Vincenzo Nesci, le Président exécutif de Djezzy De la «success story» à la traversée du désert, jusqu'à la renaissance. L'opérateur de téléphonie mobile est passé par toutes les étapes que l'on peut étudier dans une école de commerce... Djezzy, un cas d'école! C'est avec ces termes très significatifs que son Président exécutif, Vincenzo Nesci, a choisi de commencer, mercredi dernier, sa conférence devant les élèves de l'Ecole supérieure algérienne des Affaires (Esaa). Il faut dire que l'opérateur de téléphonie mobile est passé par toutes les étapes que l'on peut étudier dans une école de commerce. De la «success story» à la traversée du désert, jusqu'à la renaissance. Djezzy, une histoire algérienne que l'un des pères fondateurs a voulu raconter aux futurs managers. «Dans les années 2000, après la décennie noire, les autorités algériennes avaient décidé d'attirer les investisseurs étrangers et développé les télécommunications. Quoi de mieux que la téléphonie mobile pour réussir ce pari?», contextualise-t-il en rappelant qu'a l'époque il n'y avait qu'un seul opérateur avec seulement 170.000 abonnés. «Le marché était là, mais il fallait savoir prendre le risque et saisir cette belle opportunité. Ce que Orascom télécom, où j'étais déjà employé à l'époque, a su faire», ajoute avec fierté cet homme qui avait fait partie de ceux qui ont élaboré l'avis de soumission à l'avis d'appel d'offres international lancé par l'Algérie. «OTH avait proposé 730 millions de dollars, contre un peu plus de 400 millions de dollars de la part des deux autres concurrents Orange et Téléphonica. Orascom a donc obtenu la deuxième licence de téléphonie mobile, et c'est de là que l'aventure Djezzy a commencé il y a de cela déjà 15 ans», rappelle-t-il d'un air des plus nostalgiques. L'accession C'est ensuite une ascension des plus fulgurantes dans un pays qui renaissait de ses cendres. «1 million d'abonnés après plus d'un an. 5 millions en à peine 4 ans. Djezzy devient vite l'une des plus belles réussites économiques du pays», souligne celui qui se dit «fiers de faire partie des pères fondateurs». Surtout qu'il met en évidence le fait qu'en plus d'une réussite économique, cet opérateur a été derrière des révolutions qui marqueront à jamais l'histoire du pays. «On a été derrière la vulgarisation du téléphone portable chez les Algériens. Je me rappelle qu'avant Djezzy, je venais en Algérie je ne trouvais pas de réseau Romaing pour utiliser mon téléphone», assure-t-il. «On a aussi révolutionné la façon de communiquer, avec des campagnes publicitaires des plus innovantes. On a également révolutionné la façon de recruter et de former la ressource humaine avec des méthodes de management qui étaient nouvelles dans le pays», s'est-il félicité. La traversée du désert Néanmoins, après avoir réalisé des performances hors du commun, la machine commence à se «rouiller» à partir de 2008. «C'est une traversée du désert», commente Nesci. Le fisc passe par là, avec un redressement de plusieurs centaines de millions de dollars. «Djezzy se voit interdire de rapatrier ses dividendes vers la maison mère Orascom qui a été frappée de plein fouet par la crise mondiale», rapporte-t-il. Le groupe égyptien décide alors, en 2010, de vendre Djezzy au géant russo-norvégien VimpelCom. Le gouvernement algérien s'oppose rapidement à cette transaction faisant valoir son droit de préemption. Commence alors une véritable bataille entre les nouveaux propriétaires de Djezzy et les autorités algériennes. Le chairman Vincenzo Nesci débarque en juillet 2012 pour essayer de sauver les meubles. Il a trouvé une société en ruine. «Mais elle arrivait à survivre et répondre aux besoins de clients malgré la situation dramatique dans laquelle elle se trouvait. Je tiens à cette occasion, à féliciter les employés qui ont réussi le défi de maintenir à flot l'entreprise», témoigne-t-il. «Je me suis retrouvé face à deux clans, ceux qui voulaient aller à l'arbitrage international et ceux comme moi qui voulaient que l'Algérie entre dans le capital. On a dû batailler ferme pour arriver à convaincre tout le monde», indique-t-il en avouant qu'il ne dormait plus de la nuit. Alors que Djezzy était sur la sellette en étant notamment interdit d'importation, l'Algérie lance la 3G. «Djezzy obtient la 3ème licence, mais ne peut lancer le service du fait que l'interdiction d'importer nous avait empêché de développer notre réseau. Ce dernier travaillait à la limite, j'ai refusé de risquer un crash total pour un positionnement commercial», a-t-il attesté. Quelques mois plus tard, il a fini par lancer sa 3G, mais ses concurrents avaient pris déjà de l'avance. Entre-temps, en 2014, un accord est trouvé et Djezzy devient à 51% étatique. «C'est un nouveau défi qui commençait. On devait réussir à montrer que le partenariat public, privé n'était pas une utopie, mais aussi pour démontrer que la règle du 51-49% n'était pas un frein pour l'investissement», a-t-il dit. La renaissance Vincenzo Nesci qui en 2012, avait été appelé pour 6 mois à la tête de Djezzy, se prépare doucement, mais sûrement, à la prochaine bataille qui sera sans aucun doute celle de la 4G. Djezzy décide alors de tout changer, son identité visuelle, ses équipes en recrutant de nouveaux profils en adéquation avec les défis à venir. Une stratégie qui donne tout de suite ses fruits puisque Djezzy arrive à relever la tête est «s'impose dans la bataille de la 4G», précise le P-DG de l'entreprise. «On a commencé par trois wilayas, deux mois après on était déjà à 20 wilayas», révèle-t-il. Voilà donc une histoire algérienne avec une entreprise que l'on avait donné comme morte, qui a réussi à bien se relever. Elle emploie aujourd'hui 2900 employés, dont 16 seulement sont des Algériens. Elle compte en recruter prochainement 1500 autres et surtout investir 1 milliard de dollars! Un bel exemple qui a été presté magistralement par le professeur Nesci (il a débuté sa carrière professionnelle en tant qu'enseignant universitaire, ndlr). Après l'avoir bombardé de questions, ses futurs cadres supérieurs l'ont remercié pour cette «leçon» avec un tonnerre d'applaudissements...