Ould Kaddour et Noureddine boutarfa Le changement a été opéré, hier, lors d'un conseil d'administration de la compagnie nationale des hydrocarbures présidé par le ministre de l'Energie, Noureddine Boutarfa. On pensait que Sonatrach allait connaître une certaine stabilité à sa tête après les scandales qui l'ont secouée et qui ont éclaboussé certains de ses dirigeants. Le limogeage de son désormais ex-patron vient de confirmer que cet objectif n'a pas encore été atteint... Le communiqué du ministre de l'Energie qui a exhorté son successeur «à agir en toute responsabilité et en toute confiance en vue de mettre en oeuvre les changements qualitatifs permettant à Sonatrach d'évoluer et de prospérer dans un climat d'entreprise serein, propice à la prise d'initiatives et de décisions» l'atteste. L'ère Mohamed Amine Mazouzi est révolue. Place à Abdelmoumen Ould Kaddour, polytechnicien diplômé du Massachusetts Institute of technologie (Etats-Unis) dont la mission principale consistera à faire jouer Sonatrach dans la cour des grands. Le P-DG et les hauts responsables de Sonatrach sont appelés «à faire preuve d'un engagement sans faille pour préserver les intérêts de Sonatrach et faire évoluer les pratiques managériales et productives pour rendre la compagnie capable de s'adapter aux changements de son environnement», a indiqué Noureddine Boutarfa. Ould Kaddour est déjà assuré du soutien des plus hautes autorités du pays. Il a «le soutien des plus hautes autorités du pays et à leur tête Son Excellence le président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika, qui souhaite que Sonatrach renoue avec la sérénité, la cohésion et l'exemplarité», a souligné le communiqué. La feuille de route est donc claire. Mais si le successeur de Mazouzi aura les coudées franches, il n'empêche que sa trajectoire sera balisée. Sa nomination a la tête de la mamelle de l'économie nationale intervient dans un contexte de crise financière provoquée par une tenace dégringolade des prix du pétrole. Alors qu'une sérieuse controverse sur la capacité de production de l'entreprise pétrolière publique a mis à mal son image sur le plan international. Alors qu'elle aurait dû surfer sur l'accord historique d'Alger scellé le 28 septembre 2016 lors d'un sommet de l'Opep, tenu en marge du 15 ème Forum de l'Energie, qui a démontré l'efficacité et l'influence de la diplomatie algérienne, Sonatrach a donné l'impression de s'endormir sur ses lauriers. Sa stratégie de communication a montré des failles. Cette défaillance fait partie très probablement des griefs qui ont provoqué le dégommage de Mohamed Amine Mazouzi. Il lui serait reproché aussi de manquer d'agressivité, une qualité propre aux redoutables négociateurs, qui lui aurait fait défaut au moment où l'Algérie s'apprête à réévaluer ses contrats de gaz avec ses nombreux partenaires. Du coup, il ne pouvait que se retrouver sur un siège éjectable. L'affaire de la rupture d'approvisionnement de gaz vers la France allait sans doute le fragiliser davantage. L'approvisionnement en gaz de la partie sud-est de l'Hexagone connaît une situation «assez préoccupante» avaient rapporté les médias français qui ont précisé que: «Ce manque de gaz vient d'un problème de production en Algérie, un des principaux fournisseurs de gaz en France.» L'ancien patron de la compagnie des hydrocarbures a démenti cette information qui ne pouvait que faire très mal. «C'est une polémique qui a été créée de toutes pièces...», a-t-il affirmé le 26 janvier lors d'une conférence de presse organisée en marge de la signature de deux contrats d'études avec des sociétés italienne et indienne. «Nous n'avons entendu ni Sonatrach ni Engie (son partenaire, ndlr) parler de manque d'engagement, ce sont des tiers, des spéculations (...). Il y a eu une vague de froid (en Europe) qui n'était pas prévue et qui a été accompagnée d'une très forte demande (en gaz). Tout le monde est alors allé chercher du gaz et l'Algérie a été un fournisseur très fiable, et a concouru à exporter une partie de cette demande européenne», avait expliqué Amine Mazouzi. Le projet de gazoduc offshore qui devrait relier le Nigeria, troisième producteur de gaz naturel en Afrique, au Maroc, annoncé par le souverain marocain en personne le 3 décembre 2016 allait mettre en évidence ce déficit de combativité mis en exergue par les pouvoirs publics pour réactiver le processus de restructuration de Sonatrach. Les pouvoirs publics ont-il eu la main heureuse en jetant leur dévolu sur Abdelmoumen Ould Kaddour? A lui de le prouver. L'avenir de Sonatrach est en jeu...