La nouvelle du décès du chantre du malouf, Hadj Mohamed-Tahar Fergani a bouleversé proches, amis et mélomanes. Au domicile mortuaire, au quartier de Sidi Mabrouk, jeudi soir, artistes et amis ont afflué pour rendre hommage au rossignol de l'antique Cirta et rappeler les plus beaux souvenirs de l'histoire de la préservation d'une musique séculaire, identité de toute une ville. Pour l'autre maître de la musique malouf, Kaddour Darsouni, à la tête des artistes qui se sont rendus chez le défunt, la disparition du rossignol de l'antique Cirta est «une grande perte». Cheikh Darsouni, 89 ans est considéré comme «le dernier des Mohicans» qui a su jalousement garder et préserver un pan de l'histoire de la musique algérienne. Pour le cheikh qui peine à retenir ses larmes, Mohamed-Tahar Fergani est «l'ami de toute une vie et le complice d'un parcours artistique de 70 ans et sa disparition est plus que pénible. Luthiste, flûtiste et chanteur, cheikh Darsouni, issu d'une famille de musiciens était souvent sollicité comme flûtiste par les orchestres de Hamou Fergani et Raymond Lyris avec Mohamed-Tahar Fergani, ils ont donné libre cours à leur talent et à leur passion affirment les artistes présents au domicile de feu Hadj Fergani. Transmetteur par excellence de la nouba andalouse, cheikh Darsouni auteur d'un inestimable recueil de poèmes de la musique arabo-andalouse, a accompagné, une vie durant Mohamed-Tahar Fergani en dirigeant son orchestre au cours des centaines d'enregistrements insistent à dire les présents au domicile de feu Hadj Fergani. Pour Larbi Bentellis, membre fondateur de l'association culturelle «Maqam», considérée comme une référence dans la transmission de la musique savante, aux jeunes générations, le décès du rossignol de l'antique Cirta est une rude épreuve. «La musique algérienne a perdu un de ses piliers», a-t-il affirmé. Pour M.Bentellis, Bouhadja, comme l'appelle affectueusement ses amis, il était un passionné de la musique. «En dépit de son âge et de son état de santé, Bouhadja ne pouvait résister à une gaâda constantinoise. Dès les premières notes, il lance son istikhbar et enchante son assistance, a-t-il rappelé. Le présentant comme un «dépositaire du legs des aïeux, l'intervenant affirme également que Hadj Fergani a consacré sa vie à son art. Il a effectué beaucoup de voyages avec le défunt et à chacun de ses déplacements, il oeuvrait inlassablement à faire connaître le malouf de Constantine. Dès l'annonce de la disparition de l'artiste, des fans de tous âges venant de différents quartiers de Constantine ont afflué, jusque très tard dans la soirée, vers le domicile de l'inégalable interprète de «Gâalou laâreb gâalou» pour un dernier hommage. L'annonce du décès de Mohamed-Tahar Fergani avait également suscité de nombreuses réactions d'artistes, unanimes à qualifier sa disparition de «perte inestimable» pour la musique et la culture algériennes. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait, dans un message de condoléances, estimé que l'Algérie perdait en Mohamed-Tahar Fergani «un monument de la culture et de la scène artistique», louant les qualités du défunt, la loyauté pour la patrie et son souci permanent à accomplir au mieux sa mission artistique à l'intérieur du pays et à l'étranger». Le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah a qualifié Mohamed-Tahar Fergani, de «monument de la musique andalouse» et de «personnalité distinguée» ayant marqué la culture algérienne. Le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, a affirmé que l'Algérie aura perdu un de ses plus grands artistes» qui a consacré sa vie à «la préservation (du malouf), un art raffiné et apprécié».