoire des deux pays. «Tragédie inexcusable» et «massacre» sont les termes utilisés par l'ambassadeur de France pour qualifier les évènements du 8 mai 1945, lors de sa visite dans la capitale des Hauts-Plateaux où il s'est recueilli devant la stèle du premier martyr des évènements, en l'occurrence Bouzid Saal. Par ailleurs, dans un article intitulé «Paris reconnaît que le massacre de Sétif était inexcusable», le quotidien Le Monde rappelle que «le 8 mai 1945, la France célèbre l'armistice marquant la capitulation de l'Allemagne nazie. De l'autre côté de la Méditerranée, on s'apprête également à fêter la victoire, d'autant que nombre d'Algériens ont donné leur vie pour la libération de la France». Ce jour-là, poursuit le journal, «une foule estimée à 10.000 personnes défile en scandant des slogans nationalistes». Plus loin, le journal relèvera que «la répression sera d'une brutalité extrême, disproportionnée (...) et de nombreuses exécutions sommaires se produisent, en particulier dans la ville de Guelma». Pour sa part, l'ambassadeur de France en Algérie a insisté dans un entretien récent avec Radio France Internationale sur le «travail de mémoire» qu'il faut faire sur les massacres du 8 mai 1945. M. de Vérdière a souligné qu' «il faut rapporter les faits tels qu'ils ont été, et établir la vérité concernant ces massacres». Il reste que même si le gouvernement français, comme les tortionnaires de la guerre d'Algérie refusent le principe de repentance, «le fait de qualifier ce qui s'est passé à Sétif en mai 1945 est essentiel pour pouvoir effectuer ce travail de mémoire qui doit, bien entendu, être fait avec des chercheurs algériens», a tenu à préciser, M. de Verdière. C'est la première fois qu'un officiel français reconnaît, implicitement le caractère de crime contre l'humanité commis, à travers les boucheries du 8 mai 1945. S'exprimant devant les étudiants de l'Université Ferhat-Abbas, l'ambassadeur avait déclaré: «Je veux parler des massacres du 8 mai 1945, il y aura bientôt 60 ans : une tragédie inexcusable. Fallait-il, hélas, qu'il y ait sur cette terre un abîme d'incompréhension entre les communautés, pour que se produise cet enchaînement d'un climat de peur, de manifestations et de leur répression, d'assassinats et de massacres!» C'est là réellement un pas de géant dans la reconnaissance par la France de son passé colonial.