img src="http://www.lexpressiondz.com/img/article_medium/photos/P161116-02.jpg" alt=""J'aimerai interpréter des rôles sérieux et engagés"" / C'est un ovni dans le monde cinématographique tunisien et pourtant, ce beau Black porte sur son épaule tout un film. Un film bien particulier où, dans la peau d'un migrant subsaharien pense-t-on, il traverse lac et forêt pour atteindre un no man's land où il ne côtoiera personne si ce n'est un vieux et mystérieux personnage comme lui, mais pas pour beaucoup de temps puisque à son retour à la maison (faite de ses propres mains) et après un accident où il s'est trouvé blessé dans un trou, il retrouve le vieux mort, après qu'un animal l'a attaqué. Le nom de ce film des plus énigmatiques? The last of us. A ne pas confondre avec un autre film, américain celui-là, adaptation d'une vidéo. Véritable gageure cinématographique et sensorielle, The last of us de Allaedine Slim est doublé d'une aura poétique à faire frémir. Le secret? le génie qui réside dans le talent de cet acteur. Après avoir été auréolé à la dernière Mostra de Venise, The last of us vient de remporter le Tanit d'or de la première oeuvre au nom de Tahar Chriaâ aux JCC. Un défi donc pour ce comédien qui, grâce à son jeu sobre et la densité de l'émotion qui se dégage seule de son visage, répond à lui seul aux règles d'or du cinéma, l'émotion d'abord et puis la beauté du plan et son insatiable magie. Jawher Soudani a tout ça dans le regard et bien plus que ça, la majesté du port altier, de la grâce dans ce qu'il entreprend nimbé d'une force tranquille, digne des grands hommes matures. Objectif de ce graphiste: apporter de la beauté dans la pâleur de la Tunisie. En effet, rien ne prédestinait ce jeune designer graphique et street artist, du haut de ses 27 printemps à faire du cinéma. Jawher Soudani alias Vajo est plus connu aussi en tant que chef d'entreprise de Lablabi stores, un magasin de tee-shirts hautement colorés sur lesquels l'artiste laisse s'exprimer toutes ses envies en graffitis ou dessins graphiques pour dire son identité. Artiste créatif à souhait, Vajo ne s'arrête pas en si bon chemin. Il est bien parti pour faire encore parler de lui dans les années à venir. Retenez donc bien son nom. L'Expression: Vous attendiez-vous à ce Grand Prix aux JCC? Jawher Soudani: C'est une question qui tournait dans ma tête depuis le début du festival et Dieu sait que c'est ma première expérience. Toute l'équipe m'a encouragé à prendre ce rôle. Je félicite tous ceux qui ont cru en moi. Franchement, non, je ne m'attendais pas. Même à Venise on ne s'attendait pas à recevoir un prix. Pour moi, le film et je pense même pour l'équipe, le projet relevait plus de l'exercice, un travail qui relève de l'imaginaire, on ne s'attendait vraiment pas à rempoter ce prix. Aujourd'hui j'ai été surpris. C'est vrai, que je n'ai pas vu beaucoup de films durant les JCC, mais j'ai reçu des échos comme quoi il y avait d'autres films de très bonne qualité, donc je pensais que ce prix allait revenir aux autres... C'est votre premier rôle et d'autant plus vous incarnez un rôle très dur, vous ne parlez pas, comment avez-vous été dirigé par le réalisateur et qu'avez-vous fait pour accaparer le personnage? On a fait pas mal de répétitions. A Tunis on est parti dans les endroits qui ressemblent aux différents coins où l'on a filmé pour le film, notamment Tatatouine, Tunis, Bizerte, Aïn Drahem etc. On a pris pas mal de repères. La condition était claire dès le début: ne pas parler. Tout repose sur les expressions faciales. Ce n'était pas facile pour moi. Allaedine m'a conseillé de voir des films de ce genre, mais comprendre dans quel état d'âme je devais être et il fallait être le jour du tournage. Il m'aidait à m'inspirer de pas mal de gens, il me faisait voir des documentaires. J'en parlais un peu avec Fathi Akari, l'autre acteur. Il me donnait aussi des conseils. Comptez-vous poursuivre votre carrière dans le cinéma? Ça vous tente de continuer après cette première expérience des plus réussies? Oui, mais dans un rôle et registre différents que j'ai eu à interpréter car ça a été vraiment dur. Mais je ne vais pas accepter n'importe quelle opportunité qui va venir. Par exemple je refuse les sitcoms; je cherche quelque chose de plus sérieux et plus engagé... En tant qu'artiste visuel faisant du street art, comment évaluez-vous cet univers de l'art contemporain undergroud en Tunisie? Ça a commencé à se développer après la révolution. Les médias étaient concentrés sur la Tunisie, ça a poussé beaucoup d'artistes occidentaux à vouloir investir dans des projets ici, c'est comme ça qu'on s'est mis à rencontrer des gens, il y a eu une sorte de connexion, ça a inspiré beaucoup d'artistes et ils les ont poussés à monter des projets alternatifs et undergrounds. C'est parti de l'intérieur des artistes tunisiens, mais suite à leurs contacts avec des artistes venus d'ailleurs. Que comptez-vous faire dans ce sens aujourd'hui? Mon travail d'artiste ne suit plus la même trajectoire. Avant je faisais du graffiti, mais aujourd'hui je trouve cela redondant, je ne dis pas médiocre, aussi je cherche aujourd'hui quelque chose de plus profond et expressif, un message à faire passer. J'essaye de chercher quelque chose de plus intéressant. Les sujets qui m'intéressent c'est avant tout la discrimination, mais au sens large. Graphiquement parlant, cela ne ressemble plus à ce que je faisais avant ces dernières années. Cela s'appelle du flat illustration, j'utilise beaucoup plus d'aplats de couleurs et de textures. Avant, mon style relevait du graffiti classique. Maintenant, je me dirige vers un street art plus sobre et moins free style.