Le ministre de la Justice, garde des Sceaux Le concept de justice au nom du peuple, reprend son sens, puisque les citoyens-jurés seront plus nombreux que les magistrats. Rénové, le Code de procédure pénal apportera plus de visibilité dans l'action de la justice, confortera le principe de la présomption d'innocence et balisera le travail de la police judiciaire. Ce sont là les principaux objectifs de la réforme du code, présentés hier devant le Conseil de la nation, par le ministre de la Justice. Tayeb Louh qui en est à son énième projet de loi dans le sillage du chantier de la réforme de la justice, n'a pas hésité à qualifier la démarche sur le dossier des procédures judiciaires de «réforme profonde, une mesure qui intervient en adéquation avec le principe constitutionnel». Lequel principe est contenu dans la nouvelle Constitution qui a explicitement prévu «l'institution d'un deuxième degré de juridiction en matière pénale, et en renforcement des garanties pour un procès équitable et conforme aux normes internationales en matière des droits de l'homme». Une mise à niveau qui donne au justiciable l'opportunité de contester une décision prise par un tribunal criminel. Avant la réforme, les décisions de ce tribunal, rendues au nom du peuple, étaient sans appel. Ainsi, en vertu du projet soumis, hier, au Conseil de la nation «l'accusé a le droit d'interjeter appel conformément à la loi, auprès d'un tribunal de première instance qui statuera à nouveau sur son affaire», informe le ministre de la Justice, qui annonce «la création de plusieurs mécanismes dont un tribunal criminel d'appel au siège de chaque cour». Autre aspect «novateur» dans le projet du Code de procédure pénale est «l'augmentation du nombre des assesseurs jurés». Il est ainsi prévu l'augmentation du nombre de jurés populaires à quatre au lieu de deux, qui viendront assister trois magistrats professionnels. Cette nouveauté n'en est pas une, en réalité, puisqu'il s'agit d'un retour à une formule qui a été déjà pratiquée par la justice du pays. De fait, le concept de justice au nom du peuple, reprend son sens, puisque les citoyens-jurés seront plus nombreux que les magistrats. Cette forme de «primauté» du peuple sur le magistrat dans le rendu de la justice dans les affaires criminelles est une donne universelle, dont l'Algérie s'est éloignée. Dans cet esprit de sauvegarde des libertés individuelles, les magistrats perdent le recours à l'ordonnance de prise de corps, qui sera supprimée. Cette décision est intimement liée au principe «de la présomption d'innocence». Le nouveau code stipule l'«obligation pour l'accusé poursuivi pour crime, qui a été mis en liberté ou qui n'a pas été détenu au cours de l'instruction, de se présenter dans un délai ne dépassant pas la veille de l'audience». Ce cadrage des missions de la magistrature vaut aussi pour les agents de la police judiciaire, soumis désormais à une «habilitation délivrée par le procureur général compétent», pour conduire toute enquête ou interrogatoire de suspects. Le contrôle des activités de la police est strictement codifié, mais permet au policier qui se voit refuser pareille autorisation d'introduire un recours devant la commission ad hoc. Cette commission, aujourd'hui inexistante, sera créée dans le cadre du nouveau Code de procédure pénale. Cet «alourdissement» du fonctionnement de l'appareil judiciaire a ceci d'intéressant est qu'il encadre l'action de la police. Enfin, la police judiciaire relevant des services militaires de sécurité a été définie avec précision. Sa mission se limite aux «infractions d'atteinte à la sûreté de l'Etat prévues et réprimées par le Code pénal et qui compte les crimes de trahison, d'espionnage, de terrorisme et de sabotage».