Avant même d'avoir achevé ses premières 24 heures à la Maison-Blanche, le nouveau président républicain s'est retrouvé interpellé par de multiples catégories d'Américains d'origines très diverses, mais fédérés par une même inquiétude. Au lendemain de l'investiture de Donald Trump qui a attiré des centaines de milliers de ses partisans, Washington voit l'inverse se produire hier avec une vaste manifestation d'opposants au nouveau président impulsée par des femmes et relayée par les réseaux sociaux. Cette «Marche des femmes», qui espère réunir 200.000 personnes venues de tout le pays, témoigne à elle seule de la fracture de la société américaine. Jamais depuis 40 ans un président des Etats-Unis n'avait suscité une telle défiance à sa prise de fonctions. Dans son discours d'investiture vendredi au Capitole, Donald Trump a donné le ton de son mandat: résolument populiste, de tendance nationaliste et en rupture implacable avec son prédécesseur, Barack Obama. Son premier décret, signé vendredi soir dans le Bureau ovale à la Maison Blanche devant les caméras de télévision, s'inscrit dans cette volonté: il ordonne à son administration de libérer autant que possible les acteurs du système de santé des obligations de la réforme du système de santé dite «Obamacare», détestée des conservateurs pour son coût et sa lourdeur. A son agenda, le nouvel homme le plus puissant du monde a seulement rendez-vous hier à 9h30 (14h30 GMT) à la cathédrale Nationale de Washington pour un office oecuménique, en présence de religieux chrétiens, mormon, hindou... ainsi que d'un rabbin et d'un imam. Son équipe a donné rendez-vous demain pour de nouvelles décisions politiques significatives. Les contestataires de la marche d'hier devaient défiler à partir de 10h00 (15h00 GMT) sur le National Mall de la capitale fédérale, la vaste esplanade en face de laquelle le milliardaire a justement été intronisé 45e président des Etats-Unis vendredi. On peut donc s'attendre à des comparaisons en termes de mobilisation, d'autant plus que Donald Trump n'a réussi à rassembler qu'environ un tiers de la foule qui avait acclamé Barack Obama en 2009, selon une estimation d'un expert cité par le New York Times. Cette «Marche des femmes», principale manifestation prévue hier, trouve sa genèse dans un simple appel posté sur Facebook qui a fait tache d'huile. Il émane d'une grand-mère, Teresa Shook, avocate à la retraite vivant jusque-là dans un anonymat paisible à Hawaï. Le cinéaste Michael Moore, l'actrice Scarlett Johansson ou la militante des droits civiques Angela Davis sont quelques-unes des célébrités qui s'exprimeront. Les chanteuses Katy Perry et Cher soutiennent cette initiative. Les organisateurs auront à coeur de se montrer en nombre et dans le calme, après les violences de vendredi dans quelques rues de la capitale, qui ont conduit à l'interpellation de plus de 200 personnes. Près de 225.000 personnes avaient confirmé vendredi leur intention de participer à la marche. Certains signes présagent une forte mobilisation, comme les 1200 autocars ayant demandé un permis de stationnement, ou l'ampleur prise par l'initiative sur les réseaux sociaux (îWhyImarch, îwomensmarch, îNotMyPresident...). La «Marche des femmes» est aussi soutenue par des dizaines d'organisations progressistes en opposition frontale avec Donald Trump: défenseurs des droits civiques, des immigrés, des musulmans, du droit à l'avortement ou des drogues douces... des écologistes, féministes, pacifistes, homosexuels, Noirs et Amérindiens, bref un melting-pot de citoyens inquiets. Sans compter le soutien d'Amnesty International et de Planned Parenthood, le plus grand réseau de planning familial du pays. Les organisatrices annoncent environ 300 «marches soeurs» dans d'autres villes des Etats-Unis dont New York, Boston, Los Angeles et Seattle, ainsi qu'au-delà des frontières américaines.